Mégalithes d'ici, mégalithes d'ailleurs
Exposition Mégalithes d’ici, mégalithes d’ailleurs
Chateau-Musée de Bélesta
Pyrénées-Orientales
Avril – Décembre 2022
Si les expositions sur les dolmens et menhirs sont assez fréquentes, celle-ci se remarque par l’étendue du territoire étudié et la nouveauté des résultats de ses différentes approches. L’architecture analysée par les dernières technologies disponibles, livre quelques secrets de construction. L’apport des observations d’autres peuples encore constructeurs de dolmens, est d’un grand intérêt pour trouver des pistes d’interprétation et de compréhension de ces monuments. Des reconstitutions d’outils et de mobiliers rendent plus vivants ces témoignages de la Protohistoire.
Depuis plus de 6000 ans et dans le monde entier, de nombreuses sociétés humaines bâtissent des architectures monumentales en pierre pour y déposer leurs morts ou vénérer les vivants. Les formes variées des monuments sont les traces visibles laissées par des communautés qui s’épanouissent d’une vallée à l’autre, voire d’un continent à l’autre à des rythmes temporels différents. Pour ces communautés, l’architecture mégalithique résulte d’un choix culturel. Les archéologues s’efforcent de comprendre pour quelles motivations ces sociétés ont investi autant d’énergie et de capital dans une architecture ostentatoire. Ces dolmens et menhirs avaient-ils pour but de conjurer la peur de la mort, d’honorer les défunts ou d’impressionner les vivants?
Cette exposition présente les travaux menés par le Laboratoire d’archéologie préhistorique et anthropologie de l'université de Genève (Suisse) dans différentes zones géographiques : le bassin genevois, la Bretagne en France et le Akkar au nord du Liban. Trois zones d’intérêt pour comprendre le mégalithisme dans le monde.
Commissaires de l'exposition: Florian Cousseau; Tara Steimer
Comité scientifique: Marie Besse; Martine Piguet
Scénographie: Thomas Thibout
Les dolmens de Menjez (Liban) : pour les morts et par les vivants
Dans les années 1940, les pères jésuites ont découvert une centaine de monuments mégalithiques dans plusieurs villages du Akkar qui en ont conservé des vestiges. Les monuments restants – en excellent état de conservation – sont construits à l’aide de gros blocs de basalte, abondants dans cette partie du Liban.
À Menjez, les chambres sont circulaires, semi-circulaires ou quadrangulaires, avec un système de couverture en encorbellement. Certains monuments sont entourés par un enclos funéraire. Leur disposition topographique est sur un replat, une pente ou une rupture de pente. Dans les tombes mégalithiques levantines, les défunts étaient déposés directement sur le sol, sans préparation particulière, accompagnés de bijoux, d’objets précieux et d’offrandes.
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Proposition de restitution de la couverture des tombes de Menjez (Liban) à partir des élévations 3D © Yann Bernard.
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Reconstitution et moulages, des parures et mobiliers trouvés dans les tombes de Menjez (copies Th. Blaise à Bélesta) © château-musée de Bélesta. |
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Le mégalithisme dans le contexte de la Suisse occidentale
La transformation fonctionnelle ou morphologique d’un bloc erratique en pierre dressée est un événement relativement fréquent dans les Alpes et le Jura du Ve millénaire jusqu’à la deuxième moitié du IIIe millénaire avant J.-C. Dans cet environnement post-glaciaire, les populations du Néolithique se sont appropriées des blocs dont la nature, la forme ou la
situation topographique avait pour elles une importance particulière. Certains sont restés à leur emplacement d’origine en l’état sans que l’on puisse discerner les activités humaines qui s’y déroulèrent, d’autres au contraire ont été dressés, aménagés, sculptés voire gravés (cupules, lignes géométriques, traits humains): autant de gestes que les archéologues sont susceptibles de décrypter selon les conditions de découverte et l’état de conservation des roches. De simples blocs erratiques, ces volumes sont devenus des menhirs. Dans un second temps, un autre aspect du mégalithisme se met en place : la construction de dolmens. Les commanditaires de ces projets architecturaux de pierres levées et de dolmens sont-ils les mêmes ? |
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Menhir 1 du Pré-du-Stand en cours de fouille © LAP - UNIGE |
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Le mégalithisme dans le contexte de l’ouest de la France
Le mégalithisme de l’ouest de la France est l’un des plus connus avec les fameux alignements de menhirs à Carnac en Bretagne.
Cette région est celle qui possède les plus vieux tumulus et dolmens d’Europe. L’émergence du phénomène mégalithique en Bretagne, autour de 4500 av. J.-C., est contemporaine de l’arrivée des premiers agriculteurs, dont les ancêtres proviennent du Proche-Orient, puis de la vallée du Danube et du Bassin parisien. Le mégalithisme breton est issu de l’association des compétences dans le travail de la pierre des derniers chasseurs-cueilleurs d’Europe et de l’accumulation de richesses, ainsi que du début de hiérarchisation provenant des premiers agriculteurs. Les dolmens servent à y déposer les morts accompagnés d’offrande, mais les architectures qui les contiennent sont aussi des lieux ostentatoires du pouvoir vers les vivants. Quant aux menhirs, l’aspect cérémoniel de leur érection est évident, sans pouvoir préciser l’événement célébré.
La construction des dolmens en Bretagne s’arrête vers 2500 av. J.-C., au moment de l’arrivée du métal, tandis que des menhirs continuent à être dressés pendant encore quelque temps, durant l’âge du Bronze. |
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Dolmen de La Roche-aux-Fées, Essé, Ille-et-Vilaine © Florian Cousseau. |
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Des dolmens « modernes » en Indonésie : le déplacement des dalles à Wainyapu
En Indonésie, l’utilisation des mégalithes remonte à la période indo-bouddhiste, mais dans l’île de Sumba ce n’est qu’au contact des marchands européens au 16ème siècle que les hommes se mettent à construire des tombeaux monumentaux en l’honneur de leurs ancêtres. Le village de Wainyapu possède une carrière de calcaire où les sumbanais viennent se procurer le matériau nécessaire à la construction des tombeaux-dolmens. Le prix est fixé en fonction des dimensions du bloc. Le jour de la cérémonie, les membres de la tribu acquéreuse se réunissent pour tirer la pierre ; plus ses dimensions sont importantes et plus il faut de monde. Le chef de cérémonie se tient debout sur la pierre. C’est lui qui, sentant la pierre vibrer et glisser sous ses pieds, peut mener l’effort collectif en redoublant ses injonctions, indiquant ainsi aux hommes le moment d’intensifier leur traction sur la corde. Quand la dalle amorce un mouvement décisif, la joie explose et se manifeste par des danses frénétiques effectuées par les femmes et les hommes restés sur le côté, agitant des tissus ou des poignards. La cérémonie se termine par le sacrifice de nombreux animaux (cochons et buffles). |
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Transport de la dalle de couverture d’un dolmen à Wainyapu (île de Sumba - Indonésie) © Tara Steimer. |
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Hominides.com remercie Valérie Porra-Kuteni, chargée des expositions au Château-Musée de Bélesta pour les documents ayant permis la réalisation de cette page.
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Séminaire du Collège de France
Dans tous les pays, sur tous les continents, à différentes époques, des hommes ont gravé des roches, peint sur des parois, exprimé des idées ou des émotions. Leurs sujets d'inspiration furent variés...
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Les sociétés mégalithiques : Pouvoir des hommes, mémoire des morts
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Les sociétés mégalithiques, celles des dolmens et des menhirs, sont présentées au grand public par le professeur Alain Gallay dans une remarquable tentative d'accorder l'anthropologie, l'archéologie et l'histoire. Si l'on y trouve par exemple les sites bretons ou valaisans, parmi les hauts lieux de l'Europe du 5e au 3e millénaire av. J.-C., les cultures décrites sont situées dans une perspective planétaire. Mieux qu'un inventaire géographique et chronologique, cet ouvrage propose une analyse ethnologique des pouvoirs, usages, croyances et divisions sociales qu'implique le maniement de pierres pesantes. C'est notamment, en Europe, l'apparition des sociétés agricoles à richesses ostentatoires de la traction animale, et des lignages dominants. Dévolution des constructeurs mégalithiques est cernée en Afrique, en Asie, dans le Pacifique avec l'île de Pâques, d'une manière qui ne s'absorbe pas dans les particularités, mais fonde sur les trouvailles archéologiques des traits communs et divers scénarios. Ceux-ci éclairent les controverses fondamentales sur les origines de la propriété, de l'Etat, de l'appropriation de la richesse, des systèmes de gouvernement, de l'usage politique de la violence. |
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Les Charpentiers de la pierre : Monuments mégalithiques dans le monde
Roger Joussaume
Nombreux sont les pays du monde où les hommes ont eu l'idée à un moment de leur histoire de protéger leurs morts de manière plus ou moins collective, dans de solides tombeaux de pierre et d'élever des pierres à différentes occasions. Il n'est qu'à consulter la carte de répartition pour s'en convaincre. On a choisi dans ce livre, véritable tour du monde du mégalithisme ancien, d'apporter des éclairages nouveaux sur des points particuliers, moins connus, ou de plus grande actualité. Des recherches de plus en plus précises permettent de constater, en effet, que plus la connaissance des mégalithismes progresse dans le monde, plus leurs différences apparaissent, dans le fonctionnement funéraire des tombeaux comme dans la représentation symbolique et sociale des monuments. Mais ces recherches ne peuvent être que régionales, liées à un contexte archéologique précis, même si des rapprochements entre certains éléments culturels sont possibles. |
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Les Mégalithes : Pierres de mémoire
Jean-Pierre Mohen
Qui a érigé les mégalithes, ces monuments en grosses pierres que sont dolmens, menhirs, alignements et cromlechs ? Des géants, des diables ou des fées, comme souvent leurs noms semblent l'attester ? A quoi servaient-ils ? Lieux de culte pour les druides, autels pour les sacrifices, comme le prouveraient des ossements humains trouvés à l'intérieur des dolmens ? De fouilles en expériences, les chercheurs ont levé - en grande partie - le mystère des mégalithes. Ce sont les hommes du néolithique qui, entre le Ve et le IIe millénaire avant notre ère, ont élevé ces constructions monumentales, conçues symboliquement pour protéger les plus prestigieux de leurs morts, ou pour les évoquer. Et le culte des ancêtres légitimait leur possession du sol, tout en affirmant leur identité culturelle. Jean-Pierre Mohen retrace l'évolution de ces pierres de mémoire qui constituèrent la première architecture du monde.
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