Il était une fois la paléoanthropologie
Quelques millions d'années et trente ans plus tard
Pascal Picq
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Présentation de l'éditeur
Nous vieillissons, nous mangeons mal, nous nous déchirons entre clans et communautés. Et de ces problèmes et d’une foule d’autres qui sont notre lot contemporain, nous débattons comme si l’homme avait toujours été le même, comme s’il échappait à la nature, comme s’il n’était pas né d’une longue, très longue et très chaotique évolution.
Fondé sur les développements les plus récents de la paléoanthropologie, ce livre est une surprenante tentative pour jeter un regard original sur nos questionnements d’aujourd’hui, à propos du vieillissement, de l’alimentation, du sort fait aux animaux, de la morale ou encore du développement durable.
Car cette science en pleine explosion ne nous instruit pas seulement sur nos origines et notre histoire passée. Elle nous force à nous interroger sur nous-mêmes et peut éclairer les débats de notre temps.
Auteur de grands succès comme Au commencement était l’homme et Lucy ou l’obscurantisme, Pascal Picq est maître de conférences à la chaire de paléoanthropologie et préhistoire du Collège de France.
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Paru le: 02/09/2010
Editeur : Odile Jacob
Nombre de pages : 300 pages
Poids : 335 g
Dimensions : 14,5cm x 22cm x 2,2cm
L'auteur, Pascal Picq
Pascal Picq
Paléoanthropologue au Collège de France, Pascal Picq est l'auteur à succès d’Au commencement était l’homme et de Lucy et l’obscurantisme. Il est également l'un des grands spécialistes des origines et de l’évolution des grands singes, en particulier de leurs comportements.
Biographie de Pascal Picq
Sommaire de Il était une fois la Paléoanthropologie
Trente ans d'une évolution
Un chemin vers les origines
Trente ans d'avancées prodigieuses
L'évolution de l'évolution
L'actualité de la paléoanthropologie
La paléoanthropologie et la préhistoire au présent
Un peu de bonne médecine évolutionniste
La philosophie face à l'animal et à l'évolution
Un extrait de Il était une fois la Paléoanthropologie
« On a souvent dit qu'aucun animal n'utilise d'outil ; mais le chimpanzé à l'état de nature brise un fruit indigène, ressemblant plus ou moins à une noix, avec une pierre. » L'auteur de cette phrase, tirée de La Descendance de l'homme en relation avec la sélection liée au sexe, est Charles Darwin qui cite un article de Savage et Wyman paru dans le Boston Journal of natural History de 1843. Le livre de Darwin paraît en 1871, à peine six ans après la publication par John Lubbock de Prehistoric Times en 1865 qui donne son nom à la discipline qui s'appelle depuis la préhistoire. D'ailleurs, Darwin ne manque pas de faire référence à l'ouvrage de John Lubbock tout en évoquant auparavant les observations faites par d'autres naturalistes ou explorateurs à propos des singes capucins d'Amérique du Sud, des babouins mais aussi des orangs-outans. Or, actuellement, les recherches sur les capacités cognitives des singes utilisent souvent les capucins et les babouins alors que les observations des trois dernières décennies sur les chimpanzés et les orangs-outans dans leurs habitats naturels ont mis en évidence des traditions culturelles. Les primatologues parlent dorénavant de « primatologie culturelle" », Grâce à ces avancées fondamentales de l'éthologie, la préhistoire commence avec un nouvel âge de la pierre.
Quel serait cet âge de la pierre et de quels types d'outils s'agir-il ? L'outil de pierre taillée, fabriqué intentionnellement dans le but d'effectuer une ou des tâches précises, s'est imposé comme un critère fondamental, d'autant qu'on n'a pas (encore ?) observé de grands singes fabriquant de tels outils de leur propre chef et les utiliser. (Ils le font en captivité après sollicitation et apprentissage de la part des chercheurs. À ce propos, on avait oublié que la morphologie de leur main diffère de la nôtre, notamment pour les capacités de prise avec précision, ce qui ne les empêche pas de trouver une solution de leur invention pour obtenir des éclats qui, si elle ne respecte pas l'académisme des préhistoriens, n'en n'est pas moins efficace.) On retrouve de façon bien plus précise, mais dans la nature actuelle, ce qui semble être une différence entre les grands singes et l'homme: la fabrication intentionnelle d'outils et en l'occurrence d'outils en pierre taillée. On imagine alors qu'il devrait en être de même au cours de la préhistoire. Il n'en va pas ainsi.
L'approche dénoncée par Leroi-Gourhan pose de réels problèmes puisque les origines de l'outil de pierre taillée postulent des capacités cognitives et gestuelles implicitement attachées, pour ne pas dire consubstantielles, aux premiers hommes. Donc, nul besoin d'aller chercher des prémices plus anciennes et encore mois dans les autres lignées. On rencontre la même démarche pour les origines du langage: de nombreux linguistes affirment que le langage est associé à un module spécifique du cerveau d'après Noam Chomsky, ce qui rend inutile toute recherche sur des capacités cognitives homologues chez les grands singes. Or, quand on s'aventure à questionner de telles affirmations, qui ne reposent sur aucune recherche comparative mais sur la suprême ignorance des grands singes, on découvre des caractères communs qui, comme on va le voir, ont des implications en archéologie préhistorique.
Relisons encore une fois la phrase citée de Leroi-Gourhan.
On constate qu'elle s'applique aussi bien aux fossiles qu'aux outils. Les paléoanthropologues se retrouvent encore entravés par cette idée obsolète de l'homme qui descend du singe sans se préoccuper de ce que sont ces singes et plus précisément les grands singes. Les controverses actuelles autour des origines de la lignée humaine proviennent autant des caractères étonnants des fossiles découverts récemment - Orrorin, Sahelanthropus et Ardipithecus - que de l'habitude de considérer que tout caractère reconnu chez les grands singes actuels soit archaïque tandis que tout caractère propre à l'homme est évolué. Il n'est plus du tout certain que la bipédie, pour prendre cet exemple, soit un caractère propre ou dérivé de la lignée humaine. Mais, pour s'en apercevoir, il fallait se dégager de cette conception gradualiste qui concevait les fossiles avant qu'on ne les découvre et qu'on ne les fasse entrer de force dans la normalisation de l'échelle des espèces. Il en va de même pour les outils de pierre taillée: les plus anciens sites archéologiques apparaissent bien avant les hommes au sens strict. Que ce soit pour les fossiles ou les outils, il serait grand temps que l'on comprenne que la nature d'aujourd'hui ne récapitule pas notre histoire évolutive et qu'elle ne représente que la partie la plus récente d'une histoire qui a été tout sauf linéaire. En d'autres termes, les données du passé racontent une autre histoire et il faut s'attendre à bien des surprises. L'archéologie préhistorique, en tant que science des faits a donc un statut épistémologique scientifique qui l'amène donc à la fois à consolider, préciser ou réfuter des hypothèses, voire des théories. L'apport de l'archéologie à l'histoire n'est plus à démontrer; il commence à en être ainsi en préhistoire.
Depuis presque vingt ans, un nouveau champ de l'archéologie préhistorique s'ouvre grâce à l'observation des chimpanzés. Une approche comparable à celle initiée par Leroi-Gourhan par l'observation des peuples contemporains se met en place: connaître les objets, leurs modes de fabrication, leurs usages et leurs contextes socioécologiques chez les chimpanzés et dégager...
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