La génétique rapproche l'homme du chimpanzé... et vice-versa !
La séparation des deux espèces ne serait pas aussi ancienne que prévue...
C'est dans la revue Nature que les généticiens Davis Reich* et Eric Lander (Broad Institute of MIT and Harvard) ont publié les résultats de leurs recherches sur l'ADN d'Homo sapiens et de Pan troglodyte. Ils s'appuient pour cela sur le séquençage du génome humain établi en 2001 et de celui de l'ADN du chimpanzé en 2005.
L'étude, sans précédent, consiste à comparer l'ensemble du matériel génétique des deux espèces.
Objectif : mesurer et dater les mutations génétiques
Les différences relevées permettent de faire apparaître les mutations qu'on subi les deux lignées depuis leur séparation (phénomène de spéciation). Le rythme des mutations (supposé constant) permet de retracer l'histoire des deux espèces et surtout de dater leur séparation.
Entre l'homme et les chimpanzés on estimait jusqu'à maintenant que cette séparation s'était faite il y a 7 à 8 millions d'années (voir le dossier grands singes).
Des conclusions contreversées
Deux des conclusions publiées sont en contradiction avec les théories généralement admises :
- la première séparation aurait eu lieu il y a 10 millions d'années et les deux espèces auraient pris des orientation différentes. Puis, elles se seraient provisoirement "retrouvées" entre - 6,3 et -5,4 millions d'années et auraient donné naissance à une population hybride... avant de se séparer à nouveau... (rajeunissant ainsi la lignée humaine de 1 à 2 millions d'années)
- malgré cette dernière séparation, les ancêtres du chimpanzé (protochimpanzés) auraient continué à s'accoupler avec nos ancêtres jusqu'à -4,8 millions d'années.
Les réactions de paléonthologues
Les paléonthologues sont en total désaccord avec les conclusions de l'étude génétique, dont certains items ne "collent pas" avec des découvertes récentes de fossiles.
Ainsi, Toumaï présente certaines caractéristiques qu'on ne retrouve plus chez les chimpanzés (Patrick Vignaud). Or, daté de 7 millions d'années, l'hominidé devrait être plus proche d'un ancêtre commun au chimpanzé et à l'homme.
Pour Martin Pickford (co-découvreur d'Orrorin avec Brigitte Senut) "les conclusions de l'étude moléculaire contredisent les données morphologiques et ce n'est pas la première fois"...
"C'est une analyse extrêmement intelligente mais j'ai un problème pour imaginer ce que ce serait que d'avoir un bipède hominidé et un chimpanzé se considérant l'un l'autre comme des partenaires adaptés, sans vouloir utiliser des termes trop crus", indique Daniel Lieberman, professeur d'anthropologie biologique à Harvard
*David Reich est assistant professeur en génétique au Harvard Medical School
Photo Chimpanzé copyright Patrice Morin
Photo Toumaï copyright MPFT
Sources : Nature, BBC News et Sciences et Avenir
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