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Marsoulas grotte
La grotte aux 500 figures
La grotte des fées – Haute-Garonne – Midi-Pyrénées
Pour des questions de conservation, pas de visite de la grotte
La grotte de Marsoulas est située sur la commune éponyme, en Haute-Garonne, à 80 kilomètres au sud de Toulouse. C’est la première grotte ornée de peintures et gravures pariétales qui a été découverte à la fin du 19 ème siècle dans les Pyrénées. A cette époque, la reconnaissance d’un art préhistorique n’était pas acquise et son découvreur, le préhistorien Félix Regnault, n’est pas parvenu à convaincre ses contemporains.
D’un point de vue stylistique la grotte de Marsoulas s’inscrit dans un contexte d’art magdalénien avec une iconographie riche en chevaux, bisons et bouquetins. Plusieurs représentations et signes sont communs avec ceux des grottes ariégeoises (Le Portel, les Trois-Frères, Bedeilhac…) ou périgourdines (Combarelles, Font-de- Gaume) mais également, sur l’autre versant du massif, en Espagne, avec Altamira, El Castillo…
Plan de la grotte de Marsoulas
L’entrée de grotte de Marsoulas est ouverte sur le flanc sud d’un massif calcaire. A proximité, en bas du vallon, coule le Louin, un ruisseau de faible débit. Même si le porche d’entrée est visible, il ne peut concurrencer d’autres grottes ariégeoises et pyrénéennes comme Niaux, Bedeilhac, la Bastide, ou la Vache…
Pour pénétrer dans la cavité il faut d’abord suivre sur quelques mètres une sorte de corridor. En effet, à l’origine la grotte était plus longue mais la première partie de la voûte s’est écroulée au Paléolithique. Il ne subsiste que des restes de parois à l’air libre.
La grotte est longue au total de près de 100 mètres, et constituée d’un boyau unique assez rectiligne, de 3 mètres de large sur 4 de hauteur pour la première partie. La paroi de gauche est presque à la verticale, alors que celle de droite est fortement inclinée : elles forment un sorte de triangle avec le sol, rendant cette partie très accessible. Au bout de 27 mètres la grotte se rétrécie en hauteur et en largeur, ne permettant de progresser qu’à plat ventre… Et enfin, sur les derniers 50 mètres, l’inclinaison de la grotte s’accentue en pente vers le lit d’un ruisseau souterrain.
Fouilles de la grotte de Marsoulas
Votre voyage commence par les océans. Vous y pénétrez sans scaphandre mais la lumière bleutée et les bruitages aDe 1883 à 1884 c’est l’abbé Cau-Durban qui fouille le sol de la grotte à plusieurs reprises. L’archéologue ariégeois identifier une couche stratigraphique du Magdalénien. S’il remarque quelques marques rouges sur les parois il n’y prête que peu d’attention : à cette époque l’art pariétal n’est pas reconnu et donc pas recherché !
En 1897, c’est Félix Regnault qui découvre les ornements sur les parois, peintures et gravures.
C’est seulement le 4 août 1904 que l’ancienneté des figures pariétales est authentifiée par le préhistorien Emile Cartailhac. Ce dernier achète la grotte de Marsoulas en 1909 et commence avec l’abbé Breuil de nouvelles études. Ils produiront quelques relevés des figures pariétales mais sans véritable communication scientifique.
En 1910, la grotte est classée monument historique.
C’est le Comte Henri Begouën qui devient propriétaire du site après le décès de Cartailhac en 1921. Il organise de nouvelles fouilles avec l’archéologue James Townsend Russell dès 1931. C’est dans le talus près de l’entrée que la fameuse « conque musicale » sera découverte.
De nombreux chercheurs vont ensuite se succéder pour effectuer des fouilles ou faire des relevés des figures pariétales. Parmi les plus célèbres on peut remarquer L. Méroc, L. Michaud, A. Leroi-Gourhan, A. Plénier (qui y consacra sa thèse), D. Vialou, P. Foucher, S. Lacombe…
A partir de 1998, une nouvelle étude sur la grotte est lancée par Carole Fritz, alors chargée de recherche au CNRS. Le but principal est de répertorier l’intégralité des représentations pariétales. L’équipe cherche également à comprendre l’histoire de la grotte et à valider les datations.
Les représentations pariétales
Selon les dernières études de Carole Fritz, Mark D. Willis et Gilles Tosselo, la grotte présente plus de 500 motifs comprenant des figures animales et humaines, des signes géométriques ainsi que différentes marques. Les représentations sont au 2/3 sur la paroi de gauche et représentent une surface de 120 m2 !
Sur les 3 premiers mètres il n’y a aucun motif représenté. Pendant les 16 mètres suivant on peut trouver quelques gravures, des signes mais malheureusement également des graffitis modernes. Un premier panneau présente deux bisons et des chevaux (dont le fameux cheval broutant). A droite, quelques gravures difficiles (entre 11 et 13 mètres) : un bison acéphale, une tête de cheval et une autre de lion.
Le grand panneau peint
A 19 mètres de l’entrée, c’est une véritable mise en scène qui occupe une position centrale dans la grotte, sur plus de 7 mètres…
Un premier bison à gauche impose son immense masse rouge : il mesure 1,70 mètres de longueur et sa tête colorée en noir contraste avec le reste du corps. Le haut du dos est souligné d’orange. En examinant plus précisement (voir relevé ci-contre) on découvre la tête peinte et gravée d’un autre bison ainsi qu’un cheval gravé sous le bison, mais il orienté en sens inverse. Un bouquetin pointe également ses cornes sur le dos du grand bison rouge et noir. Déjà bien surchargé, le bison supporte encore une dizaine de traits placés verticalement les uns à côté des autres. Un petit trait horizontal semble les tenir.
Devant lui, plus à droite, un cheval semble à l’arrêt : il est de couleur rouge et noir et a été gravé. Un immense barbelé rouge sombre venant de la gauche recouvre partiellement sa croupe.
Le Bison ponctué
Face à ces 2 premiers animaux se trouve un bison, moins volumineux (1,05 m), mais qui constitue le véritable emblème de Marsoulas. Un trait de gravure noirci souligne le pourtour de l’animal. Mais c’est surtout sa robe constituée d’une multitude de points rouges qui rend cette représentation exceptionnelle. Contrastant avec les ponctuations, la face et les pattes avant sont particuièrement noires.
Un peu encore à droite, deux bisons noirs regardent vers le centre de la composition. Le premier bénéficie d’une technique d’estompage permettant de faire ressortir le relief de l’animal. Derrière lui, le dos et la tête d’un autre bison apparaissent, la robe étant formée de point noirs.
Sous les animaux du grand panneau de nombreux signes sont peints. Ce sont surtout les barbelés qui dominent visuellement mais il y a également des points, des traits, et des tectiformes. Ils sont tous peints en rouge vif et donnent une sorte de base, d’appui, aux animaux figurés dans le registre supérieur. La paroi a également été gravée de plusieurs animaux (bisons) dont certains sont extrêmement rares dans l’art pariétal : renard, chouette.
En face, sur la paroi de droite, on note quelques gravures, dont une biche, mais surtout la présence d’un grand barbelé rouge. Ensuite, pendant plusieurs mètres la paroi ne présente ni gravure, ni peinture. En revanche, à gauche, plusieurs représentations sont finement gravées et une figure humaine est identifiée.
A 27 mètres de l’entrée le passage se rétrécit sur 2 mètres pour s’élargir à nouveau. Il est impossible de marcher debout et la progression peut se faire uniquement en rampant. Plusieurs gravures profondes sont enchevêtrées sur la paroi de gauche et présentent des restes de colorant noir.
A nouveau au bout de 32 mètres, les deux parois sont ornées mais les représentations sont assez pâles et ont probablement été effacées avec le temps.
A 40 mètres de l’entrée, le sol de la grotte plonge rapidement alors que le plafond reste à la même hauteur. De nouveau à 44 mètres, il est possible de se tenir debout et progresser vers le ruisseau au fond de la grotte. Sur la paroi de droite, sur plus de 4 mètres se trouve une fresque de gravures mélangeant une majorité de bisons avec des chevaux, des anthropomorphes et des signes dont un tectiforme rouge. Une scène en particulier attire l’attention : deux bisons gravés semblent s’affronter ; peut-être une sorte de rituel pour désigner le vainqueur qui pourra s’accoupler.
Les anthropomorphes
Comme dans la majorité de l’art pariétal paléolithique, les représentations humaines de la grotte de Marsoulas sont incomplètes, grossières, caricaturales. Contrastant avec les peintures et gravures de Marsoulas, les humains ne sont pas réalistes et ont donc un traitement vraiment différent du reste de la faune.
Les signes
Les signes de la grotte de Marsoulas sont extrêmement diversifiés. On y trouve une sorte d’enyclopeéie des signes paléolithiques, comme des tectiformes, des rectangles, des grappes de lignes, des nappes de points et des tirets, des formes inversées en «T», des grilles, grandes formes de «barbelés» et groupes plus courts de marques obliques.
Découvertes dans les couches archéologiques
En 1883, l’abbé Cau-Durban fouille dans le sol de la grotte. Il trouve des charbons, des ossements d’animaux, des silexs taillés ainsi que des artefacts sculptés. Les pendeloques et pointes en bois et os de renne sont identifiés datant de l’âge du Renne. Les nouvelles techniques de datations attribuent ces artefacts au Magdadalénien.
Lors d’une précédente étude en 2015, l’inventaire des collections a permis de répertorier 127 pièces osseuses, dont une majorité d’objets décorés, ce qui s’explique par le tri qui était fait pendant les fouilles à l’époque, où l’on avait tendance à ne garder que les « plus belles pièces ». Concerant l’industrie lithique, plus de 1250 pièces ont été conservées (dont 447 supports et produits façonnés).
La conque « redécouverte » en 2021
A l’origine, le coquillage a été découvert en 1931 par H.Bégouën et J. T. Russell, à l’entrée de la grotte. La conque n’a pas été véritablement jugée exceptionnelle car pour les chercheurs de l’époque elle n’avait pas été retouchée par les paléolithiques. Sa seule particularité était d’avoir été trouvée assez loin de la côte. Ella a été décrite comme un récipient possible, « une coupe d’amour » ou une sorte de gourde naturelle…
En 2021, sortie des réserves du Musée de Toulouse, elle a été réétudiée par la préhistorienne Carole Fritz et son équipe. Il est apparu que le coquillage avait été volontairement troué et que la pointe (apex) avait été retirée. Pour les chercheurs, c’est donc probablement un instrument de musique .
Par ailleurs, les traces de colorants ponctués qui ont été découverts sur l’instrument le relient au Grand bison pontué de la grotte.
Voir et écouter : La conque, le coquillage qui produisait des sons il y a 18 000 ans à Marsoulas.
Datation de la grotte de Marsoulas
Première grotte ornée découverte dans cette région en 1897, elle recèle un art pariétal abondant et complexe et renferme des niveaux archéologiques attribués au début du Magdalénien dans les Pyrénées, datés récemment de 18 375-17 766 cal BP (charbon GifA 17257) et de 17 972-17 570 cal BP (Os Lyon 43054).
C.R.
Hominides.com remercie Carole Fritz pour l’accueil et les documents qui ont permis la réalisation de cette page.
Sources : Reconstructing Paleolithic cave art: The example of Marsoulas cave (France), Journal of Archaeological Science: Reports (2016), Fritz, C., et al., First record of the sound produced by the oldest Upper Paleolithic seashell horn C. Fritz, G. Tosello, G. Fleury, E. Kasarhérou, Ph. Walter, F. Duranthon, P. Gaillard and J. Tardieu Marsoulas – Grotte de Marsoulas – Aide à la publications Carole Fritz (2015) Marsoulas, rennaissance d’une grotte ornée – Gilles Tosselo – Carole Fritz . (2011) |
La Grotte de Marsoulas en bref…
Type | Techniques employées | Périodes | Occupation | Restes Humains |
Grotte | Peintures pariétales Gravures | Magdalénien | de – 17 500 à -18 000 ans | non |
Dimensions | Nombre de représentations | Outils / Artefacts | ||
100 mètres de longueur | 500 motifs : figures animales et humaines, signes géométriques, marques | |||
Localisation | Accessibilité | Date découverte | Particularités | |
Marsoulas Midi Pyrénées | Fermée au public | 1883 pour les fouilles au sols |
Emma Baus, Amélie Vialet
Robert Bégouën, Jean Clottes, Valérie Feruglio, Andreas Pastoors