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Homo naledi est-il premier partout ? sépulture, gravure, utilisation de lampes , c’est lui ?
Homo naledi est-il premier partout ? Les premières sépultures, les premières gravures sur paroi, utilisation de lampes dans les grottes… tout ça c’est lui ?
Avant de publier les études, les chercheurs de la grotte de Rising Star, avec Lee Berger à leur tête, viennent de faire une annonce retentissante sur des pratiques funéraires attribuées à Homo naledi.
Depuis 2015 les fouilles de la grotte Rising Star en Afrique du Sud sont un véritable geyser d’informations en continu… Les découvertes s’enchainent et les polémiques s’accumulent également… Cela est dû au mode de communication du paléoanthropologue américain Lee Berger (Université de Witwatersrand, Johannesburg) qui préfère toujours lancer un communiqué de presse avant de publier ses études. Cela fait le buzz et fait réagir les médias et ses confrères !
Une sorte d’anti Indiana Johns ou le scoop prime sur l’information !
En 2013 en Afrique du Sud l’équipe du professeur Lee Berger fait une découverte dans un réseau de grottes très difficile d’accès aux boyaux tortueux et étroits. Ils mettent au jour plus de 1 500 ossements fossilisés d’hominidés. Ces restes appartiennent à une espèce jusqu’alors inconnue, aux caractéristiques étonnantes : une petite stature (1,5 mètre), des bras très longs, des doigts recourbés et un cerveau équivalent à 1/3 de la taille de celui d’un Homo sapiens. Les ossements appartiennent à 27 individus nommés Homo naledi, des adultes et des enfants de moins de 13 ans.
Les questions se sont multipliées concernant cette nouvelle espèce… Où faut-il la placer sur l’arbre des hominidés ? Pourquoi cette espèce s’est aventurée dans un réseau souterrain ? Comment progresser, avec quelle source lumineuse ? Les individus sont-ils venu mourir dans la cavité ou leurs corps ont été transportés ? Est-on en face d’une sorte de rituel ?
Le communiqué de presse se veut assez provocateur car il parle de premières tombes de la préhistoire mais également d’utilisation du feu et de gravures pariétales. Une véritable bombe de trouver toutes ces avancées culturelles et techniques dans un même lieu avec les restes d’une seule espèce dont on n’a trouvé aucun descendant !
Première tombe ?
L’équipe indique que l’étude du positionnement des restes osseux montre que certains individus étaient en position fœtale. Ce recroquevillement peut véritablement fait penser à une sépulture volontaire mais cette position est également une position de repos, « rassurante » chez les hominidés.
L’équipe de chercheurs souligne que 2 des squelettes ont été découvert dans des dépressions de forme ovales. Les sédiments retirés pour creuser sont les mêmes que ceux utilisés pour reboucher la cavité. Cela indiquerait des trous ont été creusés dans la grotte pour y déposer les corps. Cela pourrait être une première trace de dépôt funéraire… une première inhumation il y a plus de 200 000 ans ?
Utilisation du feu ?
Sur le sol la grotte les scientifiques ont découvert des petites brisures de charbon de bois, des ossements brûlés de plusieurs espèces dont du lapin et de la tortue. Sur les parois de la grotte, près de l’emplacement des fossiles c’est de la suie qui a été mise en évidence.
Il apparaît qu’Homo naledi devait dont pénétrer dans la grotte avec des charbons incandescents (une torche enflammée ?) afin de pouvoir progresser dans les boyaux. Il devait également apporter des animaux pour les consommer. Il est impossible de savoir si nous sommes face à un simple repas ou un rituel. Par ailleurs il est difficile d’attribuer de matière définitive cette découverte à Homo naledi…
Inscription sur les parois ?
En allant vers la chambre de Dinaledi, dans laquelle les corps ont été retrouvés le professeur Berger a remarqué des rainures sur la paroi d’un pilier. Il a ensuite échangé avec deux autres membres de l’équipe, Agustín Fuentes (Université de Princeton) et John Hawks (Université du Wisconsin). Pour les 3 chercheurs la conclusion s’impose : la gravure de Rising Star est très ressemblante au hashtag trouvée dans la grotte de Gorham (Gibraltar) attribuée aux néandertaliens.
L’anthropologue Agustín Fuentes, qui a participé aux recherches, déclare « L’enterrement, la création de sens et même l’art pourraient avoir une origine bien plus compliquée et non humaine que nous ne le pensions« .
Toutes ces découvertes devront être confirmées par la publication d’études validées. Et en raisonnement pur il est tout à fait possible que les Homo naledi de Rising Star utilisent le feu, fassent cuire leur aliments, enterrent leurs mort et gravent les parois des grottes… Il ne reste plus qu’à trouver des preuves pour transformer ces propositions en affirmations !
Premières réactions
En attendant, comme on pouvait s’attendre les réactions sont nombreuses… et c’est certainement ce que le paléoanthropologue Lee Berger désirait !
Pour la scientifique María Martinón-Torres, directrice CENIEH (National Research Center on Human Evolution) il apparaît que ces spéculations sont prématurées sur la base des éléments présentés jusqu’à présent. « Les hypothèses doivent être construites sur ce que nous avons, pas sur ce que nous devinons« .
Michael Petraglia, directeur du Centre australien de recherche sur l’évolution humaine déclare « Je suis très optimiste sur le fait que les Homo naledi pratiquent des enterrements, mais les preuves ne toujours pas là ». Le Dr Petraglia voudrait, entre autres, une analyse beaucoup plus détaillée des sédiments avant de juger si les ovales étaient des sépultures.
Cet avis est partagé par l’archéologue Paul Pettitt, (Université de Durham, Angleterre) qui déclare qu’il était possible qu’Homo naledi n’ait pas amené les corps, que ce soit pour les mettre en cache ou les enterrer. « Je ne suis pas convaincu que l’équipe ait démontré qu’il s’agissait d’un enterrement délibéré ».
Concernant les gravures et les morceaux de charbon de bois, plusieurs spécialistes ont déclaré qu’il n’était pas évident qu’Homo naledi en soit le responsable. Il est envisageable que ce soit l’œuvre d’une autre espèce (Homo sapiens ?) qui aurait pénétré dans la grotte des milliers d’années plus tard. « Tout cela n’est pas convaincant, c’est le moins qu’on puisse dire« , a indiqué l’archéologue João Zilhão (Université de Barcelone).
Septique, le paléontologue Antoine Balzeau » s’interroge : « la synthèse attendue repose sur des suppositions plutôt que des démonstrations« . Il souligne également que si des spéléologues ont pu se se déplacer dans les cavités, d’autres espèces d’hominidés ont pu pénétrer le réseau et donc modifier, graver les lieux… Avec une touche d’ironie Antoine Balzeau fait remarquer que la prochaine sortie d’un livre et d’une série Netflix ne sont peut-être pas étrangers à ces effets d’annonces…
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