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Des martiens au Sahara
Des martiens au Sahara
Deux siècles de fake news archéologiques
Jean-Loïc Le Quellec
Editions du détour
Présentation de l’éditeur
L’anthropologue fait ici le récit des erreurs ou des supercheries scientifiques des deux derniers siècles, à l’origine des plus fumeuses des « fake news » archéologiques d’aujourd’hui.
Les Martiens sont venus au Sahara pendant la préhistoire ; les hommes ont vécu avec les dinosaures ; les Celtes sont les premiers colons de l’Amérique précolombienne ; on a retrouvé l’arche de Noé ; le matriarcat primitif…
Toutes ces histoires ont un point commun : elles sont fausses.
Leurs origines sont passionnantes : elles peuvent être pensées et répandues par des « académiciens naïfs » arrivés en fin de carrière et qui sortent de leur domaine de compétence, rêvées par des « archéologues romantiques » déconnectés des faits, construites par des amateurs un peu dérangés convaincus que leur découverte gêne la science bienpensante, ou montées consciemment par de réels escrocs. Jean-Loïc Le Quellec décortique leur éclosion et leur diffusion.
Par son érudition et son humour, ce livre est une formidable invitation à exercer notre esprit critique.
Editions du Détour
440 pages
Nouvelle édition avec ajouts du livre paru initialement en 2009
16 x 24
23,9 euros (broché) et 15,9 euros (Ebook) (Kindle)
Hominides.com
Vous saviez qu’on a retrouvé l’arche de Noé ? et que ce sont les Celtes qui ont conquis les Amériques ? Mieux, aviez-vous mémorisé que les martiens, ayant débarqué dans le Sahara (si, si !), ont été peints sur les parois des abris ! Allez, une galéjade supplémentaire… les hommes ont si bien connu les dinosaures qu’ils les ont gravés sur des pierres… Si vous trouvez ces allégations amusantes tant mieux ! Mais le plus gênant c’est que certaines personnes, souvent par manque d’information mais également par un besoin de « merveilleux », d’extraordinaire, veulent y croire dur comme fer en rejetant par ailleurs toutes les données scientifiques, le travail des chercheurs, et les « gouvernements qui nous cachent tout »…
Ici on n’est plus sur de l’archéologie basée sur des faits ou des éléments trouvés, mais sur de « l’archéologie romantique » qui vous raconte de belles histoires.
L’anthropologue Jean-Loïc Le Quellec (CNRS) réédite, avec des ajouts, son ouvrage Des Martiens au Sahara paru en 2009 chez Acte Sud. Le spécialiste des mythes à travers le monde reprend les plus grandes divagations humaines en terme d’archéologie et les passe à la moulinette du « fast checking ». Il débusque les (trop) belles histoires, les volontés de mentir, les supercheries… et explique comment on en est arrivé là. Les mécanismes sont souvent à base d’ignorance, de racisme, de méchants scientifiques, de gouvernements corrompus et tout cela est généreusement mis au jour par un simple amateur qui a trouvé la vérité…
Jean-Loîc Le Quellec raconte tout cela avec une belle tranche d’humour qui permet de passer un bon moment avec les faux archéologues qui sont souvent de vrais manipulateurs.
La vérité est ailleurs, comme dirait Mulder à Scully !
C.R.
L’ auteur de Des martiens au Sahara
Jean-Loïc Le Quellec est anthropologue, mythologue et préhistorien. Directeur de recherche émérite au CNRS, membre de l’Institut des Mondes africains, il y étudie les relations entre art rupestre, contes et mythes, sur la très longue durée. En 2006, il a reçu le prix Bordin de l’Institut pour ses travaux sur l’art rupestre du désert Libyque et, en 2008, le grand prix Burkhart de l’archéologie lui a été décerné par l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Il est l’auteur d’une quarantaine de livres dont , « Dictionnaire critique de mythologie » (novembre 2017), « L’Homme de Lascaux et l’énigme du nuit » (2018) « Avant nous le déluge » (novembre 2021), L’Homme de Lascaux et l’énigme du puits (2022) et La Caverne originelle : Art, mythes et premières humanités (2022).
Sommaire de Des martiens au Sahara
Prologue
Chapitre 1 — Pourquoi Indiana Jones se trompe
Chapitre 2 — Jeux de la nature
Chapitre 3 — Les silex taillés par eux-mêmes
Chapitre 4 — Des pierres-figures sauvables
Chapitre 5 — La gigantologie frappe encore
Chapitre 6 — Un doigt de créationnisme
Chapitre 7 — Petit mais têtu
Chapitre 8 — Des cartes rebattues
Chapitre 9 — La pipolisation de la science et son empreinte au Sahara
Chapitre 10 — Archéologie biblique : «Il était une foi »
Chapitre 11 — Un peu d’archéologie
Chapitre 12 — Greenpeace et le déluge
Chapitre 13 — Un Paradis de perdu, dix scoops de trouvés !
Chapitre 14 — Mammouth et Mormon sont dans un livre…
Chapitre 15 — L’archéologie selon Joseph Smith, martyr
Chapitre 16 — Les Amérindiens ont-ils vu des diplodocus ?
Chapitre 17 — N’auraient-ils pas vu mammouths, rhinocéros et tricératops ?
Chapitre 18 — Un éléphant impérial en Amérique
Chapitre 19 — Des oghams américains ?
Chapitre 20 — Tête en l’air ?
Chapitre 21 — L’homme tertiaire : le retour
Chapitre 22 — L’homme tertiaire : troisième !
Chapitre 23 — Les pierres d’Ica : complètement stone !
Chapitre 24 — Terre-Mère, matriarcat, primitifs et autres vieilles lunes
Chapitre 25 — Encore la plus ancienne écriture du monde
Chapitre 26 — Le mammouth de Cheddar : beaucoup de bruit pour rien
Chapitre 27 — Martiens du Sahara et autres « Têtes Rondes »
Chapitre 28 — La tragique histoire de Thomas Stuart Ferguson
Épilogue
Bibliographie
Notes
Un extrait de Des martiens au Sahara
CHAPITRE 18 – UN ÉLÉPHANT IMPÉRIAL EN AMÉRIQUE
« Cette ébauche de la nature
Est, sans doute, un premier essai;
Il n’a ni forme, ni figure;
Il est manqué, n’est-il pas vrai ?»
(Jean-Étienne Despréaux)
Dans la première moitié du XX° SIÈCLE, l’archéologue, explorateurs et essayiste Alpheus Hyart Verrill (1871-1954), que nous avons déjà croisé au chapitre précédent, cherchait à démontrer que l’homme était originaire du continent américain et que le « Nouveau Monde » aurait été, en réalité, le plus ancien. Son argument principal était que « le simple fait que les formes les plus primitives et les plus anciennes de crânes humains ou demi-humains aient été si souvent trouvées en Europe, Afrique, Asie et à Java, n’est qu’une preuve négative que le berceau de l’Homme est le Vieux Monde ». Pour lui, « demain, l’année prochaine, à tout moment en fait, quelqu’un peut découvrir quelque part le crâne d’un ancien Américain aussi lointainement primitif que les fameux crânes de Pékin’ ». Un tel argument négatif n’a, au fond, aucune valeur: on ne révolutionne pas une science sur la base de découvertes qui pourraient avoir lieu un jour. Pour ce faire, il faut disposer de vrais documents. Dans cette optique, les gravures rupestres des environs de Moab (Utah), décidément très mises à contribution par les auteurs qui entendent réviser nos connaissances sur la Préhistoire, furent de nouveau convoquées.
Cette fois, il s’agissait d’une image supposée montrer un « éléphant impérial » chargeant un homme. Hyatt Verrill a publié une reproduction de ce document essentiel (fig. 68), avec ce bref commentaire: « L’homme attaqué semble se tenir dans un marais ou une rivière, car l’eau est indiquée par une ligne ondulée transversale placée vers le bas et atteignant le personnage au-dessous des genoux. Celui-ci, dans ce tableau d’action primitif, est sans armes, mais l’artiste a commencé de graver quelque chose, peut-être une lance, dans la main qui est la plus éloignée de l’éléphant. Il est impossible de dire ce qu’il avait l’intention de représenter, et de jamais savoir pourquoi il a laissé inachevée cette pièce d’un intérêt capital. »
L’identification de l’animal a son importance, car l’appellation « éléphant impérial » a été donnée en 1858 par Joseph Leidy à l’animal que l’on dénomme maintenant Mammuthus imperator. C’est le plus grand des mammouths inventoriés, qui vécut de quatre million six cent mille années avant notre ère jusque vers la fin de l’ère glaciaire – le plus récent spécimen connu étant celui de Santa Isabel Ixtapan au Mexique, qui remonte à dix mille six cents ans AP. Sa caractéristique principale, qui permet notamment de ne pas le confondre avec d’autres espèces de proboscidiens, est que ses défenses se recourbent vers le haut jusqu’au point de s’entrecroiser.
Il est touiours utile de retourner aux sources, surtout s’agissant de documents exceptionnels dont les auteurs veulent tirer d’importantes conclusions. Après vérification, il apparaît que le rapport de Samuel Hubbard évoque bien cette gravure, mais que le découvreur en donne un relevé pour le moins différent de celui de Hyatt Verrill (fig. 69).