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Des caries dentaires avant l’apparition de l’agriculture
Publiée dans PNAS, une étude anglo-marocaine portant sur des restes humains découverts au cours des 10 dernières années dans la grotte des Pigeons, au Maroc, montre la prévalence des caries et abcès dentaire au sein d’une population paléolithique d’il y a près de 15 000 ans, remettant en question l’idée que ces maladies sont apparues au Néolithique à cause d’un nouveau régime alimentaire basé sur les céréales.
L’étude
Le vaste site préhistorique de la grotte des Pigeons, à Taforalt, dans l’est marocain, recèle à la fois des sépultures contenant de nombreux squelettes fossilisés et une ‘décharge’ contenant divers restes alimentaires. C’est la denture de 52 de ces anciens occupants du complexe de cavernes (il y a 13 700 à 15 000 ans), ainsi que les reliefs de leurs repas qu’ont analysés des chercheurs du Muséum d’histoire naturelle de Londres, de l’Université d’Oxford, de l’Université John Moore de Liverpool (Royaume-Uni) et de l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine de Rabat (Maroc). Verdict : la plupart de ces Homo sapiens du Paléolithique supérieur souffraient de graves maladies dentaires dues à la consommation de certains végétaux sauvages.
Plus que de simples tracas dentaires
Excepté trois, tous les squelettes étudiés présentaient des dents cariées (ou atteintes d’autres lésions) à plus de 50 %, avec parfois de terribles abcès dentaires. « À un certain moment, le nerf de la dent meurt, mais jusqu’à ce moment-là, la douleur est très pénible et si vous avez un abcès, la douleur est atroce à cause de la pression sur la mâchoire. Ensuite, bien sûr, l’os finit par se perforer et l’abcès se répand. Et nous observons cela dans beaucoup des restes de mâchoires que nous avons étudiés », explique le Dr Louise Humphrey, du Muséum d’histoire naturelle de Londres. « […] Que pouvaient-ils manger qui a causé des taux si élevés de caries dentaires ? », se demande sa collègue Isabelle De Groote, introduisant ainsi la suite de l’étude.
La cause
Parmi les restes alimentaires également analysés, les chercheurs ont trouvé des pistaches, des pignons de pin et surtout des glands, sources de glucides dont se nourrissent les bactéries responsables des attaques acides sur l’émail dentaire. Des vestiges de meules à broyer ont également été découverts. « Les glands constituent des ‘packages’ de glucides facilement conservables. Nous pensons qu’ils les faisaient cuire, ce qui les rendait collants. Le processus de cuisson devait déjà commencer à fractionner les hydrates de carbone, mais la viscosité de cette nourriture la faisait littéralement se coincer dans les interstices dentaires. Et si vous aviez déjà des cavités [ou caries], cela devenait une sorte de cercle vicieux… », précise le Dr Humphrey.
Les caries ont précédé l’agriculture
« C’est la première fois que nous constatons une si mauvaise santé bucco-dentaire chez une population préagricole. […] Cette société a vécu trop tôt pour avoir compté sur une culture domestique », souligne Isabelle De Groote. Jusqu’à présent, il était généralement admis que l’invention de l’agriculture et donc la consommation de céréales, au Néolithique, il y a environ 10 000 ans, avaient déterminé l’apparition des caries et autres affections dentaires chez l’Homme. La nouvelle étude montre que ces pathologies pouvaient être déjà répandues parmi certaines populations du Paléolithique – peut-être déjà assez sédentaires, estiment d’ailleurs les chercheurs – il y a près de 15 000 ans. Accessoirement, elle a aussi mis en évidence l’existence… d’ablations dentaires (incisives), plus probablement rituelles que médicales.
Sources :
Sources :
BBC,
New Scientist
Equipe
Louise T. Humphrey
Department of Earth Sciences, The Natural History Museum, London SW7 5BD, United Kingdom;
Isabelle De Groote
Department of Earth Sciences, The Natural History Museum, London SW7 5BD, United Kingdom;
Research Centre in Evolutionary Anthropology and Palaeoecology, School of Natural Sciences and Psychology, Liverpool John Moores University, Liverpool L3 3AF, United Kingdom;
Jacob Morales
Grupo Investigación Arqueobiología, Centro de Ciencias Humanas y Sociales, Consejo Superior de Investigaciones Científicas 28037 Madrid, Spain; McDonald Institute for Archaeological Research, University of Cambridge, Cambridge CB2 3ER, United Kingdom;
Nick Barton
Institute of Archaeology, University of Oxford, Oxford OX1 2PG, United Kingdom;
Simon Collcutt
Oxford Archaeological Associates, Oxford OX4 1LH, United Kingdom;
Christopher Bronk Ramsey
Research Laboratory for Archaeology and the History of Art, University of Oxford, Oxford OX1 3QY, United Kingdom;
Abdeljalil Bouzouggar
Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine, Rabat-Instituts, 10 000 Rabat, Morocco; and Department of Human Evolution, Max Planck Institute for Evolutionary Anthropology, D-04103 Leipzig, Germany
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