Lascaux, grotte majeure ou grotte exceptionnelle ?
Conférence le Jeudi 14 juin à 18 h
Musée d'Archéologie de Nice, site de Terra Amata
Par Romain PIGEAUD
Voici plus de 70 ans, La grotte de Lascaux était révélée au monde. On croit la connaître, et pourtant elle réserve encore une part de mystère.
La grotte de Lascaux fut découverte il y a plus de 70 ans. Elle a fait l'objet de deux études majeures, par l'abbé André Glory et Norbert Aujoulat. Deux fac-similés, grandeur nature ou sous forme numérique, ainsi que de nombreuses publications scientifiques et de vulgarisation, nous l'ont rendue familière. Elle est devenue le symbole de l'art des cavernes de notre pays, et certains préhistoriens l'ont utilisée comme pivot chronologique dans leur système d'analyse. Les problèmes de pollution qu'elle subit actuellement nous inquiètent, tant cette cavité, révélée au monde lors des heures les plus sombres de notre histoire (1940), est profondément fichée dans notre cœur.
Pourtant, est-on sûr de bien la connaître ? Chaque étude apporte son lot de nouvelles découvertes, que ce soit sur son système symbolique par Denis Tauxe ou sur la nature de ses pigments, par le Centre de Recherches et de Restauration des Musées de France (C2RMF). La complexité de sa décoration et des techniques utilisées par les artistes pose question. Lascaux est une grotte exceptionnelle, comme la grotte Chauvet. Peut-on alors s'en servir pour comprendre l'art préhistorique dans son ensemble ? N'est-elle pas qu'une exception qui confirme la règle ? Le "vestiaire ruiné" (André Leroi-Gourhan) des interprétations est rempli de théories qui, basées sur Lascaux, se sont cassées les dents sur la réalité des grottes ornées.
Nous parlerons aussi d'un débat scientifique qui s'est développé depuis plusieurs années, grâce à Norbert Aujoulat, mais qui n'a pas encore atteint les médias ni le grand public. De quand date Lascaux, en effet ? Il était de tradition de la situer au Magdalénien, entre 15 000 et 17 000 ans. Selon Norbert Aujoulat, elle pourrait remonter au Solutréen, autour de 18 000 ans. Ce débat peut sembler byzantin au profane. Mais il change tout et fait figure, comme autrefois la datation de la grotte Chauvet (plus ancienne que prévue), de tremblement de terre qui fait vaciller les trop belles constructions théoriques que Lascaux a suscitées. Nous expliquerons pourquoi.
Romain Pigeaud
Docteur en Préhistoire
Chercheur associé
UMR 7194 du CNRS
Département de Préhistoire du Muséum national d'Histoire naturelle
Institut de Paléontologie Humaine, Paris
Responsable de l'étude des grottes ornées Margot (Mayenne) et Saint-Cirq (Dordogne)
Photo Lascaux Salle des taureaux : Brigitte et Gilles Delluc
|
Comment reconstituer la Préhistoire ?
Romain Pigeaud
Comment faire parler les grottes et les silex ? Les archéologues « officiels », ceux qui étudient les pyramides et les monuments romains bien visibles, sont écoutés avec respect. Les préhistoriens, eux, n’ont que quelques morceaux de métal rouillé ou des bouts d'os et de pierre à montrer… Et pourtant, ils parviennent à reconstituer notre lointain passé. Il ne s’agit pas de sorcellerie, d’imagination exaltée ou d’une œuvre de faussaire mais d’un véritable travail scientifique. Comment reconstituer la Préhistoire ? montre combien il est difficile de faire parler les archives du sol. L’ouvrage détaille les trois niveaux de recherche : la fouille, l'analyse et l'interprétation. Il présente les techniques, de plus en plus sophistiquées, et les garde-fous propres à chaque niveau. Car la Préhistoire, cette jeune science pluridisciplinaire, a l’avenir devant elle, tant la soif de comprendre notre passé est le corollaire de notre besoin de modernité. Le préhistorien ne travaille pas pour lui, mais pour les générations futures. |
|
|
|
|