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Grotte du Lazaret
60 000 ans de présence des hommes préhistoriques… De – 130 000 à – 190 000 ans !
Grotte du Lazaret – Nice – Alpes-maritimes
A cette époque c’était Homo heidelbergensis (ou Homo erectus) qui avait conquis la région.
Situation
La grotte du Lazaret est située sur la commune de Nice, au pied du Mont Boron. Elle se trouve aujourd’hui à une trentaine de mètres au-dessus du niveau de la mer et à cent mètres de la côte. Il y a 160 000 ans, au cours d’une période glaciaire, elle était perchée à plus de 120 mètres de hauteur. C’était à l’époque un campement provisoire, idéalement placé pour des chasseurs qui pouvaient observer, à l’abri du porche, les mouvements du gibier. Les fouilles sur le site continuent et la grotte ne se visite pas, sauf lors de manifestations comme les Journées du Patrimoine ou des ateliers de fouilles en été.
A droite entrée de la grotte du Lazaret Photo © Kroko pour Hominides.com
La découverte et les fouilles au Lazaret
Citée comme curiosité ou lieu à visiter dans différents ouvrages au 18ème et 19ème siècle (1, 2) la grotte est fouillée la première fois en 1842 par un médecin, Alexis Naudot. Son étude « Note sur les cavernes ossifères de Nice » ne rencontre pas de succès car ses découvertes sont très décalées par rapport à l’époque : la préhistoire et les hommes anciens ne font pas bon ménage avec les croyances de l’époque.
En 1879, l’identification de plusieurs bifaces retrouvés dans la grotte du Lazaret par le célèbre préhistorien Emile Rivière démontre que cette cavité a été visitée par des hommes au temps préhistoriques.
De 1950 à 1966 François-Charles Octobon effectue des fouilles dans la cavité et publie de nombreuses études. C’est lors de ses fouilles qu’il découvre un pariétal d’enfant daté de – 170 000 ans.
La grotte du Lazaret a été classée monument historique le 21 mars 1963.
Depuis 1962 les recherches sont toujours en cours sous la direction d’Henry de Lumley qui a également créé le Laboratoire de Préhistoire du Lazaret, situé à proximité immédiate de la grotte.
La grotte du Lazaret, une longue (pré)histoire
La cavité est longue de 35 mètres sur une largeur de 4 à 20 mètres. Le plafond est situé à plusieurs mètres de hauteur et les fouilles en profondeur ne font qu’accentuer cet espace. En effet, depuis 50 ans les chercheurs ont dégagé les couches archéologiques sur une hauteur de 2,40 mètres. Toutes les campagnes de fouilles successives ont mis à jour 300 000 artefacts (outils, ossements divers…). Les scientifiques estiment que la partie archéologique est haute de plusieurs mètres.
La grotte du Lazaret a été occupée à de nombreuses reprises sur une période s’étalant de -190 000 à – 130 000 ans. Au total plus de 27 niveaux archéologiques ont été identifiés.
Les découvertes au Lazaret
La grotte du Lazaret, grâce aux nombreux artefacts qu’elle a délivrés permet d’avoir une idée assez précise du mode de vie des hominidés il y a 150 000 ans. Il choisissaient leurs proies (du cerf en majorité), découpaient la viande de manière ordonnée et il semblent même qu’ils fumaient des morceaux de viande (voir la partie sur les foyers).
La « hutte » du Lazaret
En 1969, les chercheurs communiquent sur une découverte importante : la présence de traces d’une hutte dans la grotte. Les traces sont constituées de « lignes » de pierres formant une sorte d’enclos contre la paroi. Les chercheurs, sous la direction d’Henry de Lumley ont, à l’époque, déterminé que ces pierres permettaient de tendre des peaux sur une structure en bois.
Cette théorie a reçu un accueil mitigé de la communauté scientifique. Cette hutte, qui aurait pu héberger une dizaine de personnes, englobe également deux restes de foyers. Aujourd’hui les chercheurs remettent en cause cette hutte dans la grotte et penchent vers un lieu de repos.
Hutte ou simple » zone de vie » cette partie de la grotte était également un lieu de repos : de minuscules coquilles marines (trop petites pour être consommées) indiquent que les anténéandertaliens avaient apporté des algues pour se fabriquer des litières.
La Faune au Lazaret
Le grand nombre d’ossements d’animaux retrouvé montre que les anténéandertaliens avaient un régime carnivore varié. Le cerf était la principale proie de ces chasseurs avertis: des adultes (surtout des biches) et des plus jeunes. Pour la paléontologue Patricia Valensi « Parmi les jeunes, nous relevons beaucoup de première et deuxième année, respectivement âgés de 6 mois (faon) et de 18-20 mois. Connaissant la date de mise bas pour cette espèce, nous pouvons en conclure que la chasse s’est produite en automne, probablement au mois de novembre. » (3)
Les anténéandertaliens chassaient d’autres espèces : on a également découvert des restes de bouquetin, d’aurochs, de bison, de cheval, de rhinocéros de prairie, de mégacéros et d’éléphant antique. De nombreuses stries et traces de découpes sur les ossements montrent que ces chasseurs étaient aussi de bons bouchers…
Les foyers du Lazaret
Plusieurs foyers ont été mis à jour dans les niveaux archéologiques 25 à 27 de la cavité. Un des foyers (sol UA27) était positionné sur une dalle, certainement pour augmenter la température du feu. Un autre foyer était ceint de pierres et de galets.
Le plus intéressant reste des traces de graisse animale retrouvées dans l’un des foyers alimenté par des des herbes de posidonie, ce qui permet de penser que des morceaux de viande étaient fumés à proximité. Cette dernière hypothèse donnerait à Homo erectus des facultés que l’on pensait réservées à Homo sapiens. Selon Henry de Lumley « La présence de dérivés d’acide carboxylique et de composés aromatiques issus de la combustion de graisses prouve l’existence d’un lieu de séchage et de fumage des viandes ».
L’industrie lithique, les outils retrouvés
Les outils découverts dans la grotte du Lazaret sont au nombre de 100 000 pièces… Les bifaces acheuléens mais aussi les chopping-tools, les choppers et les galets aménagés représentent avec le petit outillage sur éclat, la majeure partie des outils mis au jour. Les bifaces sont plus fréquents dans les niveaux inférieurs (les plus anciens) et sont remplacés progressivement par des racloirs dans les niveaux supérieurs (les plus récents). A – 150 000 ans les bifaces disparaissent de la stratigraphie : transition de la culture acheuléenne (riche en bifaces) à la culture moustérienne.
Pour fabriquer leurs outils les préhistoriques ne se contentaient pas de ramasser des cailloux au hasard, ils allaient les chercher spécifiquement. Pour le lithicien Dominique Cauche « Si la plupart des cailloux ont été ramassés dans un rayon de 15 kilomètres, quelques quartzites fins proviennent des Appenins, à plus de 60 km au nord-est. Trente kilomètres plus près, sur le site de Ciotti, les Acheuléens ont collecté du silex gris de bonne qualité« . Photo © Kroko pour Hominides.com : outils exposés au Musée de Préhistoire de Menton
Découvertes de restes d’hominidés
Au total 24 restes humains ont été retrouvés en 50 ans de fouilles au Lazaret : principalement des dents mais aussi des humérus fragmentés. Deux éléments intéressent particulièrement les anthropologues : un pariétal d’enfant et l’os frontal d’un jeune adulte… La présence d’ossements appartenant à plusieurs générations indique que les visiteurs vivaient en clan ou en famille.
Un pariétal d’enfant de 9 ans
Le pariétal d’un enfant prénéandertalien a été dégagé en 1969. L’enfant devait être âgé de 9 ans au moment de sa mort. Son pariétal présente une lésion (méningiome) qui a dû être à l’origine de son décès. Il est daté de – 150 000 ans.
Photo : le pariétal de l’enfant au Musée de Préhistoire de Menton
© Kroko pour Hominides.com
L’os frontal d’un Homo erectus
En 2011, la campagne de fouilles d’été a permis de mettre à jour l’os frontal d’un hominidé (certainement un Homo erectus). L’individu devait être âgé de moins de 25 ans. Il était situé dans une couche archéologique datée de – 170 000 ans. Ce fossile a été baptisé Akidaya (« d’ici et d’ailleurs » en patois nissart).
La découverte du crâne d’Homo erectus au Lazaret – Akidaya
Photo frontal de l’hominidé découvert en 2011
D’autres éléments du squelette
Un humérus humain fracturé sur le sol UA26. L’os fracturé à l’état frais, porte des marques de dents de carnivores aux deux extrémités.
Photo à droite : fémur gauche d’un jeune individu
© Laboratoire du Lazaret
Un autre humérus, appartenant à une femme présente des traces de découpes.
Sources
1 François Emmanuel Fodéré, « Voyage aux Alpes-Maritimes »
2 Joseph Antoine Risso, « Histoire Naturelle des principales productions de l’Europe Méridionale et particulièrement de celles des environs de Nice et des Alpes-Maritimes ».
3 Archéologia n°433 Mai 2006 – Grotte du Lazaret de Romain Pigeaud
La grotte du Lazaret en pratique…
Type | Techniques employées | Périodes | Occupation | Restes Humains |
Grotte calcaire | Acheuléen Moustérien | Pléistocène moyen (stade isotopique 6) | Multiples et successives de – 190 000 à – 130 000 ans | – Dents et pariétal d’enfant – Dents d’adultes – Crâne jeune adulte |
Dimensions | Nombre de représentations | Art mobilier | Outils / Artefacts | |
Cavité de 35 mètres de long sur 4 à 20 mètres de large | non | Biface type Levallois | ||
Localisation | Accessibilité | Date découverte | Particularités | |
Nice Alpes-Maritimes | Ne se visite pas / Fouilles en cours | Cavité signalée en 1821 par François Emmanuel Fodéré. | Une stratigraphie sur 150 000 ans |
Pas de visite du site
La grotte du Lazaret est toujours en activité et des campagnes de fouilles sont organisées tous les étés. Le site n’est donc pas aménagé pour des visites « touristiques ».
Toutefois il est possible, pendant la période estivale, d’espérer visiter les lieux pour les personnes vraiment passionnées. Vous devez tout d’abord prendre contact avec le Laboratoire Départemental de Préhistoire du Lazaret :
Tél : 04 92 00 17 37
Fax : 04 92 00 17 39
Email : lazaret@lazaret.unice.fr
Pour aller plus loin sur le sujet vous pouvez visiter les Musées de la région qui présentent une partie du résultat des fouilles au Lazaret.