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Dmanissi, un gisement préhistorique unique
Dmanissi – Géorgie
Un morceau de l’histoire de l’humanité figé il y a 1,8 million d’années.
Le site de Dmanissi est situé dans le Caucase (République de Géorgie), à 85 km au sud-ouest de la ville de Tbilissi et à 1000 mètres d’altitude. Le gisement se trouve sous les ruines d’une ville médiévale, sur un éperon rocheux de presque 100 mètres de haut. Les coulées de lave à l’origine de cette avancée sont parfaitement datées ; c’est ce qui rend le site de Dmanisi incontournable et presque révolutionnaire.
Les découvertes et les fouilles
Depuis 1936 des fouilles étaient organisées à Dmanissi car le site présentait les restes d’une occupation à l’âge du Bronze mais également les ruines d’une ville médiévale importante (sur la Route de la Soie). C’est dans les anciens puits de stockage des grains de cette ville qu’en 1983 les archéologues (avec le paléontologue Abesalom Vekua) mettent à jour les restes d’animaux dont une dent de rhinocéros Dicerorhinus etruscus etruscus qui permet immédiatement de dater la couche archéologique du Pléistocène inférieur. Les fouilles continuent et, en 1984, des outils de pierre sont mis au jour, preuves d’une occupation humaine très ancienne.
En 1991 la découverte des premiers ossements d’homininés (une mandibule) montre l’importance du site et enrichit de nouvelles données l’évolution humaine. En 1999 deux nouveaux crânes humains sont extraits du gisement. Jusqu’en 2013 les découvertes se multiplient et c’est maintenant 5 crânes d’homininés différents qui ont été mis à jour à Dmanissi.
Les outils retrouvés à Dmanisi
Au total le gisement de Dmanissi a délivré plus de 8 000 artefacts de pierre. Les industries lithiques sont présentes dans l’ensemble des couches préhistoriques (mais toutefois plus fortement dans la strate B). Les hommes ont utilisé plus de 40 matières différentes pour tailler les outils (cailloux, galets, roches, prélevés à proximité). L’objectif premier des « ouvriers » de Dmanissi a manifestement été d’obtenir des outils avec un bord tranchant pour la découpe.
L’industrie lithique de Dmanissi présente de nombreuses similitudes avec celle des sites oldowayens d’Afrique et d’Eurasie mais avec la spécificité d’avoir utilisé des matières différentes et multiples.
Sur le site de Dmanissi, comme dans la plupart des sites à industries lithiques archaïques (africaines ou européennes), les produits bruts de débitage (éclats, débris et nucléus) constituent la majorité de l’assemblage. En revanche, l’ensemble se caractérise par une forte proportion de galets aménagés par rapport aux nucléus. Sur le site de Dmanissi, comme dans d’autres sites européens et africains à industries archaïques, les galets aménagés et les nucléus sont difficiles à distinguer les uns des autres.
Les restes humains
Les restes humains de Dmanissi sont exceptionnels à plusieurs niveaux.
Tout d’abord ils sont là où on ne les attendait pas ! En effet, avant leur découverte les scientifiques n’avaient jamais trouvé de restes humains autant à l’est en Eurasie et aussi anciens. Datés de -1,8 million d’années ces restes humains démontrent tout simplement que les premières sorties d’Afrique des hominidés sont beaucoup plus anciennes qu’imaginées auparavant.
Par ailleurs, les restes retrouvés sont extrêmement différents les uns des autres. En particulier l’étude du « cinquième crâne » en 2013 a jeté un pavé dans la mare. Ses caractéristiques morphologiques sont très différentes de ses congénères et démontrent que la variabilité de l’espèce était très importante à l’époque.
Pour finir, les restes des cinq individus sont particulièrement bien conservés. Il est déjà rare de retrouver un squelette d’hominidé complet, alors cinq d’âge différents sur le même site, c’est une grande chance pour les anthropologues. Au total nous avons donc deux adultes, un « vieillard » en grande partie édenté, un pré adulte et un adolescent.
Zoom sur Skull 5
Le crâne Skull 5 est un assemblage de caractéristiques d’autant plus étonnantes qu’elles n’ont jamais été observées ensemble sur un fossile d’Homo, jusqu’à maintenant :
Une face tout en longueur, similaire aux Homo erectus récents, des dents épaisses comparables à celles d’Homo rudolfensis et un petit cerveau (la boîte crânienne est de seulement 546 cm3) proche d’Homo habilis…
Image Université de Zurich / Science / National Geographic.
Homo georgicus
Appelés Homo georgicus, les hominidés de Dmanissi n’étaient pas non plus les grands conquérants qu’on peut imaginer. Ils mesuraient environ 1,5 mètre, pesaient maximum 50 kilos et avaient un volume cérébral de seulement 600 à 770 cm3 (soit deux fois moins que celui d’Homo sapiens). Ils étaient pourvus d’une forte mâchoire archaïque indiquant qu’ils consommaient des aliments végétaux fibreux et de la viande crue.
Il y a 1,8 millions d’années les hominidés s’occupaient particulièrement bien de leurs congénères… Pour David Lordkipanidze, …l’un des crânes que nous avons retrouvés, associé à une mandibule, appartenait à un individu qui avait vécu plusieurs années sans dents, sauf une canine. C’est ce que montre la résorption de la plupart des alvéoles dentaires dans la mâchoire. Il est clair que cet individu n’aurait pas survécu sans l’aide de ses congénères. Ceux-ci lui laissaient sans doute consommer les parties les plus molles des animaux, telles que la moelle ou la cervelle. Ils l’aidaient aussi peut-être en partageant avec lui ou avec elle de la nourriture déjà mastiquée (La recherche, 2008).
«Nous estimons… que les fossiles de Dmanissi étaient des Homo erectus, conclut Christoph Zollikofer. Et que les différences morphologiques entre les fossiles datés autour de 1,8 million d’années, d’Afrique ou d’ailleurs, reflètent aussi des variations internes aux Homo erectus.»
A droite : reconstitution d’Homo georgicus par les ateliers Elisabeth Daynès – présenté lors de l’exposition De Homo georgicus à Ötzi, l’homme des glaces. @ Musée de Préhistoire des Gorges du Verdon.
Pour David Lordkipanidze « les différences anatomiques évidentes entre les spécimens de Dmanissi ne suffisent pas à les classer dans plus d’une espèce. Qu’il s’agisse d’Homo habilis, d’Homo erectus, d’Homo ergaster, ou encore d’Homo georgicus, ces différences nous révèlent plutôt l’étendue de la variabilité au sein d’une population d’Homo archaïques ».
Dmanissi il y a 1,8 millions d’années
Les découvertes archéologiques ont permis de reconstruire l’environnement de Dmanissi il y a 1,.8 millions d’années. Les pollens et spores exhumés montrent un environnement en mosaïque mélangeant des steppes ouvertes (dominées par les graminées) et des forêts (chênes, charmes, noisetiers) indiquant un climat de type méditerranéen modérément sec. Avec une étendue d’eau (lac ou étang) le biotope attirait une faune riche et variée : on a ainsi retrouvé des restes de mammouths Mammuthus meridionalis, de chevaux Equus stenonis, de rhinocéros Stephanorhinus etruscus, d’autruches Struthio dmanisensis de daims Eucladoceros senezensis, gerbilles, hamsters… Les prédateurs comme les hyènes Pachycrocuta perrieri ou les tigres à dents de sabre Megantereon megantereon étaient bien sur présents également.
C.R.
Sources
Georgian National Museum
Le gisement de Dmanissi en bref…
Type | Techniques employées | Périodes | Occupation | Restes Humains |
Gisements | Outillage lithique | Paléolithique | Différentes occupations depuis 1,8 millions d’années | Homo georgicus ? Homo erectus ? |
Dimensions | Nombre de représentations | Outils / Artefacts | ||
– | Choppers, chopping-tools type Oldowayen | |||
Localisation | Accessibilité | Date découverte | Particularités | |
Géorgie | Pour passionnas | 1983 |
Visite du musée à proximité du gisement.
La visite
Vous pouvez visiter le Museum attendant au site
Horaires des visites
de 10 h à 17h
Jours d’ouverture
Du mardi au dimanche (fermé le lundi et les jours fériés)
Tarifs
Adultes de 3 à 5 GEL
Moins de 18 ans 0,5 GEL
Moins de 6 ans : gratuit
Amis du Museum : gratuit
Visites guidées.
Il est possible de réserver des visites guidées en anglais, géorgien, allemand et russe
Renseignements :
E-mail : info@museum.ge
Tel+ (995 32) 299 80 22
Fax +(995 32) 298 21 33
Site officiel du Musée
En lire plus sur l’évolutions des hominidés