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Abri Pataud
L’abri Pataud
Une succession exceptionnelle d’occupations humaines entre -35 000 et -25 000 ans : 14 couches de stratigraphie sur 9,25 m de hauteur !
Les Eyzies-de-TayacPérigord
L’abri Pataud est situé au coeur même du village des Eyzies-de-Tayac-Sireuil. L’abri se trouve à une centaine de mètres du centre ville, au pied de la célèbre falaise qui le surplombe. On peux y accéder par l’Avenue de la Préhistoire, l’artère centrale, ou en prenant le chemin du Moyen-Age à partir du Musée National de Préhistoire. Il est relativement aisé de se garer si l’on vient en dehors de la période estivale !
Une struture de métal a été construite à partir de la paroi pour protéger la stratigraphie de l’abri qui est toujours en place. En effet, la totalité de l’abri n’est pas fouillée pour permettre aux futures générations, avec peut-être de nouvelles techniques, de découvrir d’autres éléments de la vie des hommes du Paléolithique.
Historique de la découverte
L’abri Pataud est connu depuis les années 1900 car du terrain émergaient régulièrement des feuilles de laurier dont le style et le travail attire les collectionneurs ! A cette époque se succèdent de nombreux amateurs de la préhistoire : Louis Christy, Louis Lartet, Emile Rivière, Louis Capitan, Denis Peyrony, Otto Hauser… Les recherches sont ponctuelles et sans découverte majeure : le lieu est encore habité par la famille Pataud qui refuse de voir son terrain criblé de trous !
Cette « interdiction » a sans doute permis la conservation du site jusqu’à une époque récente. En effet, les premiers préhistoriens avaient la fâcheuse habitude de vouloir « faire des collections » sans se préoccuper d’établir une vision globale du gisement.
C’est en 1953 que le préhistorien américain Hallam Leonard Movius (1907-1987) obtient l’autorisation de faire des fouilles car les descendants de la famille Pataud ne veulent plus occuper ce lieu jugé dangereux dans sa conformation. En 1957, le chercheur tenace permet que la ferme devienne propriété du Muséum National d’Histoire Naturelle mais ce sont des fonds américains qui ont permis la transaction !
De 1958 à 1964, Movius entreprend six campagnes de fouilles. Scientifique et strict, H.L. Movius utilise, avec des équipes franco-américaines, la technique du carroyage au sol pour garder les traces des découvertes au fur et à mesure de l’avancée des travaux. C’est la première fois que cette technique moderne de fouilles est utilisée dans le Périgord. En 1958, la vénus de Pataud (à droite) est trouvée fortuitement en retournant un bloc calcaire que les préhistoriens pensaient sans intérêt !
La présence d’énormes blocs d’effondrements gêne cependant la progression les premières fouilles.
Jusqu’en 1980, les études du matériel, amassé pendant des années, continuent dans la maison adjacente, transformée en réserve et en laboratoire.
Le site est ouvert au public en avril 1990 sous la direction du Muséum National d’Histoire Naturelle et avec l’impulsion du professeur Henry de Lumley.
De 2005 à 2009, les fouilles utilisant des techniques plus modernes sont reprises mais en utilisant de manière informatique cette fois, une partie du carroyage mis en place par H.L. Movius. Plus de 400 restes humains sont mis au jour dans la couche 2 datant de – 22 000 ans. Il correspondent, d’après les chercheurs, à 6 individus au minimum : une femme de 20-29 ans, un nouveau-né âgé (moins de 3 mois), un homme adulte, une femme adulte et un autre nouveau-né (entre 3 et 6 mois), ainsi qu’un enfant d’environ 5 ans. La présence d’éléments de parure (perle en ivoire de mammouth) et d’ocre suggère qu’il s’agit bien de dépôts intentionnels, vraisemblablement dans le cadre d’un rituel funéraire complexe.
Visite de l’abri Pataud en images
Vues générales intérieurs
L’ensemble du site est particulièrement bien documenté et les 14 couches archéologiques sont expliquées et numérotées. Au sol, les fouilles sont arrêtées par la roche originelle de la base de l’abri (35 000 ans). L’accès à l’ensemble du site est facilité par une mezzanine qui permet au visiteur de visualiser les différentes couches stratigraphiques. De nombreux panneaux expliquent notamment le climat et la faune correspondants à l’époque de chaque stratigraphie.
3 grandes périodes de passage ou d’occupation
L’abri Pataud a connu trois périodes principales.
A l’Aurignacien – 35 000 ans l’abri n’est pas profond et les premiers occupants utilisent le petit auvent comme un campement de chasse provisoire.
Au gravettien – 28000 / – 22 000 ans. L’abri s’est creusé et l’auvent, beaucoup plus large, peut acceuillir les hommes qui s’installent pour de plus longues périodes.
Au solutréen – 20 000 ans. L’auvent devenu trop en surplomb, s’écroule en scellant et protégeant les couches archéologiques anciennes.
Il y a 20 000 ans, l’abri principal s’est complètement effondré, laissant seul et intact l’abri Movius situé à droite qui abrite aujourd’hui le petit musée. L’abri Pataud est un véritable site de référence pour les périodes de l’Aurignacien, du Gravettien et du Solutréen.
Les traces de l’occupation humaine
Le 2 juillet 1958, première découverte d’un crâne et d’une mandibule complets appartenants à un adulte. Les fouilles Movius ont permis d’identifier en tout plus de 250 restes humains. Ces fragments osseux appartiennent à au moins 6 individus du Gravettien final (-22 000 ans). La position des ossemements, près de la paroi du fond de l’abri, indique que les corps y ont été déposés intentionnellement. Si certains ossements d’enfant étaient géographiquement proches de ceux d’une femme, rien ne permet de les associer ou d’établir un lien de parenté entre eux. A noter que les perles en ivoire ont été découvertes dans la même couche gravetienne que les squelettes, au fond de l’abri. Cela évoque des sépultures gravetiennes ou magdaléniennes. Pour les préhistoriens Laurent Chiotti et Robert Nespoulet, les corps n’ont pas été enterrés, ils ont été déposés en surface, en haut du dépôt quand l’abri était presque comblé.
Art mobilier
Il y a eu de restes d’art mobilier à l’Abri Pataud. Il est à noter que les artefacts de l’abri Pataud sont assez uniques et surprenants.
Par exemple, la gravure d’un poisson sur bois de cervidé est assez rare du fait que les poissons sont très peu représentés dans l’art préhistorique. L’original de la pièce est aujourd’hui présenté au Musée d’Art et d’Archéologie de Périgueux.
Une omoplate de bovidé (scapula) a été retrouvée ornée de plusieurs séries de ponctuations à l’ocre rouge. Ce type de coloration est relativement peu reprise dans la région.
Une petite statuette a été mise au jour en 1963 dans le carré FVII de la couche 2 (Gravettien final) de l’abri Pataud. Elle mesure 7,1 cm sur 4,2 cm. Les chercheurs proposent d’ailleurs deux interprétations selon comment on la tient !
En 2008, le réexamen des matériaux retrouvés dans le niveau 5 (Gravettien ancien) a permis de découvrir une dent humaine perforée. Ce n’est pas la première de ce type sur le site, mais c’est la seule qui appartienne à l’espèce humaine. La perforation a dû permettre à l’objet d’être suspendu comme une pendeloque.
La visite continue avec le petit musée accolé à l’abri Pataud
Juste à coté de l’Abri Pataud, dans les locaux de l’ancienne ferme (construite au XVIIIeme siècle), a été aménagé le laboratoire d’études des éléments trouvés sur le site. Dans cette partie, les artefacts trouvés dans la stratigraphie sont analysés et référencés par des scientifiques.
Ssous l’abri Movius, fermé par des murs, se trouve le Musée de l’Abri Pataud, accessible à tous (75 m2). Il regroupe les pièces les plus significatives retrouvées sur le site. Plus de 2 millions de pièces différentes ont été retrouvées à l’Abri Pataud, du plus petit éclat de silex au squelette humain, en passant par des perles ou des restes d’animaux chassés dans la vallée !
A droite : bouquetin gravé sur la paroi du plafond de l’abri Movius.
Cela laisse penser que d’autres parties de l’abri étaient également décoré. La datation de la gravure l’estime du Solutréen (- 19 000 ans par l’étude des outils retrouvés au sol). Kroko pour Hominides.com
Sources
L’occupation humaine de l’abri Pataud il y a 22 000 ans. Une nouvelle fouille archéologique sur un site du Muséum, par Roland NESPOULET, Dominique HENRY-GAMBIER et Laurent CHIOTTI.)
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01006290/document
https://www.mnhn.fr/fr/collections/ensembles-collections/prehistoire/abri-pataud/statuette-feminine-animale-calcaire
Merci à Brigitte et Gilles Delluc pour l’aide dans la réalisation de cette page
L’abri Pataud en pratique…
Type | Techniques employées | Périodes | Occupation | Restes Humains |
Abris sous roche | Quelques gravures (bouquetin, vénus..) | -35 000 à -20 000 ans. | Multiples et successives : Aurignacien, Gravettien et Solutréen | 7 individus |
Dimensions | Nombre de représentations | Outils / Artefacts | ||
150 m2 | Burins grattoirs, pointes en os… Eléments de parures | |||
Localisation | Accessibilité | Date découverte | Particularités | |
Eyzies-de-Tayac | Pour amateurs et débutants (guide) | 1900 |
Visite de l’abri Pataud et son musée
Adresse
20, rue du Moyen Âge – 24620 Les Eyzies-de-Tayac
Tél. : 05 53 06 92 46
pataud@mnhn.fr
La visite
La visite guidée de l’abri avec un chercheur vous permet d’accéder au Musée de l’abri.
Horaires des visites 2023
Le site n’est pas actuellement ouvert.
Tarifs
Tarif adulte : 5 €
Tarif réduit : 3,50 €
Tarif groupe enfant et adulte (à partir de 15 pers) de 5 à 18 €, selon les activités et le programme choisis.
L’art de la préhistoire Sous la direction de Carole Fritz Comité éditorial : Michel Barbaza, Geneviève Pinçon, Gilles Tosello | |
Plus de cinquante années après la parution de Préhistoire de l’art occidental d’André Leroi-Gourhan, premier volume de leur célèbre collection « L’Art et les grandes civilisations », les éditions Citadelles & Mazenod réactualisent de manière ambitieuse, et à l’échelle mondiale, l’ensemble des connaissances sur l’un des temps de création les plus passionnants de l’humanité. Écrit par une équipe de chercheurs internationaux, l’ouvrage propose un panorama des arts de la Préhistoire de l’Europe à l’Australie, en passant par l’Asie, l’Afrique et les Amériques. Les recherches sur les sites les plus récemment étudiés y sont présentées, tels la région de la rivière Pecos, aux États-Unis d’Amérique, et Narwala Gabarnmang, en Australie. Alors que les premières manifestations graphiques apparaissent avec Homo sapiens en Afrique du Sud il y a plus de 75 000 ans, l’art figuratif émerge en Europe au début du Paléolithique supérieur, vers – 40 000. Une floraison de manifestations artistiques (objets, grottes, abri-sous-roche ornés…) ont été mises au jour dans le monde entier, avec leurs particularités régionales, mais aussi de nombreux traits communs. Ces témoignages sont un moyen unique d’aborder la pensée de sociétés sans écriture. Animaux, humains, êtres hybrides, signes, ces images peintes, gravées, piquetées, sculptées ou modelées déclinent l’identité d’hommes et de femmes, tous différents dans leur compréhension du monde et dans leur mode de vie, mais si semblables dans leur façon de le rendre tangible. Avec plus de 600 illustrations, cette vaste synthèse présente les premiers chefs-d’œuvre de l’humanité et, à l’aune des nouvelles technologies (datation, caractérisation des matières picturales, modélisation 3D…), livre des clés de compréhension sur les sources, la matérialité et le sens de la création artistique En savoir plus sur L’art de la préhistoire sous la direction de Carole Fritz |