Les premiers hommes modernes en Asie, les chercheurs contre-attaquent...
Une nouvelle étude génétique démontre que l'Asie n'a pu être colonisée par Homo sapiens avant -60 000 ans.
La nouvelle étude génétique a été publiée dans les PNAS ( Proceedings of the National Academy of Sciences). Elle réfute une théorie récemment émise à partir de preuves archéologiques de la présence de l'homme moderne en Asie du Sud, avant la super-éruption du Mont Toba, le volcan à Sumatra.
La grande éruption de Toba
Un peu d'histoire... Il y a 74 000 ans l'éruption du volcan Toba (Sumatra) a provoqué une véritable catastrophe au niveau mondial. Des cendres se sont répandues sur une épaisseur de 15 cm sur une grande partie de l'Asie du sud. Mais ce sont plus de 800 kilomètres cubes de cendres qui se sont éparpillées dans l'atmosphère, faisant chuter les températures de plus de 15° dans certaines régions du globe.
Une première étude génétique en 2005
En 2005, le professeur Martin Richards (Université de Huddersfield) effectue des recherches sur l'ADN mitochondrial des populations. L'étude permet de montrer que des hommes anatomiquement modernes (Homo sapiens) se sont dispersés à partir de l'Afrique, passant par une «route côtière du sud» de la Corne et à travers l'Arabie, il y a environ 60 000 ans, après l'éruption du Toba.
En 2007, une étude archéologique propose une autre hypothèse
Des fouilles effectuées en Inde avaient permis de trouver des outils de pierre dans la stratigraphie, sous la couche de cendre durcie. Elles estimaient que cette couche correspondait à une datation de - 120 000 ans... Pour les découvreurs, cela indiquait simplement que des hommes étaient déjà présents à cette époque, bien avant l'éruption. On en déduisait que l'homme avait donc «colonisé » cette région, bien avant l'Europe ou le Proche Orient.
En 2013, une deuxième étude génétique
Une nouvelle étude génétique dirigée par Paul Mellars (Université de Cambridge, Royaume-Uni) et Martin Richard reprend et enrichit l'étude de 2005. Cette fois-ci, pour tester que les premiers hommes ont atteint l'Asie du Sud avant l'éruption, l'équipe a analysé les échantillons d'ADN mitochondrial de 817 individus d'Asie du Sud. Ces séquences sont uniquement transmises par la ligne maternelle. Ils ont ensuite comparé avec des échantillons existants de l'Asie orientale, du Proche-Orient et d'Afrique subsaharienne. L'étude est donc basée sur un nombre beaucoup plus élevé d'individus.
"L'un des éléments que nous n'avions pas en 2005 est le grand nombre de séquence d'ADN mitochondrial venant de l'Inde" a expliqué le professeur Richards. L'équipe a donc été en mesure de faire des estimations beaucoup plus précises sur l'arrivée des hominidés en Inde.
En faisant reculer l'horloge génétique, les chercheurs ont déterminé que cette « colonisation » ne pouvait être plus ancienne que 60 000 ans en arrière, et donc après la méga éruption.
Et des précisions sur les preuves archéologiques
Paul Mellars et son équipe ont également repris l'étude des outils et artefacts décorés retrouvés sous les cendres du volcan Toba, à Jwalapuram. Ils les ont comparés avec des artefacts de pierre des deux autres régions du sous-continent asiatique et l'Afrique. Les chercheurs ont conclu que les outils enterrés avant l'éruption ne ressemblaient pas à ceux utilisés en Afrique à la même époque. Par conséquent, ils n'ont pas été taillés par des hommes modernes. Les hommes sur place avant l'éruption étaient probablement des Néandertaliens ou des membres d'une autre espèce qu'Homo sapiens.
Pour Paul Mellars "le remplacement des hommes archaïques déjà présents en Asie du Sud par des hommes modernes avec de nouvelles technologies semble analogue au remplacement des Néandertaliens par les hommes modernes en Europe et en Asie occidentale il y a - 40 000 à - 50 000 ans."
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Auteurs
Paul Mellars
Kevin C. Gori
Martin Carr
Pedro A. Soares
Martin B. Richards
C.R.
Sources :
PNAS Genetic and archaeological perspectives on the initial modern human colonization of southern Asia. PNAS, published online June 10, 2013; doi: 10.1073/pnas.1306043110
Live Science
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