Accueil / Accueil – articles / Shanidar IV, symbole des pratiques funéraires de Néandertal ou pas…
Shanidar IV, symbole des pratiques funéraires de Néandertal ou pas…
Shanidar IV, symbole des pratiques funéraires de Néandertal ou pas…
Les fleurs découvertes sous la sépulture Shanidar IV sont elles des pratiques funéraires néandertaliennes ou le travail des abeilles ?
La grotte de Shanidar se trouve dans les montagnes du Zagros, dans la région autonome kurde d’Irak, dans une région frontalière entre l’Iran et le sud-est de la Turquie. Dans la grotte se trouve l’une des collections de restes néandertaliens associés à des pratiques funéraires controversées.
Les néandertaliens de Shanidar
Les fouilles dans la grotte de Shanidar depuis les années 1950 et 1960, ont permis de découvrir les restes fossiles de neuf néandertaliens. Quatre fossiles semblent avoir bénéficié de sépultures. Parmi elles, Shanidar 4 avait une particularité qui avait fait couler beaucoup d’encre. Sous la dépouille du néandertalien les chercheurs avaient trouvé de plus de mille unités de pollens appartenant à sept espèces précises : achillées jaunes et blanches, centaurées jaunes, muscaris bleues, séneçon jaune vif, éphédras et une espèce inconnue. Ces traces de fleurs avaient permis aux découvreurs de formuler l’hypothèse que le néandertalien avait été déposé sur un lit de fleurs il y a 50 000 ans.
La tombe aux fleurs, une des pratiques funéraires à Shanidar
A l’époque, Arlette Leroi-Gourhan, archéologue et experte en pollen, avait alors émis l’hypothèse que ces touffes de pollen étaient des anthères, les structures contenant du pollen dans les fleurs. Elle et l’archéologue Ralph Solecki ont proposé que les Néandertaliens aient déposé des fleurs lors d’une cérémonie funéraire, à peu près de la même façon que le font les humains aujourd’hui. Parmi les raisons proposées par les archéologues il y avait des raisons médicales (certaines fleurs ont des vertus curatives), des signes d’affection ou de respect pour le défunt et bien sur la preuve d’une offrande funéraire. Cela permettait d’attribuer à Néandertal des considérations spécifiques comme l’attention ou l’empathie. A cette époque c’était une véritable révolution car l’Homme de Néandertal était plutôt considéré comme un être frustre et bestial.
Une nouvelle hypothèse sur la présence de pollen
Des chercheurs de l’Université John Moores de Liverpool, de l’Université de Cambridge et de l’Université de Londres ont collaboré pour réexaminer l’une des découvertes les plus controversées du site, « l’enterrement des fleurs ». Le pollen trouvé dans une sépulture néandertalienne a déjà été supposé être la preuve d’une offrande funéraire florale. Pour les chercheurs l’origine anthropique du dépôt de fleurs n’est plus assurée : ce ne sont pas des néandertaliens qui en serait les auteurs mais des insectes…
Des abeille fouisseuses
L’étude conclut que « la présence d’amas taxonomiquement mélangés est incompatible avec les amas de pollen provenant du dépôt de fleurs entières« . Au lieu de cela, les chercheurs suggèrent qu’il est beaucoup plus probable que le pollen taxonomiquement mélangé ait été collecté et déposé par des abeilles solitaires : les espèces fouisseuses.
Les abeilles fouisseuses ont la particularité de creuser leur nid dans le sol, afin d’y pondre leurs œufs. Pendant la construction du nid les abeilles peuvent collecter plusieurs espèces de pollen floral dont elles se nourrissent. Par ailleurs ces nids sont courants dans la grotte de Shanidar, ce qui en fait un « suspect » idéal pour les amas de pollen retrouvés sous les corps néandertaliens.
Les chercheurs insistent toutefois sur le fait que même si le pollen de la grotte de Shanidar s’avère provenir de l’activité des abeilles, cela ne supprime pas la possibilité que les néandertaliens avaient des pratiques funéraires.
Sources
Shanidar et ses fleurs ? Reflections on the palynology of the Neanderthal ‘Flower Burial’ hypothesis
A lire également
2013 Le néandertalien de La Chapelle-aux-Saints a bien été inhumé
2020 Pratiques funéraires à La Ferrassie
2023 Shanidar IV, des pratiques funéraires néandertaliennes ou des abeilles fouisseuses ?
Les sciences de l’Homme et la violence collective (XIXe-XXIe siècles)
Alain Beynex