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Le premier temple – Göbekli Tepe
Le premier temple - Göbekli Tepe Klaus Schmidt (édition originale de 2005) CNRS Editions Traduit de l'allemand par Thérèse Houdart Préface de Jean Guilaine
« À n’en pas douter, l’une des plus admirables révélations archéologiques de ces vingt dernières années. » Jean Guilaine, professeur au Collège de France
Présentation par l’éditeur :
Paradis perdu au sud-est de la Turquie ? Stonehenge en Haute-Mésopotamie ? Depuis sa découverte en 1995, Göbekli Tepe déchaîne les passions. Fouillé sur une infime partie, le site néolithique a livré des bâtiments exceptionnels structurés par des centaines de piliers mégalithiques colossaux en forme de « T ». Élevés il y a 12 000 ans, 5 000 ans avant les menhirs de Carnac, 7 000 ans avant les pyramides, ces piliers sont presque tous couverts de fascinants bas-reliefs animaliers (fauves, renards, sangliers, grues, serpents…). Ce gigantesque ensemble bâti par des chasseurs-cueilleurs reste une énigme.
Klaus Schmidt, le fouilleur de Göbekli Tepe décédé récemment, nous a laissé ici le passionnant et vivant récit de sa découverte et de son dégagement. Pour lui, après vingt ans de fouilles et d’études, ces enceintes de pierre constituent un « temple », un grand centre cultuel révélateur d’une révolution religieuse qui aurait précédé la révolution agricole.
Abondamment illustré, cet ouvrage plonge dans l’imaginaire des bâtisseurs à un moment charnière de l’histoire de l’humanité et à l’endroit même où le monde des chasseurs-cueilleurs bascula pour engendrer celui des agriculteurs-éleveurs. Une introduction vivante et documentée à l’histoire et à l’art du Néolithique au Proche-Orient.
CNRS édition
420 pages,
Un grand nombre d’image pleine page
14,3 x 20,6 cm
Broché
Hominides.com
Très belle initiative des éditions du CNRS que cette parution, pour la première fois traduits et publiés en français, des travaux grand-public de l’archéologue allemand Klaus Schmidt, en l’occurrence son ouvrage devenu un succès outre-Rhin, « Sie bauten die ersten Tempel : Das rätselhafte Heiligtum der Steinzeitjäger» (Ils construisaient les premiers temples, l’énigmatique sanctuaire des chasseurs de l’âge de pierre), qui retrace l’histoire de l’une des plus importantes découvertes archéologiques du XXe siècle, celle du « temple » de Göbekli Tepe, situé au sud-est de l’Anatolie, région de l’actuelle Turquie, près de la frontière avec la Syrie. Un site qui se révèle, au fil des patientes recherches menées entre 1995 et 2014 par l’auteur, malheureusement décédé récemment, et ses équipes, d’une extraordinaire richesse : plusieurs enceintes, quatre dégagées pour l’instant, réalisées au moyen de centaines de piliers de calcaire pesant plus de dix tonnes chacun, assemblés en formations circulaires richement décorées de sculptures et bas-reliefs en forme d’animaux ou signes géométriques… Le tout encerclé d’une vaste enceinte en murs de pierre sèche, et entièrement enseveli par ses concepteurs sous une imposante colline artificielle! L’attrait principal de ce livre destiné au grand-public, dont le style alerte maintient en éveil l’intérêt du lecteur même non-averti, est de partager l’avancée des fouilles, année après année, en décrivant les conditions rudes du terrain, mais aussi les enthousiasmes et les surprises nés des trouvailles, dont certaines extraordinaires, qui se succèdent, tel ce pilier de près de 4 mètres de haut sur lequel les artistes ont représenté magistralement une série d’animaux comprenant un taureau, un renard et une grue… Au point que, associé à la date très ancienne ( -12 000 ans) de cette construction unique dans tout le croissant fertile, même si elle peut être rattachée culturellement à d’autres réalisations monumentales et plus tardives comme la « ville néolithique » de, Çatal Höyük, dans l’actuelle Turquie, plus connue du grand public. Mais avec son âge beaucoup plus reculé, Göbekli Tepe représente une énigme extraordinaire : alors que la transition néolithique ne s’est pas encore produite dans la région, pourtant au cœur de ce phénomène économique et culturel majeur de l’histoire de l’humanité, ce sont donc bien des groupes de chasseurs-cueilleurs, dont les contemporains ornent en Europe occidentale les dernières cavités souterraines, qui ont érigé, taillé, sculpté et fortifié ce site hors du commun… Pour quelles raisons? Ici, le regretté archéologue allemand franchit le pas entre la fouille méticuleuse et l’hypothèse interprétative, évoquant des motivations cultuelles à l’œuvre sous forme de stèles représentant des divinités, dans un « sanctuaire des derniers chasseurs-cueilleurs de la région », véritable révolution spirituelle et religieuse, préparant et annonçant l’avènement de l’agriculture et de l’élevage qui marqueront la fin du paléolithique dans cette région proche-orientale.
Pedro Lima, journaliste scientifique
L’auteur
Klaus Schmidt, archéologue allemand, enseignait à l’université d’Heidelberg.
Sommaire de Le premier temple – Göbekli Tepe
Avant-propos,
Carte,
Préface,
Avertissement,
I Une (re)découverte
L’arbre aux voeux
Urfa- Une ville et un pays
II Découvertes, chercheurs, termes techniques,
Le système des trois périodes, l’âge de la pierre polie et le choc de Jéricho
Le Croissant fertile et ses «Hilly Flanks»
Çatal Höyük – Encore une «ville» du Néolithique
Çayönü – Naissance prématurée d’Héphaïstos
Neval? Çori – Dans la vallée de la peste
Gürcütepe et la naissance d’un nouveau projet de recherche
III Göbekli Tepe
La montagne « ventrue »
L’Enceinte A – Le Bâtiment aux piliers ornés de serpents
L’Enceinte B – Un Stonehenge mésopotamien : le Bâtiment aux piliers ornés d’un renard
L’Enceinte C – Dans l’Enclos des sangliers
L’Enceinte D – Un zoo de pierre
IV Entre signification et interprétation – Approche de l iconographie et de l univers de l âge de la pierre,
L’animal et sa représentation dans l’Orient ancien
La mémoire culturelle et les «pistes des rêves» néolithiques
V Les niveaux les plus récents de Göbekli Tepe et la fin du sanctuaire des chasseurs,
Les constructions plus récentes et le Bâtiment aux piliers ornés d’un lion
Quand le chasseur eut besoin de l’agriculteur – Hypothèses pour un sanctuaire du premier âge de la pierre polie
Göbekli Tepe Fouilles récentes et réflexions
Un épilogue,
Bibliographie générale,
Crédits,
Index général,
Remerciements
Une extrait de Le premier temple – Göbekli Tepe
... Nous en avons maintenant terminé avec l’examen des quelques sites importants pour la compréhension de ce qui nous attend à Göbekli Tepe. Nous avons été confrontés à différents chercheurs et à leurs découvertes, qui nous ont présenté une image du monde proche-oriental à l’âge de la pierre polie. Il est clair que les hommes de cette lointaine époque pratiquaient une forme précoce d’agriculture et d’élevage – même si beaucoup d’entre eux gardaient encore dans leurs rêves la nostalgie de leur culture de chasseurs. Mais leur créativité ne s’est pas limitée à leur nouvelle activité. Leurs maisons recelaient de grands et de petits objets de culte que nous pouvons à bon droit appeler des œuvres d’art. Nous en avons déduit que leur esprit n’était pas uniquement encombré par le souci de se procurer le nécessaire pour leur bien-être quotidien et que ces gens se préoccupaient aussi intensément de sujets mythiques. Ils avaient, associés à cette fraction de leur univers, des «bâtiments spéciaux» affectés à des rituels. Mais parmi ces gens, il y avait aussides personnes ou des groupes de personnes qui jouaient un rôle prééminent dans la pratique du culte – comme le montre leur rapport à certains crânes. On peut donc peut-être déjà parler de traits fondamentaux d’une orientation religieuse – au sens d’une pratique cultuelle organisée.
Ce qui est remarquable, c’est que toutes ces questions aient vivement préoccupé des gens habitant des régions très différentes, alors même que la plupart d’entre eux ne maîtrisaient pas encore la technique de la poterie, la cuisson des vases en argile. Nous devrons donc nous habituer – avant de pénétrer dans Göbekli Tepe – à l’idée que nos prédécesseurs avaient fait, en ce xe millénaire av. J.-C., un grand pas en avant et que nous sommes confrontés à une culture évoluée et complexe. Avec cet arrière-plan devant les yeux, il nous sera plus facile de comprendre ce qui est advenu à une date si reculée à Göbekli
Dans ce chapitre, je vais maintenant essayer de décrire ce que nous avons trouvé en matière d’architecture et de sculpture, dans le troisième et plus ancien niveau que nous avons fouillé à
Göbekli Tepe et qu’il faut dater – comme je l’ai dit – du Xe millénaire av. J.-C. Nous ne découvrirons que vers la fin du livre (au chapitre V) les deux niveaux les plus récents – et surtout le second –, quand nous nous intéresserons au déclin et finalement à la disparition de la culture de nos prédécesseurs de Göbekli Tepe.
Au long des pages qui viennent, consacrées à la présentation des lieux et des découvertes faites à Göbekli Tepe, je vous demanderai d’avoir un peu de patience. Je voudrais d’abord vous familiariser avec les différents établissements et avec l’univers esthétique de ce centre de l’âge de la pierre en vous faisant faire en quelque sorte le tour du propriétaire. Vous devriez pouvoir vous faire ainsi vos propres impressions, sans que je vous accable tout de suite d’explications et d’interprétations – que je serais d’ailleurs bien souvent incapable de vous donner ou qui ne seraient dans une large mesure que des spéculations. Au cours de ce tour d’horizon, je laisserai se glisser dans ma présentation des réflexions personnelles sur la structure du site, sur sa nature et son décor, puis je développerai plus largement, dans les chapitres IV et V, les Göbekli Tepe conclusions que l’on peut en tirer, afin que vous puissiez finalement prendre conscience de toute la palette et la richesse de nos découvertes. Au début, votre trouble ne sera pas plus grand que le nôtre, tandis que Göbekli Tepe s’ouvrait devant nous jour après jour…