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Fronsac – Grotte – Vieux Mareuil – Périgord – Dordogne
Fronsac – Grotte – Vieux Mareuil – Périgord – Dordogne
Des gravures principalement humaines…La grotte ornée de Fonsac à Vieux Mareuil (Dordogne)Brigitte et Gilles Delluc, Bernard Galinat, Francis Guichard, Sophie Rossy-Delluc
Cette grotte ne se visite pas
La petite grotte ornée de Fronsac (Vieux-Mareuil), au nord-ouest de la Dordogne, a un intérêt majeur en raison des thèmes de son ornementation pariétale gravée (à prédominance humaine et sémiologique), de la répartition de ses gravures (bipartition tendant à séparer les figures animales des figures féminines schématiques de profil, dites FFS) et ses analogies stylistiques et thématiques avec une petite grotte ornée voisine (La Font-Bargeix), remontant à la fin du Magdalénien.
La grotte préhistorique s’ouvre à flanc de coteau à 135 m d’altitude, en rive droite de la partie inférieure du vallon et pratiquement en face des bâtiments de Fronsac.
Situation de la grotte de Fronsac
La petite grotte de Fronsac s’ouvre à peu près à égale distance de Périgueux, au sud-est, et d’Angoulême, au nord-ouest, dans les calcaires du Crétacé du Périgord blanc, sur le flanc d’un modeste affluent de la Belle, elle-même se jetant dans la Nizonne, qui gagne la Dronne aux confins de la Dordogne et de la Charente.
La découverte de la grotte de Fronsac
En août 1983, les frères Christian et Serge Carcauzon reconnaissent deux petites cavités proches de la grosse maison de Fronsac. Ils y notent des aménagements troglodytiques et du mobilier attribué à l’âge du Fer (fusaïole fragmentée et tessons). En mars 1984, au cours d’une prospection, C. Carcauzon rencontre un jeune agriculteur qui le conduit à une autre caverne plus importante, où il jouait dans son enfance.
Cette grotte de Fronsac a été, en effet, très fréquentée par les jeunes du pays : on relève les patronymes gravés ou dessinés au crayon et au charbon de bois sur les parois et la voûte, et même plusieurs dates, dont celle de 1701.
Au début d’avril 1984, C. Carcauzon en termine l’exploration avec son épouse Christine, son frère et Dominique Mischiéri. Au cours du levé topographique de la cavité, il découvre le panneau décoré des figures féminines schématiques de profil (FFS) les plus remarquables (nos 48 et 49), dans la Galerie des Femmes. La trouvaille, quelques instants auparavant, à même le sol, d’une lame de silex par D. Mischiéri l’avait incité à regarder minutieusement les parois. La découverte du cheval acéphale dans la Galerie des Animaux par S. Carcauzon et celle des panneaux de tracés digitaux dans l’étage supérieur par D. Mischiéri confirmaient le caractère également orné de ces deux autres galeries. Au cours du mois d’avril et du début de mai 1984, plusieurs séances d’exploration réunissent sur place les spéléologues qui complètent leurs investigations.
Le 13 mai, C. Carcauzon demande à Brigitte et Gilles Delluc, de retour d’un voyage hors de Dordogne, de venir étudier la cavité. Le jour même, ces derniers informent le directeur des Antiquités préhistoriques d’Aquitaine 5 et, le lendemain, le propriétaire 6.
Le spéléologue C. Carcauzon a fourni une première description de la grotte et des principales gravures, avec un plan sommaire (Carcauzon, 1984b). Notre principale étude a été réalisée en 1985, suivant l’autorisation de relevés d’art rupestre préhistorique, avec l’aide de B. Galinat et S. Rossy-Delluc, pour l’obtention d’une topographie rigoureuse (plan et sections), l’inventaire et l’analyse des diverses gravures. Une présentation préliminaire a été effectuée par B. et G. Delluc au Séminaire du Musée de l’Homme (séance du 28 février 1985) et au XXIIIe Congrès préhistorique de France en 1989 et un inventaire résumé publié dans les actes parus avec retard (Delluc, 1996). Notre étude a été complétée par des observations, notamment géologiques, de Francis Guichard, et, lors de visites effectuées dans les années suivant la découverte avec divers collègues8.
Descriptif de la cavité
C’est une petite résurgence d’un réseau fossile de drainage local, aujourd’hui très sec, creusé aux dépens d’une succession de diaclases parallèles, très voisines les unes des autres et recoupées obliquement. Elle présente 2 galeries superposées communiquant entre elles par deux étroites cheminées (a) et (b), correspondant à des élargissements superposés d’une même diaclase. L’étage inférieur (Galerie d’accès, Salle, Galeries des Animaux et des Femmes), le plus long et le moins exigu, est orné de gravures. L’étage supérieur (Galerie supérieure), sans ouverture vers l’extérieur, est décoré seulement de tracés digitaux et d’un signe gravé.
On peut reconstituer l’évolution très classique de ce réseau souterrain d’une manière schématique :
1 – établissement d’un collecteur par réunion de drains mineurs (Galerie supérieure) ;
2 – enfouissement du cours d’eau souterrain suivant l’axe des diaclases (Galeries inférieures ornées) ;
3 – alternance de comblement (alluvionnaire et dépôts calcitiques, liés à un amoindrissement du débit) et de phases de surcreusement du remplissage (comme en témoigne la brèche ossifère), à l’occasion de la mise en place d’un régime hydrique soutenu ;
4 – la circulation hypogée empruntera, par la suite, le large joint serpentant à la base du méandre inférieur.
La Galerie des Animaux pourrait être un drain, au détriment du porche actuel, vers un exutoire aujourd’hui disparu. Le système se fossilisera enfin peu à peu du fait d’un nouvel enfouissement du ruisseau, survenant en amont. Les chasseurs magdaléniens ont donc connu une grotte peu différente de celle que nous venons de décrire. La seule modification est le remplissage sableux remanié par les animaux fouisseurs (Carcauzon, 1984 ; Delluc, 1991).
L’auvent du Porche d’entrée, orienté au sud, oblige le visiteur à se courber (l = 3,50 m ; h = 1 m environ). Il conserve, sur sa paroi gauche, des vestiges d’aménagements troglodytiques d’âge historique (banquette, feuillure, « virgules » de barrage, conduit de fumée élargissant le haut de la diaclase), car il a toujours constitué un bien commode site d’observation et de surveillance de la vallée. À l’époque préhistorique, il devait se prolonger de quelques mètres de plus, comme en témoignent les gros blocs effondrés, sur le côté droit, qui obstruent partiellement le passage, dont un bloc (70 cm x 30 cm x 25 cm), détaché de la partie droite du linteau au terme du rude hiver 1984-85. Le sol est terreux avec de nombreux débris végétaux. Les parois, recouvertes d’un enduit végétal feutré et moussu, lépreux, perdent peu à peu leur couche superficielle de calcin.
Les gravures de la grotte de Fronsac
Comme d’habitude, nous fournissons, pour chaque oeuvre pariétale, un relevé traditionnel, dit « synthétique » et, si besoin, un relevé « analytique », qui présente les particularités technologiques des surfaces et des traits gravés ou sculptés (Delluc et al., 1986). Ce relevé, obtenu en trois temps (relevé à vue sur place et mensurations, relevé par projection de diapositive sur le plan de travail, contrôle sur place) permet de faire l’économie d’un long texte descriptif. Les conventions graphiques utilisées ici sont présentées sous forme d’un tableau.
Dans le calcaire crayeux, très coquilleux, de Fronsac, les incisions des traits sont rarement franches et présentent des irrégularités liées à la présence des multiples inclusions.
La décoration de cette grotte (riche mais miniaturisée : 83 unités graphiques) se décompose en 5 zones : la Galerie d’entrée (1 signe en grille) ; la Salle (1 cervidé incomplet) ; la Galerie des Animaux (1 bison, 4 chevaux complets ou non, 1 Figure Féminine Simplifiée (FFS), 1 signe en grille, 2 vulves, 1 phallus et divers traits souvent à disposition palissadique) ; la Galerie des Femmes (16 FFS, 2 vulves, 1 cheval, 1 phallus, 1 bovin, 1 bison incomplet, 1 humain, 2 mains) ; la Galerie supérieure (2 panneaux de tracés digitaux et 1 signe).
La galerie d’accès
La Galerie d’accès, sinueuse, se dirige vers le nord-est (fig. 3 et 6 section A). Elle contraint le visiteur à baisser la tête. Cette galerie, très sèche et longue d’une vingtaine de mètres pour une largeur oscillant de 2,50 à 3,50 m est d’un parcours aisé bien que n’excédant guère 1,50 à 2 m de hauteur.
Salle
Une diaclase transversale vient barrer la Galerie d’accès au niveau d’un élargissement local formant la Salle. D’orientation nord-ouest sud-est, elle emprunte une fente de décompression élargie par l’eau de drainage et se développe de part et d’autre du conduit d’entrée.
Galerie des animaux
Côté sud de la Salle, la diaclase est prolongée par la Galerie des animaux, sensiblement plus large mais plus fortement ensablée par le remplissage. Cette extension de 8 m de longueur constitue l’aval actuellement pénétrable du réseau. Sous les sédiments accumulés, la diaclase doit s’orienter vers un exutoire originel maintenant comblé et dissimulé par les matériaux cryoclastiques qui recouvrent les pentes du coteau. Du fait de ce comblement, les eaux ont ultérieurement dû s’orienter vers d’autres fissures qui, élargies et d’un parcours plus court et plus aisé, ont dégagé la Galerie d’accès qu’on emprunte de nos jours.
Galerie des Animaux. Paroi droite. Schéma de mise en place des gravures n°s 16 à 21. 16 signe falciforme barbelé17 signe en grille 18 Série de traits verticaux 19 Figure féminine simplifiée 20 Long trait 21 Cheval acéphale 22 Croupe et queue de cheval semblable au cheval 21
Galerie des femmes
Le segment initial de la Galerie des Femmes est, sur le plan, en baïonnette ; il est étroit (l = 50 cm), mais permet la station debout. La seule décoration est le tracé rectangulaire. Plus loin, la galerie devient parfaitement rectiligne sur presque 20 m, d’abord assez basse de plafond (1,50 m), puis plus haute (2 m). Son aspect en coupe est celui d’un trou de serrure : les gravures, en majorité, ont été exécutées sur la paroi blanche et tendre de la partie supérieure, au-dessus du rétrécissement irrégulier et argileux, lié à une couche plus résistante de la roche encaissante, formant, dans toute la galerie, comme une « main courante » en relief longitudinal
La partie moyenne de la galerie des Femmes est très étroite et oblige à progresser en rampant. Elle recèle un groupement thématique exceptionnel de gravures. Les figures 66 à 69 sont isolées et regroupées dans un endroit presque inaccessible : elles sont gravées au niveau d’un très léger écartement des parois rocheuses permettant seulement la station à genoux : sur la paroi gauche, une figure féminine schématique n° 64 ; sur la paroi droite, un phallus n° 68 et une vulve n° 69.
Paroi gauche. FFS n° 64 : a, photo ; b, relevé synthétique.
La galerie des femmes s’élargit un peu dans sa partie terminale. Sa décoration est mal conservée. Parmi les gravures les plus lisibles : sur la paroi gauche, deux bovins n° 74 et 75 ; sur la paroi droite, une figure féminine schématique atypique n° 81.
La grotte de Fronsac, située au nord-ouest de la Dordogne, presque aux confins de la Charente, revêt un intérêt très exceptionnel pour 3 raisons inhabituelles : 1 – les caractères de son ornementation à la fois miniaturisée, schématique et à thématique humaine dominante ; 2 – la bipartition des unités graphiques tendant à séparer les animaux d’une part et les figures féminines schématiques d’autre part ; 3 – l’attribution probable de ce décor pariétal à un Magdalénien avancé.
La répartition topographique de ces unités graphiques est originale. La Galerie d’accès et la première Salle ne présentent qu’un seul signe (en grille), une tête animale et quelques traits. La Galerie des Animaux est décorée de 13 animaux (dont 3 complets) contre une seule FFS de profil, avec 2 vulves, 1 phallus, 2 signes, 5 séries de traits sub-verticaux plus ou moins parallèles (dont 2 séries de cannelures inattendues) et quelques traits ou tracés indéterminés. En revanche les parois de la Galerie des Femmes portent 19 FFS de profil (dont 11 complètes), 2 vulves, 1 phallus, 1 tête humaine de profil, 2 mains schématiques, contre seulement 4 animaux (dont 2 complets), 1 signe, 6 séries de traits sub-verticaux (dont 1 série de cannelures) et quelques traits ou tracés indéterminés. Enfin la Galerie supérieure, très difficile d’accès, est ornée seulement par les panneaux de tracés digitaux et un seul petit signe gravé, mais ici la nature, poudreuse et friable, de l’épiderme calcaire a certainement suscité ce type de manifestations graphiques. Cette bipartition thématique explique le nom donné aux deux galeries : Galerie des Animaux et Galerie des Femmes.
Extraits
Sources : B. et G. Delluc, avec la collaboration de B. Galinat, F. Guichard et S. Rossy-Delluc, 2013. »La grotte ornée de Fronsac à Vieux-Mareuil (Dordogne) », Préhistoire du Sud-Ouest, n° 21/2013-2, p. 119-170, 91 fig. Photos et relevés copyright Brigitte et Gilles Delluc |
La Grotte de Fronsac en bref…
Type | Techniques employées | Périodes | Occupation | Restes Humains |
Grotte ornée | Gravures | Magdalénien | Non | |
Dimensions | Nombre de représentations | Outils / Artefacts | ||
83 unités graphiques | Non | |||
Localisation | Accessibilité | Date découverte | Particularités | |
Vieux Mareuil | Ne se visite pas | 1983 | Pas de découverte dans le sol |
Les représentations humaines pariétale – Art paléolithique en Périgord
Brigitte et Gilles Delluc
Les représentations humaines pariétales en Périgord
anthropomorphes
têtes