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Les peintures de la grotte Chauvet seraient bien les plus vieilles du monde
Publiant leurs travaux le lundi 7 mai dans PNAS, des chercheurs français ont établi les preuves géophysiques que l’entrée de la grotte Chauvet a été obturée naturellement il y a au moins 21 000 ans, ce qui relance le débat sur l’âge des peintures rupestres qui l’ornent et qui semblent bel et bien être les plus anciennes au monde.
Coupe de la grotte de Chauvet-Pont d’Arc. Au-dessus d’une couche marneuse (Marly ledge) en vert sur le dessin, une partie de la falaise s’est écroulée à plusieurs reprises, fermant l’entrée de la grotte. Les analyses géomorphologiques permettent de dater ces événements.
L’étude
Riche en peintures rupestres, la grotte Chauvet (Ardèche) avait son entrée obstruée par des éboulis lorsque des spéléologues la découvrirent en 1994, la corniche qui la surplombe s’étant écroulée dans le passé. Question : à quand remonte cet effondrement, interdisant l’entrée du site ? Pour le savoir, une équipe dirigée par Benjamin Sadier, (Université de Savoie / Cnrs), a soumis les éboulis à des analyses géomorphologiques, et la partie de la falaise restée en place au crible d’une datation au chlore 36 – qui permet de savoir depuis quand ce pan rocheux, suite à l’éboulement, s’est trouvé exposé à la lumière (solaire et cosmique). Résultat : plusieurs effondrements survenus entre -29 000 ans et -21 000 ans environ, condamnant l’accès. Un nouvel élément (béton…) de datation.
Une approche originale
« Nous apportons des arguments qui ne sont pas fondés sur l’archéologie (…). Nous nous sommes intéressés à l’effondrement lui-même, et l’avons considéré comme un événement à part entière, susceptible de nous éclairer sur l’histoire de la grotte », dit Benjamin Sadier, cité par le Figaro, parlant au nom de son équipe du Laboratoire environnements, dynamiques et territoires de la montagne (Edytem, Université de Savoie), aidée par le Centre de recherche et d’enseignement de géosciences de l’environnement (Cerege, Aix-en-Provence).
Il fallait y penser !… Jusqu’à présent, archéologues et anthropologues considéraient ce phénomène géologique comme une simple aubaine ayant protégé les peintures pariétales contre l’humidité et les contaminations
Un débat vivace
L’enjeu de ces travaux est de taille : l’âge des fabuleuses œuvres pariétales ornant l’intérieur de la grotte Chauvet est débattu depuis leur découverte. En soumettant au radiocarbone les débris, trouvés au sol, de pigment (ocre et charbon de bois) ayant servi de peinture, et les ossements fossilisés d’animaux présents, elles avaient été datées (indirectement) de -32 000 ans, pour les plus anciennes (époque dite aurignacienne).
Problème : des critères stylistiques et techniques, rapprochant ces œuvres de celles réalisées dans d’autres sites par les hommes de l’époque magdalénienne, bien plus récente (-17 000 ans, comme à Lascaux, à -10 000 ans), incitaient nombre de préhistoriens à contester ces dates très anciennes
Vers un consensus multidisciplinaire ?
Or, selon l’étude géologique d’aujourd’hui, depuis au moins 21 000 ans, l’intérieur de la grotte était inaccessible ! Impossible, donc, aux Magdaléniens, d’avoir réalisé ces peintures et ces sculptures… L’argument stylistique et technique tombant du même coup, les radio-datations de plus de 30 000 ans reprennent tout leur sens… (en fait, elles montrent une occupation aurignacienne de -32 à – 29 000 ans, puis une occupation gravettienne de -27 à – 24 500 ans). D’autant qu’aucune n’a recensé d’élément postérieur aux 21 000 ans (minimum) établis comme date ‘limite’ de l’éboulement. « Ça colle parfaitement », conclut Benjamin Sadier.
F. Belnet