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Cannibalisme néandertalien dans la grotte de Goyet
Les fouilles dans la grotte de Goyet, en Belgique, ont permis de déterminer un comportement cannibale entre Néandertaliens au nord des Alpes, au Paléolithique, il y a 40 500 ans…
La grotte de Goyet
Les grottes de Goyet se trouvent dans la province de Namur, en Belgique. Les premières fouilles ont été effectuées en 1865 par Edouard Dupont. L’ensemble des grottes de Goyet comprend plusieurs porches d’entrée et un large réseau de galeries. Il a été occupé pendant de longues périodes au Paléolithique : entre -120 000 et -40000 ans par Homo neanderthalensis et entre -20 000 et – 13 000 ans par Homo sapiens. Ces deux humanités ont laissé des traces de leurs passages : ossements d’animaux chassés et outils. C’est également dans la troisième caverne que les restes d’un chien ont été datés de – 33 000 ans, ce qui laisse penser que la domestication de cet animal est assez ancienne.
De nombreux restes humains trouvés il y a 150 ans font l’objet de nouvelles études par le Centre Senckenberg et l’Université de Tübingen. Les technologies plus récentes permettent d’obtenir des informations plus complètes, avec notamment les analyses isotopiques et génétiques.
Des restes de Néandertaliens utilisés comme outils
Au total, l’équipe a pu identifier 99 nouveaux fragments osseux comme appartenant à Néandertal. Ils ont été datés entre -40 500 et -45 500 ans par une méthode radiocarbone. Ceci fait de Goyet l’un des grands sites préhistoriques ayant délivré le plus de restes néandertaliens au nord des Alpes.
Avec l’analyse complète de l’ADN mitochondrial de dix Néandertaliens, les chercheurs ont doublé les données génétiques existantes sur l’espèce Homo neanderthalensis disparue il y a environ 30 000 ans. Ils confirment les résultats des études antérieures qui ont montré la relativement faible variation génétique entre les derniers Néandertaliens européens. Ils devaient être peu nombreux et étroitement liés les uns aux autres.
Certains des restes osseux de Goyet ont été utilisés et travaillés par des mains humaines : les ossements présentent des marques de coupe, des entailles et des encoches.
Quatre os de Goyet indiquent clairement que les Néandertaliens utilisaient les os de leurs proches décédés comme outils ; un os de la cuisse et trois tibias ont été utilisés pour façonner des outils lithiques. Les os d’animaux ont souvent été utilisés comme outils de débitage. « Que des os Néandertaliens aient été utilisés à cet effet est très rare, sur très peu de sites, et moins fréquent qu’à Goyet » dit Bocherens.
Des traces de boucherie, preuves de cannibalisme à la préhistoire
La présence des marques sur les ossement donnent aux chercheurs une indication que les corps dont ils sont issus ont été massacrés. Cela semble avoir été fait de manière systématique ; les restes indiquent un processus de dépouillement, de découpage et enfin de fracture afin d’atteindre et d’extraire la moelle osseuse.
« Ces informations nous permettent de supposer que les Néandertaliens ont pratiqué le cannibalisme », indique Hervé Bocherens. Mais il ajoute qu’il est impossible de dire si les restes ont été décharnés dans le cadre d’un acte symbolique, ou simplement pour la nourriture.
Il ajoute toutefois que « …les nombreux restes de chevaux et de rennes trouvés dans les grottes du Goyet ont été traités par les Néandertaliens de la même façon ».
Les chercheurs ont longtemps débattu de la pratique de l’anthropophagie chez les Néandertaliens. Elle était, jusqu’à présent, concentrée sur les sites d’El Sidrón et Zafarraya (Espagne), Moula-Guercy et Les Pradelles (France). La Troisième Caverne de Goyet est donc la première preuve de ce phénomène située au nord de l’Europe.
Les pratiques funéraires de Néandertal peu avant son extinction
Ces nouvelles recherches ouvrent de nombreuses possibilités en ce qui concerne la façon dont les derniers Néandertaliens traitaient leurs morts dans la période précédant leur disparition. Hervé Bocherens souligne toutefois que Goyet est le seul site néandertalien de la région où ces pratiques de boucherie et de cannibalisme sur les ossements humains ont été identifiées… Au contraire, les autres sites ont plutôt permis de trouver des traces d’inhumation dans des sépultures.
Les chercheurs indiquent également que d’autres gisements en Europe du Nord montrent que Néandertal avait, selon les régions, une grande variété et diversité d’outils de pierre.
« D’un côté, les grandes différences dans le comportement de ces populations, et de l’autre, l’étroite relation génétique entre tous les Néandertaliens européens, soulèvent de nombreuses questions sur la vie sociale et les échanges entre les divers groupes », conclue Bocherens.
Sources
Université de Turbigen
Sciencedaily
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