Arc et flèche
- fabrication et utilisation au Néolithique
Les plus anciennes découvertes
Propulseur et sagaie, la fin d’une époque
En Europe, à la fin de la dernière glaciation, l’arc et la flèche supplantent la plus ancienne arme de jet à longue distance, le propulseur et la sagaie : grâce à elle, durant des millénaires, les chasseurs parcourant les steppes glaciaires avaient ramené au campement de quoi nourrir le groupe. Du fait de son poids important, la sagaie, lancée grâce au propulseur, possédait une grande force de pénétration mais la précision du tir représentait à peine le tiers des capacités de l’arc et de la flèche.
Chasse au propulseur et à la sagaie.
Dessin B. Clarys
Premiers témoignages
C’est en Europe du Nord qu’on a découvert les arcs et les flèches les plus anciens.
Les flèches en bois de pin mises au jour à Stellmoor, près de Hambourg, remontent à environ 10 000 ans avant J.-C. Les hampes étaient équipées d’une partie distale amovible et de pointes de silex acérées.
Les deux arcs en bois d’orme identifiés à Holmgard (DK) sont plus jeunes d’environ 3000 ans.
Flèche de Stellmoor (Allemagne), environ - 9 800 ans.
La fabrication
Musts néolithiques
Pratiquement tous les arcs néolithiques sont en bois d’if, essence européenne qui se révèle aujourd’hui encore la plus apte à la fabrication des
arcs. Pour les hampes de flèches, on choisissait les pousses de la viorne, extrêmement résistantes, ou celles du cornouiller.
Hache avec lame en os provenant de Locras
Photo J. Junkmanns
La valeur de l’expérience
La fabrication d’un arc exige beaucoup d’expérience. Les négatifs d’enlèvement laissés par les haches de pierre sur les ébauches d’arcs néolithiques montrent avec quelle adresse les constructeurs savaient manier leurs outils. Les arcs étaient ensuite frottés sur des plaques de grès et polis avec de la prêle jusqu’à ce que leur surface soit parfaitement lisse. Les découvertes de décors de bandes de cuir ou d’écorce, ou encore de poignées de cuir ou de ligatures, restent extrêmement rares.
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Hache en os avec gaine en bois de cerf découverte à Concise.
Photo J. Junkmanns |
Hache de pierre avec gaine en bois de cerfdécouverte à Lattrigen
Photo J. Junkmanns |
Pelote de fil.
Provenance inconnue.
Photo J. Junkmanns |
Pannes préhistoriques
Tous les arcs n’étaient pas confectionnés avec le soin requis et, lorsqu’il n’était pas tendu avec constance, l’arc pouvait se rompre. De nombreux fragments témoignent de tels incidents d’utilisation. Ces arcs ont vraisemblablement été fabriqués par des personnes ne disposant pas encore d’une expérience assez solide, ou simplement peu douées pour les travaux manuels.
La flèche : un bien précieux
Flèche avec son empennage et carquois d’Otzi. M. Egg, K. Spindler. Die Gletschermumie von Ende der Steinzeit aus den Oetztaler Alpen. Vorbericht. Jahrbuch des RGZM 39,1992.
Une flèche parfaitement droite était encore presque plus importante que l’arc lui-même, et l’on consacrait beaucoup de temps à sa fabrication. Il fallait compter au moins une heure de travail pour écorcer, polir et redresser la hampe à la chaleur de la braise. Venait ensuite la confection de la pointe, qui pouvait être en bois, en bois de cerf, en os ou en pierre, et qu’il fallait encore coller avec du brai de bouleau tout comme l’empennage, avant de fixer le tout par une surliure.
Afin d’en stabiliser le vol, les flèches étaient munies d’un empennage, équilibrées avec minutie, et leur extrémité était garnie de divers types de pointes dont le tranchant n’avait parfois rien à envier à celui d’une lame de rasoir.
Le chasseur de l’âge de la Pierre ne tirait que s’il était certain d’atteindre sa proie, afin de réduire le risque de bris ou de perte de flèches.
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Pointe de flèche en os. Sutz. Photo Service archéologique du canton de Berne |
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Flèche à bout arrondi. Egolzwil 3.
Photo J. Junkmanns. |
Flèche à bout arrondi avec manchon en bois
de cerf. La Neuville-Schaffis.
Photo J. Junkmanns. |
L'utilisation
Les pointes pour la chasse
Les types de pointes étaient adaptés à l’espèce convoitée : des pointes en bois, à extrémité
élargie, étaient utilisées pour les oiseaux et les animaux à fourrure, afin d’éviter d’en
endommager le pelage ou le plumage. Les pointes aux arrêtes vives étaient réservées à la
chasse au gros gibier.
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Flèche à bout arrondi de Holmegard (Danemark).
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Flèche de Lilla Loshult (Province de Schonen, Suède), environ 7500 av J.-C. Garnie de part et d’autre de lames de silex acérées, elle convenait bien à la chasse au gros gibier. La pointe et ses armatures sont fixées sur la hampe avec du brai de bouleau, véritable colle de l’âge de la Pierre. |
Gros gibiers et petites bêtes
Grâce à l’arc et à la flèche, l’homme préhistorique était en mesure d’abattre n’importe quel gibier rencontré. La découverte d’ossements dans la grotte du Bichon (NE) nous en rappelle toutefois les dangers. On y découvrit en effet le squelette d’une ourse brune dans lequel plusieurs flèches de silex étaient fichées. La bête eut encore assez de force pour entraîner le chasseur dans la mort. Le squelette de ce dernier gisait directement à côté d’elle.
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Localisation de l’impact et
de la pointe fichée dans la
vertèbre cervicale.
Grotte du Bichon.
Ph. Morel. Une chasse à
l’ours il y a 12 000 ans :
nouvelle découverte à la
grotte du Bichon.
Archéologie suisse 16.
1993. |
Crime et châtiment
Il n’est pas rare de découvrir, au mésolithique ou au néolithique, des squelettes humains avec des flèches fichées dans les os. Le squelette d’un individu de sexe masculin découvert à Feldmeilen (Suisse), vieux de 5600 ans, présente deux pointes de flèches en silex plantées dans les os. Il fut trouvé dans les sédiments de la rive, à l’extérieur du village. L’homme de Porsmose (Danemark), un peu plus jeune, est mort de deux pointes en os tirées dans la tête.
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Emplacement de l’impact dans l’omoplate du squelette de Feldmeilen (Suisse). Photo Musée d’Anthropologie, Université de Zurich. |
L’homme de Porsmose (Danemark) G. Burenhult. Die Menschen der Steinzeit. Illustrierte Geschichte der Menschheit. |
Jouer et s’entraîner
Les enfants entretenaient des rapports ludiques avec les armes : dès leur plus tendre enfance, ils possédaient de courts arcs-jouets et des flèches miniatures. Vers deux ou trois ans sans doute, les garçons recevaient leur premier arc, comme c’était encore la tradition chez les eskimos voilà quelques décennies.
L’arc grandissait avec ces chasseurs en herbe. Grâce à cet entraînement particulièrement précoce, les chasseurs de l’âge de Pierre devaient sans doute compter parmi eux des archers d’une habilité inégalable.
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Arc pour enfant découvert à Horgen-Scheller Photo J. Junkmanns. |
Aptitude étonnante
Haute technologie
Les armes les plus anciennes font déjà preuve d’une excellente qualité. La section de l’arc, bombée sur la face externe et plate à l’intérieur, exploitait les caractéristiques du bois de manière optimale. Des extrémités amincies augmentaient la rapidité de la flèche, et le dégagement de la poignée assurait une plus grande précision de tir.
Distance
Les flèches pouvaient certainement être tirées à plus de 150 m, mais bien évidemment, la précision en pâtissait. En se fondant sur les observations des ethnologues et les arcs modernes, on peut conclure que le chasseur préhistorique tirait généralement sa proie d’une distance de 30 mètres.
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Distances de tir. Graphique indiquant les distances atteintes par un arc préhistorique.
Graphique J. Junkmanns. |
Vitesse
Les qualités d’un instrument aussi simple que l’arc en bois n’en finissent pas de nous étonner : des mesures effectuées sur des répliques indiquent des vitesses de propulsion avoisinant les 200 km/h.
Le texte et les photos de cette page font partie du communiqué de presse de l'exposition au Musée départemental de Préhistoire de SOLUTRE-POUILLY
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