Le Néandertalien de La Chapelle-aux-Saints a bien été inhumé.
De nouvelles méthodes d'analyse permettent d'étudier plus scientifiquement la découverte exceptionnelle de la sépulture d'un Néandertalien mise à jour en 1908, en France.
La découverte de la Chapelle-aux-Saints
Il y a 60 000 ans, dans une petite grotte de calcaire du centre de la France, des Néandertaliens ont creusé une tombe et déposé le corps de l'un d'entre eux pour un repos éternel. Ce sont les conclusions qui ressortent de la nouvelle analyse d'un site qui a permis d'exhumer le fameux squelette de La Chapelle-aux-Saints en 1908. Cette étude a des implications importantes sur la compréhension du comportement et les capacités cognitives de nos proches cousins d'évolution, les Néandertaliens. Elle a été publiée dans les PNAS le 16 décembre 2013.
A gauche : vue depuis le fond de la cavité
© Archéosphère, Cédric Beauval.
Pourquoi reprendre l'étude d'un gisement préhistorique aussi connu ?
Les archéologues ont longtemps débattu de la question de savoir si les Néandertaliens enterraient ou pas leurs morts. Cette pratique est en effet considérée comme un élément fondateur du comportement humain. Depuis ces dernières années, les chercheurs ont accumulé des preuves convaincantes que les Néandertaliens avaient des pratiques qu'on pourrait qualifier de modernes, telles que l'ornementation du corps (parures, peintures...) et la fabrication d'outils sophistiqués.
Par ailleurs, l'homme de Néandertal a eu ces pratiques avant que les Homo sapiens (hommes modernes) n'aient été en contact avec lui sur le même territoire. Cela suggère que les Néandertaliens ont développé ces savoir-faire et cette culture de façon indépendante, sans copier qui que se soit.
La Chapelle-aux-Saints, sépulture volontaire ou non ?
Pour les archéologues, un certain nombre de sites néandertaliens montraient que les sépultures qui s'y trouvaient étaient volontaires. Les contradicteurs indiquaient que les sites avaient été fouillés depuis longtemps (au début du siècle dernier) en utilisant des techniques aujourd'hui dépassées, et surtout insuffisantes pour prouver que Néandertal avait bien inhumé ses défunts.
A droite : la sépulture de la Chapelle-aux-Saints.
Pour cette nouvelle étude, William Rendu (Université de New York) et ses collègues sont retournés à La Chapelle-aux-Saints pour déblayer à nouveau la grotte, ainsi que 7 autres à proximité. Ils ont pu retrouver la position exacte de la fosse et découvrir de nouveaux ossements (principalement de la main et de l'épaule). Les chercheurs ont constaté un certain nombre de caractéristiques géologiques qui démontrent que la fosse a été creusée intentionnellement et qu'elle n'est pas naturelle.
Ils ont également observé que les ossements néandertaliens ne présentaient pas de traces quelconques de rongement ou de déplacement par un animal. Cela implique que le Néandertalien a été enseveli et protégé rapidement après son décès, comme dans le cas d'une inhumation volontaire. "L'existence d'une fosse creusée artificiellement et l'enterrement rapide du corps constituent des critères convaincants pour établir que cette sépulture a été faite de manière intentionnelle" conclue l'équipe dans son étude.
A gauche : la fosse à la fin des fouilles à La Chapelle-aux-Saints © Archéosphère, Cédric Beauval.
« Notre conclusion est que les Néandertaliens, dans cette partie de l'Europe, ont eu pour pratique d'enterrer leurs morts», observe Rendu. «Mais nous ne pouvons pas savoir si cette pratique faisait partie d'un rituel ou était tout simplement pragmatique. De fait, cette étude réduit fortement la distance de comportement que l'on pouvait imaginer entre eux et nous."
C.R.
L'équipe
William Rendu, Cédric Beauval, Isabelle Crevecoeur, Priscilla Bayle, Antoine Balzeau, Thierry Bismuth, Laurence Bourguignon, Géraldine Delfour, Jean-Philippe Faivre, François Lacrampe-Cuyaubère, Carlotta Tavormina, Dominique Todisco, Alain Turq, et Bruno Maureille.
Sources
Communiqué de presse du CNRS
Evidence supporting an intentional Neandertal burial at La Chapelle-aux-Saints
ScienceDaily
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