La tyrannie du cerveau

La tyrannie du cerveau
Jean-Jacques Hublin
Un nouveau récit de l’évolution humaine

Robert Laffont
Champs- Sciences
320 pages – 21,5 x 13,7 cm

Hominidés.com

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C.R.

L’auteur de « La tyrannie du cerveau »

Jean-Jacques Hublin est paléoanthropologue, professeur au Collège de France, titulaire de la chaire de paléoanthropologie précédemment tenue par Yves Coppens. Chercheur de premier plan, ses découvertes ont modifié notre compréhension de l’histoire de notre espèce. Ce grand scientifique est régulièrement invité dans les médias. En novembre 2023, il s’est vu décerner le prestigieux prix Balzan pour sa découverte du plus ancien Homo Sapiens en Afrique et pour la qualité de ses enseignements.
Il est l’un des auteurs de Aux origines de l’humanité, dirigé par Yves Coppens et Pascal Picq (2 volumes, Fayard, 2001) et il a notamment publié Quand d’autres humains peuplaient la terre (2011) et Homo sapiens, une espèce invasive (2022).

Sommaire de « La tyrannie du cerveau »

Prologue

1. A la recherche d’énergie
2. Le prix de l’intelligence
3. Dans le cerveau des Hominines
4. Le singe carnivore
5. Grandir avec un grand cerveau
6. Une société du partage
7. L’Homme prédateur
8. La révolution néolithique
9. Comment sommes-nous devenus humains ?

Remerciements

Une extrait de « La tyrannie du cerveau »

Le singe carnivore

L’augmentation spectaculaire de la taille du cer-veau, qui, dans la plupart des lignées d’Hominines, a plus que doublé au cours des deux derniers millions d’années, a représenté un défi adaptatif majeur. Cette évolution a requis l’accès de l’organisme à une quantité d’énergie toujours croissante et n’a pu se faire que grâce à une redistribution de cette énergie entre les différentes fonctions biologiques. Cette réorganisation du budget énergétique corporel a eu de profondes conséquences sur la biologie des ancêtres de l’Homme et sur leur comportement. On s’en souvient, notre encéphale consomme environ 20% de notre métabolisme basal, défini comme la quantité d’énergie utilisée par notre corps lorsqu’il est au repos et en l’absence de tout stress lié à la température extérieure. Ce pourcentage n’est que de 8,5 % chez un chimpanzé. Une voie évolutive évidente se présentait : augmenter la quantité totale d’énergie produite sur laquelle la part nécessaire au cerveau doit être prélevée. On a parfois considéré que l’augmentation générale de la taille corporelle chez les représentants du genre Homo était non pas une cause mais en réalité une conséquence de l’accroissement de la taille de l’encéphale. La masse corporelle aurait tout simplement augmenté pour pouvoir alimenter un cerveau toujours plus gourmand en énergie. Malheureusement, l’impossibilité de reconstituer précisément la taille corporelle d’individus dont seule la boîte crânienne a été conservée rend cette hypothèse difficile à démontrer. De plus, l’augmentation de la taille corporelle pouvait en elle-même se révéler être avantageuse pour des espèces dont la subsistance était en partie orientée vers la prédation de Mammifères de taille moyenne à grande.
Une autre direction possible pour satisfaire les besoins énergétiques croissants du cerveau était l’augmentation générale du métabolisme basal, indépendamment de la taille. Et elle a bien été suivie. Il est facile de le vérifier en comparant la physiologie de l’Homme et celle des grands singes.
En tenant compte de la masse corporelle des différentes espèces, le métabolisme basal ainsi que la dépense énergétique quotidienne due aux activités physiques sont plus élevés chez les Hommes que chez les grands singes. L’organisme d’un Homo sapiens moderne est plus coûteux en énergie que celui d’un chimpanzé, d’un gorille ou d’un orang-outan qui pèserait le même poids. Dans la lignée humaine,
cette élévation du niveau général du budget energetique a ainsi mécaniquement permis une augmentation de la quantité de calories qui pouvait être consacrée au cerveau…