Les origines de l'art
Michel Lorblanchet
Réédition 2017 de l'ouvrage de 2006
Version augmentée, modifiée avec des rajouts d'illustrations.
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Présentation de l'éditeur
« Dès le début de sa longue histoire, l'homme se présente comme un élément de la nature. À l'instar de certains oiseaux ou de certains crabes, il entreprend aussitôt la longue collecte d'un bric-à-brac de productions naturelles aux formes bizarres et colorées. Par le choix qu'il en fait, il proclame ces objets œuvres d'art et rêve d'en être l'auteur.»
Collectionneur dès ses premiers temps, l'homme deviendra ensuite créateur. C'est là une étape spirituelle inédite, spectaculaire : ce comportement d'artiste constitue l'un des caractères sélectifs favorables à l'évolution de l'espèce humaine. Dès son origine, l'homme est, dans tous les sens du terme, un Homo aestheticus. Son histoire se confond avec celle de l'art, que nous raconte ici Michel Lorblanchet, en suivant pas à pas les traces laissées par nos premiers ancêtres..
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Format : 18x11
Pagination : 192 pages avec quelques illustrations
Hominides.com
La chronique par Pedro Lima, Journaliste scientifique
Auteur de ce petit ouvrage clair et précis sur les origines connues de l'art, même si elles sont nécessairement supposées en l'absence irrémédiable de ceux qui en furent les premiers acteurs, Michel Lorblanchet fait partie des figures scientifiques incontournables dans le paysage académique de l'art pariétal paléolithique. En particulier, il a marqué de son empreinte la connaissance du sanctuaire orné de Pech-Merle, en Quercy, à travers l'étude complète et minutieuse qu'il en a menée, entre autres cavités peintes et gravées, et a synthétisé sa vision de l'art de l'âge glaciaire dans un important volume édité en 1999, intitulé, déjà, "La naissance de l'art, genèse de l'art préhistorique".
Connu pour sa prudence en matière d'hypothèses interprétatives de l'art pariétal, qu'elles soient de nature chamanique, totémique ou magique, Michel Lorblanchet livre ici un court texte, facilement abordable et agréablement écrit, qui éclaire le lecteur non pas sur le "pourquoi" d'une apparition au fil de l'évolution de la capacité des humains à créer eux-mêmes des formes et des images, mais plutôt sur son "comment". On y apprend, ou redécouvre avec plaisir, que cette "étape spirituelle inédite et spectaculaire" plonge ses racines dans une pratique bien plus ancienne, qui a fait d'Homo sapiens et d'autres espèces humaines (erectus, néandertalensis...) des collectionneurs, avisés et acharnés, d'innombrables "productions naturelles" aux formes et aux couleurs remarquables : pierres, galets, cristaux de roches, matières colorantes... Avant que, poussés par la nécessité d'obtenir des objets utiles à leur survie (bifaces, racloirs...), mais aussi motivés par la recherche de contours et de symétries toujours plus harmonieuses dans les formes qu'ils faisaient émerger de la matière essentiellement minérale, les humains n'accèdent à ce "saut qualitatif" qu'a constitué l'avènement de la création artistique à proprement parler : statuettes, plaquettes gravées et sculptées sur os et pierre, et enfin art pariétal paléolithique, avec une étape intermédiaire vraisemblable, quoique n'ayant pas laissé de traces, qu'a du constituer la pratique de la parure et de la peinture corporelles.
"Saut qualitatif", donc, que cette apparition de l'art tel quel nous le concevons de nos jours, et non rupture radicale avec les pratiques de tous les hominidés qui ont précédé l'Homo sapiens de Chauvet-Pont d'Arc ou de Lascaux, tant, comme l'écrit Michel Lorblanchet, "l'homme est artiste par nature et l'histoire de l'art commence et se confond avec celle de l'homme".... compris au sens large, c'est-à-dire apparaissant dès -2 millions d'années en Afrique, voire même avant si on inclut les espèces hominidés, Australopithèques en particulier, qui portaient en germe l'avènement du genre humain.
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Sommaire Les origines de l'art
Présentation
1 Le point de vue classique sur l'origine de l’art
Georges Bataille et le point de vue classique sur la naissance de l’art
Les contradictions de la conception traditionnelle de la « naissance de l’art »
2 Une autre approche de l'origine de l'art
Une définition de l'art
Un art de primates ?
Collectionneur des oeuvres d'art de la nature
Premières formes, premiers outils :
polyèdres, spénoïdes et bifaces
Marques et stries
La tradition des cupules
La parure
Conclusion
Un saut qualitatif et non une rupture
Notes
Glossaire
Bibliographie
Un extrait de Les origines de l'art de Michel Lorblanchet
L'art commence-t-il dans la grotte de Lascaux ?
Ébloui par la splendeur des peintures de la cavité, Georges Bataille a célébré la grotte de Lascaux en lui attribuant la place qu'elle mérite sur l'échelle des créations humaines ; il le fit sans doute mieux que les préhistoriens, qu'il jugeait «trop timides» et qui n'avaient pas su ou osé le faire. Sa sensibilité littéraire a produit quelques belles pages sur ce sujet, dont il convient de rappeler le contenu.
Pour Georges Bataille, l'art est le signe de l'hominisation ; Lascaux est le symbole du passage de l'animal à l'homme, il est «le lieu de notre naissance», parce qu'il «se situe au commencement de l'humanité accomplie»; «il est le signe sensible de notre présence dans l'univers»; «jamais avant Lascaux nous n'atteignons le reflet de cette vie intérieure dont l'art - et l'art seul - assume la communication».
Ses déclarations ont la force de la conviction : «Aucune différence n'est plus tranchée: elle oppose à l'activité utilitaire la figuration inutile de ces signes qui séduisent, qui naissent de l'émotion et s'adressent à elle [...] sentiment de présence, de claire et brûlante présence que nous donnent les chefs d'œuvre de tous les temps [...].»
L'homme de Neandertal «dont la face dut paraître plus bestiale que celle de n'importe quel homme vivant» ne produisait pas d'«œuvre d'art». Par contre l'homme de Lascaux prouve son aptitude à dépasser la tradition et à «faire œuvre d'art» : «À la lueur d'église des lampes, il excédait ce qui avait existé jusqu'alors en créant ce qui n'existait pas l'instant d'avant.»
Nous devons donc «donner à Lascaux valeur de commencement».
L'auteur Michel Lorblanchet
Michel Lorblanchet est directeur de recherche honoraire au CNRS. Spécialiste de l'art préhistorique, il a étudié sur le terrain les grottes ornées du sud de la France ainsi que l'art rupestre en Australie et en Inde.
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