Grotte de La Mouthe - Les Eyzies-de-Tayac - Périgord - Dordogne |
La grotte de La Mouthe
Les Eyzies-de-Tayac, Dordogne
Un peu moins connue, La Mouthe est pourtant la première grotte ornée reconnue comme paléolithique par le monde scientifique en 1902.
(Cette grotte ne se visite pas)
Situation
La grotte de La Mouthe est située à trois kilomètres des Eyzies-de-Tayac, près du hameau éponyme. L’entrée de la grotte n’est pas visible de la route et apparaît discrètement en lisière d’un petit bois. Orientée vers le soleil levant, la grotte domine un petit vallon dégagé. Tout près, la Vallée de la Vézère devait, aux époques paléolithiques, permettre un accès rapide à l’eau et à la nourriture.
A gauche : l'entrée de la grotte de La Mouthe.
Découverte
La grotte, ainsi qu’une grande partie des terres aux alentours, appartenaient depuis plusieurs générations à la Famille Lapeyre. Le propriétaire avait muré la cavité en 1845 et l’avait vidée pour l’utiliser comme grange. Il y avait entreposé ses récoltes de betteraves et de pomme de terre pendant la période hivernale ! Au printemps 1895, le fils, voulant agrandir l'espace, entreprit d'abaisser le sol. Il découvrit alors l’entrée d’une petite galerie. Avec des amis, ils décidèrent d’explorer l’étroite conduit d'environ 37 cm de hauteur. Les jeunes gens, après avoir rampé, pénétrèrent dans une salle où ils pouvaient se tenir debout. L’un d’entre eux remarqua alors une gravure représentant un bison… Il décidèrent de prévenir un scientifique Emile Rivière qui logeait à l’Hôtel de la Gare à Cro-Magnon.
Après avoir commencé l’exploration de la grotte, Emile Rivière sollicita en juin 1895 une mission auprès de l’Académie des sciences. Avant toute choses il déblaya la galerie afin d’en faciliter l’accès. Les travaux durèrent jusqu’en septembre et reprirent ensuite en 1896. C’est à ce moment qu'il fit réaliser des estampages et pris une série de clichés photographiques dans la grotte. En 1889, Ch. Durand installa pas moins de 150 bougies pour avoir suffisamment de lumière pour exposer les plaques pendants plus de 5 heures !
La Mouthe est la première grotte ornée paléolithique reconnue en Dordogne. A cette époque, l’art pariétal a encore du mal à être accepté comme véritable et ancien. Emile Rivière persista ; il communiqua et insista : "Les dessins gravés et coloriés existent dans la grotte de La Mouthe, lesquels ont été exécutés aux temps préhistoriques. » C’est la reconnaissance de l’art pariétal de la Mouthe qui permis à la communauté scientifique de l’époque d'authentifier d’autres cavités comme Altamira, Pair-non-Pair et Chabot. En 1902, le préhistorien Emile Cartailhac reconnut que ses doutes sur l’authenticité des grottes préhistoriques étaient injustifiés et publia son fameux « Mea Culpa d’un sceptique ».
En 1900, l’abbé Breuil visita la grotte de La Mouthe et réalisa des décalques de plusieurs figures gravées. Malheureusement, pour tenir les feuilles de calques, Henri Breuil utilisa des boulettes d’argiles qui souillèrent partiellement la paroi.
A gauche : Congrès de l'Association Française pour l'Avancement des Sciences, à La Mouthe en 1902.
Classée Monument Historique et protégée depuis 1953, elle a été inscrite au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’Unesco parmi les sites préhistoriques et grottes ornées de la Vallée de la Vézère.
Les études de la grotte de la Mouthe
Si cette petite cavité n'est pas vraiment connue du grand public, ce sont les plus grands noms de la préhistoire qui se sont succédé pour l'étudier : Rivière 1895, Breuil 1900, Boule 1901, Cartailhac 1902, Chauvet 1903, Peyrony 1903, de Mortillet 1912, Delage 1913, Reinach 1913, Peyrony, Capitan et Breuil 1922... Plus proche de nous, l'abbé Glory en 1958 puis Brigitte et Gilles Delluc en 1971 et 1984.
La datation de la grotte, se basant sur les strates archéologiques de l'entrée, précise que la cavité a été occupée du Moustérien au Magdalénien. Quant aux oeuvres pariétales, on estime que les figures ont été réalisées entre le Gravettien et le Magdalénien, soit une période de 10 000 ans entre les deux extrêmes.
La grotte
La cavité s’est creusée dans du calcaire karstifié coniacien, comme la majorité des grottes de la région. Le porche (actuellement muré) est une ouverture d’une dizaine de mètres de large avec une hauteur sous voûte de 3 mètres. Au fond de cette première salle s’ouvre la galerie vers le nord sur plus de 180 mètres de long.
Pendant les premiers 90 mètres les scientifiques n’ont pas trouvé de peintures ou de gravures. Les préhistoriques se sont donc probablement enfoncés dans la galerie munis de torches ou de lampes.
Une première salle s’ouvre sur la paroi ouest : la « Salle des grands bœufs », suivie quelques mètres plus loin de la « Salle des petits bisons ». C’est ensuite sur la paroi est qu’on peut découvrir la « Salle de la Hutte ». La fin de la galerie se termine par la « Salle des Rennes tachetés ». Ch. Durand les avaient nommés Salle de l’Equidé, Salle du Bison, Salle de la Hutte, et Salle du Cervidé tacheté. Les dessins de la galerie Laborie n’ont été reconnus qu’en 1958.
Les parois ornées
Les figures se concentrent dans 5 espaces (renflements) ponctuant la galerie principale. Dans l'ordre d'éloignement par rapport à l'entrée : salle des Taureaux (91 m), salle des Bisons (96 m), salle de la Hutte (108 m), salle des Rennes (121 m), salle des Bisons peints (155 m).
Espace 1 : la Salle des grands bœufs (dite aussi Salle des grands bovidés ou Salle de l’équidé)
Plus qu’une salle, cet espace est constitué d’un renflement concave des parois. Quatre bovins et un cheval ont été gravés sur la paroi. Si certaines traces rouges apparaissent sur les gravures c’est uniquement due à une malencontreuse idée (moderne) de souligner les dessins avec le l’ocre rouge. De la même façon, des traces noirâtres sont des reliquats d’huile aspergée sur les gravures pour les mouler.
Les gravures sont de grandes tailles, profondes et larges, le trait est précis et vigoureux. Il ne figure aucun détail sur le corps même de l’animal.
Dimensions des figures : le cheval 97 cm, les bovins 150 cm 195 cm 290 cm et 235 cm.
Salle des grands boeufs (Photo Delluc) |
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Bovin 2 |
Bovin 3 |
Le Cheval Acéphale
Le Cheval n’a pas de tête et l’étude de la paroi montre qu’elle n’a jamais été représentée alors que la place était pourtant suffisante. La position du cheval montre qu’il est à l’arrêt, même si la partie inférieure des pattes avec les sabots est manquante.
Le trait de gravure est relativement large (de 8 à 15 mm) mais profond de seulement 1 à 3 mm. A plusieurs endroits des impacts de coups de pics apparaissent indiquant que la gravure a été réalisée par piquetage.
Espace 2 : Salle des petits bisons (dite aussi Salle des bisons)
Au total, 21 figures gravées relevées par H. Breuil restituent l'ensemble de la paroi gauche : quinze représentations de plusieurs animaux dont neuf bisons, un cerf élaphe, deux bouquetins, un autre cerf... En fait, la roche se désagrège en arène et il est probable que certaines gravures aient disparu. Les figures les plus lisibles sont les bisons du registre inférieur.
A droite : bison n° 8, dit Bison de la Découverte (carte postale ancienne).
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Salle des petits bisons - Relevé des gravures 6 à 21 (H.Breuil) |
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Salle des petits Bisons, paroi gauche (Photo Delluc) |
Bisons 7 à 11. (Photo Delluc) |
Espace 3 : La Salle de la Hutte
Elle mesure 4m sur 5m. Si c'est la Hutte qui a étonné et subjugué des chercheurs, cet espace est riche de nombreuses autres représentations.
Sur la paroi à droite : 1 bouquetin gravé et 1 rhinocéros s'y superposent, 2 rennes,1 boeuf musqué,1 mammouth.
A gauche : 1 grand signe quadrangulaire peint et gravé, 3 mammouths, 4 chevaux ressortent d'un fouillis de traits et de contours inachevés.
La "hutte", impressionnante figure réalisée sur près de 1 mètre carré, polychrome et gravée, a été comparée autrefois à une tente. En fait, rien ne permet d’avancer que ce dessin soit la représentation réaliste d’une cabane. Sa signification reste énigmatique.
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Bouquetin |
Tête de renne (photo Delluc). Salle de la Hutte. Panneau gauche, en haut et à droite. |
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Mammouth (photo Delluc). Salle de la Hutte.
Panneau gauche en bas et à gauche. |
Salle de la Hutte. Panneau gauche |
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Salle de la Hutte (relevé H. Breuil) |
Photo de la "hutte" (Cliché Delluc) |
Espace 4 : Salle des rennes tachetés (ou Salle des grands rennes et du rhinocéros) .
Salle des Rennes : 3 rennes dont 1 acéphale, 1 mammouth, 1 tête de taureau, 1 cheval, 1 signe triangulaire. Panneau dit du grand rhinocéros (qui est peut-être un mammouth) : 1 bouquetin, 3 chevaux, 1 bison.
Les rennes gravés (24 et 27) sur la partie gauche sont de grande taille (1,40 m et 1,75 m). Sur leurs flancs, des tâches noires alignées sont probablement une indication naturaliste du pelage de l'animal. Le renne 22, plus petit, ne bénéficie pas de ce rajout de tâches.
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Panneau de la Salle des rennes tachetés - Relevé Breuil |
Renne tacheté 24 - Photo Delluc |
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Panneau du rhinocéros - Relevé Breuil |
Cheval 38. Panneau du rhinocéros, au milieu. |
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Rhinocéros 39 et cheval 38 |
Renne 27 (Photo CH Durand 1895) |
Espace 5 : Galerie Laborie
La partie terminale de la caverne, protégée par une chatière sévère, réputée inexplorée et seulement entrevue par H. Breuil, est visitée le 23 mars 1958 par l'abbé A. Glory, accompagné de huit spéléologues. Ils découvrent trois dessins peints complétés par des traits gravés, qui ne seront pas retrouvés. Cette galerie a été étudiée par B. et G. Delluc en 1971.
On y observe une coupole ovale de 5,50 m sur 1,50 m de large creusée dans la voûte par un tourbillon, au niveau d'un coude de la galerie. C'est la partie inférieure de la coupole qui a été décorée par les hommes paléolithiques. La paroi est de couleur ocre avec des coulées de calcite formant un voile à certains endroits.
On peut apercevoir 3 figurations de bisons peintes en noir, de petites tailles (deux de 60 cm de large et une de 35 cm). Les représentations sont partielles et plus ou moins opaques selon l'épaisseur du voile de calcite. Deux points rouges ont également été identifiés dans cette partie de la cavité.
Armand Laborie a laissé un souvenir… de son nom en majuscules, dessiné sur le Bison 1. Cet "autographe" a été apposé lors de sa visite le 8 avril 1895.
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Les bisons de la galerie Laborie (relevé Delluc) |
Galerie Laborie. Bison 1 surchargé par la signature d’Armand Laborie (photo Delluc) |
Le mobilier archéologique
Le 29 août 1899 découverte, dans un foyer magdalénien, près de l’entrée de la cavité, d’une lampe en grès rouge. Sur sa face inférieure, la lampe était gravée d’une tête de bouquetin avec des longues cornes recourbées vers l’arrière. La face supérieure, creusée, plus sombre, a été grattée par les scientifiques pour analyser la matière noire déposée. Ce sont bien des graisses animales qui ont servi de combustible, très probablement dans un but d’éclairage.
Paléolithique supérieur, Gravettien (?) et Madgalénien, vers 12000-11000 av. J.-C.
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Objets et outils retrouvés par Emile Rivier et présentés à l'AFS en 1897 |
Lampe en grès rouge décorée d’un bouquetin © RMN-Grand Palais (musée d’Archéologie nationale) / Christian Jean / Jean Schormans |
Hominides.com remercie Brigitte et Gilles Delluc pour les photographies, documents et études communiqués pour la réalisation de cette page et leurs relectures.
La grotte de la Mouthe en bref...
Type : |
Technique |
Période |
Occupation |
Restes humains |
Grotte ornée
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Gravures et peintures |
Magdalénien |
Du Moustérien au Magdalénien |
Non |
Dimensions |
Nombre de représentations |
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Outils |
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200 représentations
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Majorité de gravure et quelques peintures
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Nombreux foyers |
Silex taillés, outils en os, lampe, dents percées |
Localisation |
Accessibilité |
Date de la découverte |
Particularités |
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Hameau de la mouthe
Les Eyzies-de-Tayac |
Ne se visite pas
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Découverte de l'art de la grotte en 1894
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Grotte connue et utilisée depuis le 18ème siècle. |
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Mise en ligne le 01/03/18
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