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Conférence - LASCAUX AU BORD DU NIL : les gravures rupestres de Qurta (Egypte)

Lascaux au bord du Nil
des gravures rupestres de Qurta
Conférence le Vendredi 25 mai, à 18h
Dirk Huyge
Peche-Merle


LASCAUX AU BORD DU NIL : les gravures rupestres de Qurta (Egypte)
Par Monsieur Dirk Huyge, Conservateur en Egypte préhistoire et pré-dynastique, Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles (Belgique).
Soirée organisée avec l'association des Amis du Musée Champollion, Figeac

C’est en 2005 qu’une mission découvre les sites de Qurta, en haute Egypte. Ces sites uniques révèlent les gravures les plus anciennes retrouvées en Afrique du nord. Le style, les sujets, mais également les techniques utilisées, laissaient penser que ces dessins pouvaient être paléolithiques. Après une première estimation, la datation des figures est confirmée : elles ont été réalisé il y au moins 15 000 ans.

Pendant longtemps, l’Eurasie a été considérée comme le berceau de l’art dans le monde et les remarquables peintures pariétales paléolithiques de Lascaux ont souvent été présentées comme un des points culminants de cette production ancestrale. On sait aujourd’hui que des témoignages artistiques remontant à la dernière glaciation (il y a environ 110.000 à 12.000 ans) existent sur tous les continents (excepté l’Antarctique).

Des dessins paléolithiques d’animaux avaient déjà été retrouvés au sud de l’Afrique dans les années 1960. Mais jamais une telle production artistique n’avait pu être repérée en Afrique du nord… jusque récemment, en 2005, lorsque des scientifiques des Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles (Belgique) firent un découverte importante dans les environs de Qurta, un village situé entre Louxor et Assouan, en Haute Égypte, dans la vallée du Nil.

A Qurta, les archéologues retrouvèrent près de 200 gravures rupestres (pétroglyphes), réalisées en plein air, sur d’abruptes falaises de grès. La majorité d’entre elles sont des représentations réalistes d’animaux. Les aurochs (Bos primigenius), l’ancêtre sauvage aujourd’hui disparu du boeuf domestique, sont les plus fréquents, mais on trouve aussi des hippopotames, des antilopes, des gazelles, des oiseaux aquatiques et des poissons. Quelques figures d’êtres monstrueux et un petit nombre de figures humaines de femmes stylisées complètent l’ensemble.

Grâce à la datation des dépôts de sable qui recouvraient les dessins, nous savons que cet art rupestre est vieux d’au moins 15.000 ans. Nous estimons son âge véritable à environ 19.000 à 17.000 ans. Il serait donc plus ou moins contemporain des célèbres peintures pariétales de Lascaux.

Mais comment expliquer une telle similitude, voire une parenté, entre l’art rupestre de Qurta en Égypte et celui que l’on connaît à peu près au même moment en Europe? Peut-on parler d’influence directe ou d’échange interculturel sur une telle distance ? Et pourquoi pas ? Considérant que le niveau de la mer Méditerranée se trouvait plus de cent mètres plus bas lors de la dernière glaciation, on ne peut pas exclure que des populations du Paléolithique d’Europe du sud et d’Afrique du nord aient eu des contacts intercontinentaux et aient échangé des idées artistiques et symboliques.


Un extrait de Art rupestre gravé paléolithique de Haute Egypte: El-Hosh et QurtDick Huyge et Wouter Claes

La découverte d'un art rupestre datant de l'Ere glaciaire en Afrique du Nord est assurément inédite, mais n'est pas totalement inattendue. L'existence de vestiges artistiques anciens sur le continent africain est connue depuis longtemps. Ainsi, en 1969 furent mises au jour dans une grotte de Namibie, Apollo 11 Cave, des plaquettes en pierre avec des animaux peints qui peuvent être datées d'il y a 26.000 ans. Plus récemment, en 1999 et 2000, on a retrouvé sur un site d'Afrique du Sud, Blombos Cave, des blocs d'ocre gravés de motifs géométriques complexes. Ces dessins remontent à 75.000 ou 100.000 ans I Mais Qurta est le premier site d'art rupestre paléolithique en plein air que nous connaissions. Les seuls parallèles pour Qurta se trouvent sur le site, mentionné ci-dessus, d'Abou Tanqoura Bahari à el-Hosh, ainsi que dans le Ouadi Abou Soubeira à 45 kilomètres au sud, juste au nord d'Assouan. Ce dernier ensemble a ÈtÈ révélé par des collègues Égyptiens entre 2006 et 2013. Comme à Abou Tanqoura Bahari, il s'agit de plus petits lots de quelques dizaines de gravures maximum, et qui, dans la majorité des cas, illustrent des aurochs (Fig. 16). Quelques poissons sont également représentés, de même qu'un hippopotame, quelques antilopes bubales et peut-être même un chien sauvage africain (lycaon ou cynhyËne).

Mais comment peut-on expliquer que l'art rupestre de Qurta en Egypte, vieux de plus de 15.000 ans, soit si proche et paraisse tellement lié stylistiquement à l'art produit approximativement à la même époque en Europe ? Peut-on parler d'influence directe ou d'échange culturel malgré une si longue distance ? Ce n'est pas aussi impossible qu'il n'y parait. Nous connaissons en effet des sites rupestres du sud de l'Italie et de Sicile qui attestent de pratiques artistiques similaires à celles de Qurta en Egypte. De même, dans le nord de la Libye, à proximité de la côte, on a repéré dans une grotte, Caf Eligren, des représentations comparables de bovidés sauvages. Si l'on tient compte également du fait que le niveau de la mer Méditerranée lors de la dernière glaciation se trouvait à environ 100 mètres plus bas qu'aujourd'hui, on ne peut exclure que les hommes du. Paléolithique établirent des contacts intercontinentaux et échangèrent des concepts artistiques et symboliques.

Les découvertes de Qurta conduisent donc à de nouvelles problématiques scientifiques et lancent un défi intellectuel aux archéologues. Les chercheurs se penchent également sur la délicate question de savoir ce que cet art rupestre nous apprend de l'univers symbolique de ses créateurs et de l'organisation de la société dans laquelle ils vivaient. Tout conduit à penser que les auteurs des pétroglyphes de Qurta représentaient principalement les animaux qu'ils chassaient réellement. Les sites o sont disposées ces gravures offrent avant tout un splendide point de vue sur les terrains de chasse et de pêche préhistoriques. Peut-on dès lors envisager que cet art rupestre reflète une forme de chasse magique ? Que les créateurs de ces gravures essayèrent de maitriser par des moyens surnaturels le gibier et la Nature ? Il faudra sans aucun doute encore attendre longtemps et faire de nouvelles découvertes avant d'apporter une réponse à cette question, si tant est que l'on puisse un jour y répondre. Mais quoi qu'il en soit, avec les découvertes de Qurta, c'est sans aucun doute un nouveau chapitre de l'histoire de l'art préhistorique de l'Afrique qui s'ouvre.

Lire l'étude

 

En pratique    

Lieu de la conférence
Musée de Préhistoire du Pech Merle
Cabrerets - Lot


Horaires :
Vendredi 25 mai 2018


Renseignements :
Entrée libre et gratuite
tel : 05 65 31 27 05

 

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