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La France préhistorienne
La France préhistorienne de 1789 à 1941
Arnaud Hurel
Comment la préhistoire est devenue une science ?
À compter des années 1820-1830, au moment où apparaissent en France les sciences préhistoriques, l’archéologue commence à se substituer à l’antiquaire essentiellement motivé par la collecte d’objets parfois beaux et souvent énigmatiques. L’enjeu devient alors celui du sens, c’est-à-dire la nécessité de « faire parler » les vestiges mis au jour. Les pièces exhumées du sol vont alors lentement évoluer de l’état de curiosités de la nature au statut d’antiquités nationales. Devenues à la fois objets de sciences et dépôt patrimonial, elles sont assujetties, depuis les premières manifestations d’intérêt à leur égard et au même titre que l’activité de fouille, à la rivalité entre protection patrimoniale (notion relevant de l’intérêt général) et libre disposition (fondée sur le respect de la propriété privée).
Ce livre propose de découvrir la lente prise de conscience de la nécessité de préserver les vestiges préhistoriques et la mise en œuvre des premières politiques publiques en la matière jusqu’à la première loi réglementant les fouilles archéologiques (1941).
Mais parce que l’archéologie préhistorique n’a pas toujours été cette science normalisée que nous connaissons aujourd’hui, car essentiellement contrôlée par l’État à travers ses chercheurs et ses conservateurs des circonscriptions archéologiques, cet ouvrage fait également écho aux réalités de la communauté des préhistoriens d’hier. Pendant près de cent ans, c’est-à-dire jusqu’à la Seconde guerre mondiale, la Préhistoire a d’abord été une affaire de tempéraments, le domaine de ces préhistoriens amateurs qui dépensaient avec passion temps et argent dans la quête des origines de l’Homme. Et l’on découvre que, longtemps, l’archéologue aux champs n’a eu de comptes à rendre à personne, veillant jalousement à préserver ses droits sur ses fouilles et ses collections. Ce livre rappelle que la concurrence était féroce, les débats vifs, les haines tenaces et la mobilisation contre l’État centralisateur farouche.
CNRS
284 pages
15 x 23 cm
L’auteur Arnaud Hurel
Arnaud Hurel est historien, docteur en histoire contemporaine, au département de préhistoire du Muséum National d’Histoire Naturelle. Directeur de la publication de la revue Conflits actuels, il est l’auteur de nombreux articles scientifiques et de vulgarisation consacrés à l’histoire des idées (XIXe-XXe siècles), à travers l’histoire des sciences et les politiques du patrimoine, et a participé à plusieurs expositions dont, récemment, Sur les chemins de la préhistoire, L’abbé Breuil du Périgord à l’Afrique du Sud (Musée de L’Isle-Adam, 2006) et La Saga de l’Homme, L’homme exposé (Musée de l’Homme, Paris, 2007). Il a publié, en collaboration avec Amélie Vialet, Teilhard de Chardin en Chine. Correspondance inédite (1923-1940), Éditions du Muséum-Edisud 2004, La France préhistorienne de 1789 à 1941, Editions du C.N.R.S (2007). L’abbé Breuil CNRS (2011)
Sommaire La France préhistorienne
Chapitre 1. La lente reconnaissance du patrimoine archéologique I. L’apparition de la notion générale de « monuments historiques » A. La Révolution et ses contradictions : destruction et conservation B. Des droits à venir et à respecter C. « Guerre aux démolisseurs ! » II. La conservation des monuments historiques A. De l’inspection à la Commission des monuments historiques B. Bouvard et Pécuchet archéologues 1. l’Académie celtique et la celtomanie 2. Le temps de la fondation avec Arcisse de Caumont C. « Il faut laisser l’initiative privée agir comme bon lui semble » D. Les monuments de Carnac en danger Chapitre 2. L’ébauche d’une protection des monuments préhistoriques I. L’empereur archéologue II. Un musée pour les « antiquités nationales » A. Une filiation : du Musée d’Alexandre Lenoir au Musée des antiquités nationales 1. Un musée d’antiquités nationales à l’hôtel de Cluny ? 2. Que faire des collections de Boucher de Perthes ? B. La création du Musée des Antiquités nationales III. Il est urgent de sauver les derniers mégalithes Chapitre 3. Protéger les monuments historiques et préhistoriques I. La France devient un vaste chantier de fouilles archéologiques II. La France en retard par rapport aux législations européennes III. La loi du 30 mars 1887 A. Seize années de maturation pour une loi B. Une loi d’exception ? C. Les monuments préhistoriques reconnus par le législateur 1. L’expropriation des monuments mégalithiques 2. Les fouilles archéologiques 3. Les collections particulières sont hors du champ d’application Chapitre 4. L’État et la réalité des pratiques de terrain I. Des pouvoirs publics dépassés II. Une action législative et réglementaire peu adaptée III. Longtemps l’archéologue aux champs n’a eu de comptes à rendre à personne A. La fouille est une initiative privée et un divertissement à la mode B. Vers une prise de conscience ? C. Les collections ne représenteraient-elles qu’une question accessoire ? 1. Le statut des pièces et la constitution des collections 2. Le devenir des collections Chapitre 5. « Les Prussiens chez nous », l’affaire Hauser I. Une communauté traversée par des luttes II. Un « aventurier suisse » se signale aux Eyzies A. Le feu aux poudres B. Une affaire d’État ? C. Grand émoi chez les archéologues III. Hauser devient un symbole national Chapitre 6. Le recours à la loi pour encadrer les fouilles archéologiques et paléontologiques I. Les grandes manœuvres A. Les monuments préhistoriques intègrent la Commission des monuments historiques B. La préhistoire fait son entrée à la Chambre II. Les oppositions se manifestent dès l’avant-projet de loi III. Un projet de loi équilibré IV. La mobilisation contre l’État et ses « savants officiels » A. Un débat qui entre dans la sphère publique B. L’offensive victorieuse des sociétés savantes Chapitre 7. Évolutions institutionnelles et législatives I. La création de l’Institut de paléontologie humaine A. Une démarche novatrice B. Science et religion de nouveau face à face II. L’Université ignore la Préhistoire III. Une première réglementation par défaut A. Une nouvelle loi pour protéger les monuments historiques 1. La préhistoire trouve une petite place 2. Les fouilles et les objets mis au jour B. Des « pouvoirs redoutables et redoutés » Chapitre 8. D’une guerre mondiale à une autre I. Évolution des mentalités et vent de révolte à la Commission des monuments historiques A. De nouvelles approches B. Un État qui ne joue pas son rôle II. La loi Carcopino du 27 septembre 1941 comme étape ultime d’un processus A. Une évolution majeure qui intervient dans un contexte dramatique B. L’État devient l’acteur principal de l’archéologie C. Séparer recherche et conservation D. Une révolution dont les préhistoriens ne peuvent que prendre acte |