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Matières d’art
Matière d’Art
Sous la direction de Lucette Mons, Stéphane Pean et Romain Pigeaud
Représentations préhistoriques et supports osseux relations et contraintes.
Comment l’homme préhistorique s’est servi des matières dures animales pour composer ses oeuvres d’art.
Cet ouvrage est le fruit de la collaboration d’un groupe de préhistoriens de plusieurs champs disciplinaires. Il est parti d’un constat : celui d’une certaine hétérogénéité des travaux portant sur l’art mobilier ; et d’une ambition : celle de parvenir à une première synthèse sur l’utilisation des matières dures d’origine animale comme supports des représentations préhistoriques.
L’étude de la matière (os, dent ou bois de cervidé) a été privilégiée pour, d’une part, répondre aux questions de son approvisionnement et des problèmes techniques qu’elle a pu poser à l’artiste dans la conception des pièces d’art mobilier et, d’autre part, mettre en évidence les solutions que celui-ci a choisies.
Nous proposons, au travers de ce cahier, d’étudier différents types d’objets gravés et sculptés en matières dures d’origine animale, trouvés dans les sites préhistoriques. L’objectif est de traiter d’un problème qui se pose aux préhistoriens depuis la reconnaissance de l’art mobilier paléolithique, en 1869, mais qui n’a jamais vraiment été formulé de façon claire : quels sont les rapports qu’entretiennent les représentations avec leur support ? Dans quelle mesure l’artiste est-il lié au matériau qu’il s’est choisi pour réaliser son oeuvre ? Sont pris en compte aussi bien le matériau travaillé que la technique utilisée, le savoir-faire artistique et le comportement symbolique.
Collection Archéologie Aujourd’hui
272 pages
Reliure : Broché
Format : 21 x 29,7
+ un CD d’iconographie paléolithique réalisé par Eva David
Hominidés.com
Un sujet rare et pourtant qui pose question. Quand on voit le propulseur du Mas d’Azil en forme de faon, on est obligé de se demander pour quelle raison se trouve cet animal sur ce support… La question est de savoir si c’est la forme du support qui a amené l’artiste à choisir cet animal ou s’il cherchait un support pour faire un faon.
Le CD-ROM joint contient une sélection d’images superbes d’art mobilier qui complète avantageusement l’ouvrage.
Une belle étude sur l’art mobilier qui n’est pas souvent à l’honneur dans les livres sur l’art préhistorique.
Pour passionnés et chercheurs.
C.R.
Les auteurs
Romain Pigeaud, archéologue, docteur en art préhistorique, est spécialiste des grottes ornées françaises. Il est chercheur associé à l’UMR 6566 « CReAAH » du CNRS de Rennes.
Stéphane Pean est maitre de conférence UMR 7194 HNHP – NOMADE
Sommaire de « Matières d’art »
Sommaire
In mémorium André Rigaud (1937-2010)
Avant-propos
I Méthodes
Eléments de détermination des matières dures d’origine animale, supports d’art mobilier
S. Pean et C. Vercoutère
Cadrages : inscription de la représentation dans les limites physiques du support
R. Pigeaud et L. Mons
Modèle d’analyse
R. Pigeaud, S. Pean et L. Mons
II Supports
Bois de cervidés
R. Pigeaud et C. Vercoutère
Dents
F.-X Chuvière
Os crâniens et mandibulaires
M. Laznickova-Galetova et S. Pean
Stylohyoïde
P. Cattelain et C. Bellier
Côtes
C. San Jaun-Foucher et C. Vercoutère
Scapula / Omoplates
L.Mons et S. Pean
Os de l’autopode
E. David, L. Filippi et C. Dufayet
Os longs d’oiseaux
L. Mons et R. Pigeaud
III Conclusion
De la matière osseuse à l’art mobilier préhistorique : bilan et éléments de réflexion
S. Pean et R. Pigeaud
Bibliographie générale
Supplément cd « Iconographie paléolithique »
E. David
Adresses des auteurs
Un extrait du livre « Matières d’art »
Avant-propos
« Dans tous les cas, le matériau utilisé, certainement choisi au départ en fonction de l’œuvre envisagée, conditionne par ses composants et sa morphologie le style, les techniques de préparation et d’élaboration et même parfois le genre de l’œuvre. » (Del porte et Mons, 1977)
Lucette Mons (1924-2013) est à l’origine du projet du cahier « Matières d’art ». Ses nombreux travaux ont mis en évidence, depuis sa première participation à la Commission de nomenclature sur l’industrie de l’os préhistorique en 1976, la relation entre le support et l’art mobilier. Les auteurs du cahier et les membres de la commission s’associent pour lui témoigner leur reconnaissance et lui rendre hommage.
Nous proposons, au travers de ce cahier, d’étudier différents types d’objets gravés et sculptés en matières dures d’origine animale, trouvés dans les sites paléolithiques. Lobjectif n’est ni de se livrer à une étude technologique (traitée dans d’autres cahiers), ni à une analyse des composantes esthétiques des objets. Il s’agit de traiter d’un problème qui se pose aux préhistoriens depuis la reconnaissance de l’art mobilier paléolithique, en 1869, mais qui n’a jamais vraiment été formulé de façon claire: quels sont les rapports qu’entretiennent les représentations avec leur support? Dans quelle mesure l’artiste est-il lié au matériau qu’il s’est choisi pour réaliser son œuvre ? Quatre éléments sont à prendre en compte (Delporte, 1976, 1977 et 1990a ; Delporte et Mons, 1976) :
1. Le matériau travaillé: les différentes matières dures d’origine animale possèdent leur structure et leur morphologie propres et ne peuvent se travailler de la même manière. La forme d’origine peut également influer sur la technique employée (gravure, sculpture) ou le thème choisi (tête animale dans le cas d’un os hyoïde).
2. La techniques utilisée: la sculpture et la gravure réclament un modus operandi particulier, auquel tous les matériaux ne sont pas forcément adaptés.
3. Le savoir-faire artistique, qui est le paramètre le plus sujet aux a priori: lorsqu’une gravure ou une sculpture nous semblent frustes, est-ce un choix délibéré de l’auteur, un style revendiqué, ou bien le résultat d’une maladresse, voire d’un manque de talent ?
4. Le comportement symbolique: pourquoi choisir ce matériau plutôt qu’un autre ? Pourquoi sélectionner cette technique de réalisation ? Qu’est-ce qui a guidé le choix du thème représenté ? Peut-on par exemple imaginer qu’un os de cheval appelle forcément une gravure d’équidé?
Le problème qui se pose est donc de formaliser les rapports entre ces quatre paramètres et d’élaborer une méthode reproductible simple et objective qui permette, à travers un langage commun, d’aboutir à la construction d’un discours scientifique sur cet aspect de l’art paléolithique: le moment où une étroite corrélation s’établit entre le type de support, sa forme, ses qualités intrinsèques et les sculptures et gravures réalisées.
Deux écueils sont à éviter: la tautologie et les arguments circulaires.
C’est-à-dire qu’il faut d’abord se garder d’accorder trop d’importance à des faits banals comme, par exemple, le positionnement des représentations dans l’axe principal de l’objet travaillé. Ensuite, il faut chercher à dépasser la simple description analytique et proposer des interprétations en termes de choix techniques et symboliques.
D’autre part, nous devons aussi prendre en compte la qualité de l’échantillon que nous avons à disposition: bien souvent issu de fouilles anciennes, il manque d’un contexte stratigraphique clair; de plus, il est souvent fragmentaire. Dans quelle mesure la conclusion à laquelle nous pouvons aboutir resterait-elle valable si nous avions eu connaissance de la pièce entière ? Enfin, nous sommes aussi tributaires des publications, qui ne s’intéressent pas toujours à l’identification anatomique précise de la pièce décorée.
Comme l’avait déjà noté Henri Delporte (1976), ce qui nous a servi de fil directeur, c’est d’abord le support intrinsèque en matières dures d’origine animale (Mons et Kandel, 2002), et donc le volume ou la surface utilisable qu’il met à la disposition de l’artiste. Puis l’étendue de la figuration sur le support. Dans leur classification des différents types de supports, Henri Delporte et Lucette Mons (1977) avaient distingué les supports plats, les supports cylindriques et les supports massifs. Nous avons souhaité approfondir cette classification et essayer de définir, pour chaque type de matière première, quels étaient les surfaces et les volumes utilisables. Par exemple, une scapula offre deux supports différents: cylindrique, au niveau du col; plat, au niveau de l’aile. Puis nous avons effectué l’inventaire des thèmes iconographiques et de leur positionnement sur ces objets. Il ne s’agit pas, bien sûr, de faire l’inventaire exhaustif de toutes les pièces connues et répertoriées dans l’art préhistorique pour chaque cas traité, mais de produire un classement type, qui puisse servir à chaque spécialiste pour uniformiser le vocabulaire descriptif
Une fois achevé ce travail de typologie et de classification, nous avons testé notre méthode sur une collection ou une série d’objets bien déterminés, au contexte stratigraphique connu, afin de déterminer si nous pouvons aller plus loin dans l’interprétation et établir des rapprochements porteurs d’un sens anthropologique: par exemple, si un site privilégie la représentation du cheval sur bois de cervidé, cela peut-il s’expliquer par l’analyse de la faune chassée?
Un autre élément à préciser dans le corpus est le degré de transformation et/ou de préparation de ce support: nul, partiel ou intégral? Est-il encore reconnaissable ou bien fut-il scié, sculpté de façon à ce que sa position d’origine ne soit plus identifiable?
Quels objets sélectionner pour l’analyse? Les harpons, les sagaies et les éléments de parure ont déjà été traités dans d’autres cahiers. Nous nous y référons constamment et n’en parlons que pour évoquer des objets retrouvés ou publiés après la date de parution des ouvrages en question et réactualiser certaines données (par exemple, pour les contours découpés).
En termes chronologique et géographique, les pièces considérées proviennent essentiellement de contextes paléolithiques et de quelques exemples mésolithiques, principalement de sites européens.
Nous avons choisi de traiter en priorité les objets non utilitaires, mais également certains objets dits de prestige ou en tout cas d’usage prolongé, comme les bâtons percés, les propulseurs et les spatules. C’est-à-dire, les objets pour lesquels l’investissement en termes de décor ou de représentation, est important.