Y-a-t-il des races humaines ? Pourquoi autant de couleurs de peau ?
Des races humaines suivant la couleur de la peau ?
Sommes-nous tous de la même race ?
Depuis plusieurs siècles, l’homme a tenté d’ordonner la nature et les êtres vivants en établissant des catégories, des groupes, des ordres. Dans un premier temps les seules différences anatomiques suffisaient à comparer deux populations, ce qui faisait classer les chauves-souris dans l’ordre des oiseaux sur le simple fait que les deux étaient dotés d’organes pour voler… !
Appliquée à Homo sapiens, cette méthode allait marquer pour longtemps les esprits ! La couleur de la peau, notamment, est toujours un sujet de conversation et parfois de conflits entre différentes populations…
Les anciennes tentatives de classification de l’espèce humaine basées sur des pratiques culturelles ou anatomiques continuent malheureusement d’alimenter aujourd’hui des théories racistes…
Historique des tentatives de classification humaine
Dans la Bible les hébreux classaient déjà les animaux selon des critères pratiques : purs et impurs, comestibles ou pas…
En 1684 le médecin et philosophe français François Bernier fut le premier à imaginer* qu’il existait quatre ou cinq races d’hommes avec une méthode assez simple et en partie géographique : selon le lieu et quelques critères de physionomie on peut distinguer des « races humaines » différentes.
On peut ainsi trouver la première race dans une zone qui comprend l’Europe jusqu’au Nil, l’Asie, la perse et les Maldives. Pour Bernier c’est la « race première » (dans laquelle, bien sûr, il se place !).
La seconde comprend le continent africain mais sans les populations situées les plus au nord et c’est donc une race noire et presque imberbe (et donc inférieure pour l’époque).
Ce sont les populations de Sumatra, des Philippines, de la Chine, du Gange (Inde), de la Moscovie et du Turkestan qui forment la troisième race.
La quatrième race est constituée uniquement des Lapons qui sont qualifié par Bernier de « vilains animaux ».
Pour finir Bernier parle d’une cinquième race, les habitants du continent américain, mais admet que leur « teint olivâtre » peut les rapprocher du premier groupe… Dans le texte d’origine la cinquième race était constituée uniquement des noirs du Cap de Bonne Espérance !
*« Nouvelle Division de la Terre par les différentes Espèces ou races d’homme qui l’habitent, envoyé par un fameux Voyageur à M. l’abbé de la *** à peu près en termes »
En 1758 Carl Von Linné proposa dans Systema Natura quatre variétés d’Homo sapiens, leur attribuant des caractéristiques peu scientifiques :
– les Americanus : rouge, colérique et droit
– les Europeus : blanc, sanguin et musculaire
– les Asiaticus : jaune pâle, mélancolique et rigide
– les Afer : noir, flegmatique et décontracté
Il distinguait également deux autres variétés fantaisistes : les monstrosus (êtres velus) et ferus (les enfants sauvages).
Carl Von Linné fut malgré tout l’un des premiers à tenter d’établir une recension des espèces.
En 1775, le naturaliste Johann Friedrich Blumenbach proposa, en s’appuyant sur Linné, une nouvelle classification des Homo sapiens : De generis humani varietate nativa. En 1795, il adopta définitivement la taxinomie suivante : la variété caucasienne à peau pâle (l’Europe), la variété mongole (Chine et Japon), la variété éhiopienne à peau sombre (Afrique), la variété américaine, et la variété malaise (Polynésiens, Aborigènes…).
La grande nouveauté de Blumenbach c’est qu’il établit une hiérarchie entre les variétés. Il place la variété caucasienne à l’origine des autres selon un critère très personnel : c’est le peuple le plus beau ! Les autres variétés sont une dégénérescence par rapport à cette population originelle (il faut prendre en compte qu’il emploie le mot dégénérescence dans le sens « écart par rapport à »).
Il indique toutefois que toutes les variétés d’hommes correspondent à une seule et même espèce : il défend le principe d’unité de l’espèce humaine.
Toutes ces tentatives de classification vont marquer les époques et notre façon de voir le monde. Nous en héritons et elles font partie de notre histoire. Certains utilisent encore ces théories (sans parfois les connaître !) à des fins racistes.
La science, la génétique nous prouvent que l’Homo sapiens est une race à part entière, sans sous-catégories… et nous ne pouvons pas faire de classification sur des critères aussi subjectifs que la couleur de la peau, la géographie, la culture ou la beauté d’un individu !
Définition de la race et de l’espèce
Dans la classification générale du vivant on parle d’espèce pour regrouper toutes les populations interfécondes et dont la descendance peut elle-même se reproduire.
La notion de race se base quant à elle sur la notion de « gènes communs et exclusifs à un groupe d’individus ».
François Lebas (Directeur de recherche honoraire de l’INRA) propose la définition suivante : … »au sein d’une espèce, une race est généralement considérée comme une collection d’individus ayant en commun un certain nombre de caractères morphologiques et physiologiques qu’ils perpétuent lorsqu’ils se reproduisent entre eux…«
Des races humaines ?
Aucune population humaine ne possède exclusivement des gènes propres. Les Homo sapiens forment une seule et même espèce. Les différences anatomiques que l’on perçoit, par exemple entre un individu asiatique et un européen, ne sont que l’expression plus ou moins forte de gènes communs.
Cette mixité génétique dans l’espèce humaine est tellement importante que si vous avez besoin d’un don d’organe ( un rein par exemple) il faut que vous ayez des antigènes compatibles sans que la couleur de peau rentre en ligne de compte. Cette comptabilité HLA (pour Human Leucocyte Antigen) ne fonctionne que si le donneur et le receveur sont très proches avec 6 à 10 antigènes compatibles. C’est donc généralement dans la famille très proche que l’on peut trouver l’oiseau rare !
Pour André Langaney (ancien directeur du Laboratoire d’Anthropologie du Musée de l’Homme) : « En fait, il n’y a pas de marqueur génétique de la race. On n’a jamais pu en isoler un qui soit présent, par exemple, chez tous les “Noirs” et absent chez tous les “Blancs”. Dès qu’on commence à définir une race, en cherchant des critères de classification, on n’en finit plus. Certains sont allés jusqu’à 450 ! S’il fallait pousser la classification à son terme, il faudrait définir une race par individu, car nous sommes tous différents« .
Les populations humaines forment un seul et même groupe taxinomique, une seule espèce.
L’espèce humaine, depuis quand ?
Les études génétiques démontrent que l’espèce humaine a une origine récente : il y a de très faibles variations génétiques entre les différentes populations humaines.
Pour illustrer cette petite différenciation, on peut comparer deux chimpanzés (pris au hasard) et deux humains. Les chimpanzés présentent plus de différences génétiques que les 2 humains entre eux… Leurs origines sont donc plus anciennes que la nôtre… (voir dossier Homme-singe)
Le nombre de gènes est sans rapport avec la taille ou l’importance que nous accordons à une espèce : 14 000 pour la mouche Drosophile et… 30 à 40 000 pour l’Homo sapiens…
Voir également : les évolutions d’Homo sapiens depuis 300 000 ans.
La couleur de la peau : une simple question de gène !
A droite La structure de la peau et lesCellules pigmentaires de l’épiderme ° ACCES (Ens Lyon)
Quelle que soit la couleur de notre peau, nous possédons tous des mélanocytes, produisant de la mélanine (pigment naturel) sous contrôle de nos gènes. Suivant sa concentration, ce pigment fonce plus ou moins notre épiderme. Parallèlement, la quantité et l’intensité des rayons solaires influent sur notre corps qui, pour se protéger, produit plus ou moins de mélanine : c’est le phénomène de bronzage.
Toutes les nuances sont représentées…
Les populations exposées de façon continue au soleil développent un « bronzage permanent » ! Si vous partez à pied d’une région sub-tropicale vers le nord, vous rencontrez, au fur et à mesure, des populations de plus en plus claires, sans rupture…
C’est donc graduellement que cette variation se déroule… du brun foncé au blanc-rosé. Il vous est alors impossible de déterminer à partir de quel moment un individu est blanc, noir ou jaune car toutes les nuances sont présentes et s’enchaînent !
Du marron foncé au blanc « cachet d’aspirine », tous les Homo sapiens ont la même origine (voir la galerie d’ancêtres).
Elle remonte à environ 7 millions d’années et se situe probablement en Afrique (Toumaï ?).
Le paléogénéticien Johannes Krause indique » Si l’on revient encore un peu plus en arrière dans l’histoire de l’humanité, on se rend compte que la peau foncée était elle aussi au départ une adaptation. Notre cousin, le chimpanzé, possède sous son pelage noir une peau claire. À mesure que l’homme perdait ses poils, sa couleur de peau s’est manifestement adaptée afin de protéger son corps désormais nu du soleil. Cette seule raison suffit à montrer qu’il est d’une grande bêtise d’invoquer la couleur de peau pour fonder quelque hiérarchie évolutive que ce soit. À moins que des individus à la peau claire n’aient à cœur de se réclamer d’une proximité génétique particulière avec les chimpanzés. »
Cela confirme que notre ancêtre commun avait une peau brune (pour résister au soleil) et de nombreux poils…« Malheureusement la peau ne se fossilise pas (!) et il y a peu de chance que nous retrouvions un jour des restes de l’épiderme de nos ancêtres !
Voir les travaux de Nina Jablonski sur les poils et la peau des hommes préhistoriques.
A lire également sur la couleur de peau…
2010 Reconstitution du visage d’un paléo-esquimaud, Inuk
2014 Un brun, mat de peau avec des yeux bleus en Espagne il y a 7 000 ans
2015 Une étude génétique de grandes ampleur sur l’ADN européen ancien
2015 Comment les européens sont devenus blancs de peau
2018 L’Homme de Cheddar, une peau sombre comme les autres Homo sapiens de l’époque
2022 Reconstitution du visage d’une jeune femme il y a 31 000 ans en République Tchèque
2023 Ötzi, nouvelle étude génétique de la momie la plus célèbre d’Italie
Le solei dans la peau Un livre de Jean-Marc Bonnet-Bidaud, Alain Froment, Patrick Moureaux, Aymeric Petit L’homme et le soleil : un lien amoureux, un lien dangereux. Depuis les premiers pas de l’homme, le soleil fait partie intégrante de sa vie et même de sa survie. Mais cette relation vitale est aussi risquée, comme en témoigne l’augmentation exponentielle des cancers de la peau. De fait, malgré les messages d’alerte concernant sa santé, l’homme a bien des difficultés à se passer de cette relation qui lui procure également bien-être et plaisirs. Sans oublier les apparentes contradictions des discours médicaux qui préviennent des risques de maladie et tout à la fois vantent les qualités anticancéreuses de la vitamine D induite par le soleil. Comment se faire plaisir sans mettre sa vie en danger ? Comment bénéficier des effets positifs et éviter les effets négatifs du soleil ? Quelles stratégies préventives devons-nous privilégier pour conserver notre capital solaire ? Ce livre pluridisciplinaire est né de la nécessité de proposer une nouvelle voie pédagogique pour inciter chacun à adopter un comportement solaire responsable et minimiser les risques sanitaires inhérents aux expositions solaires inadaptées. Il vous propose autour de cet organe méconnu qu’est la peau, reflet de nos origines, de notre affect, de notre bonheur, de nos tourments, de notre essence même, un voyage dans quatre dimensions : – l’astrophysique, qui s’interroge sur les mutations de notre carte d’identité chimique depuis les premiers temps de notre univers ; – l’anthropologie, qui nous permet de comprendre comment l’Homme a coexisté au tout début avec le soleil, puis comment dans son exil en Europe, il a dû s’adapter à la raréfaction des rayons ultraviolets nécessaires à la bonne marche de son métabolisme ; – la dermatologie, nécessaire pour établir les paramètres qui vous identifient en tant que candidat à risque ou non ; – l’addictologie, car le bronzage devient pathologique quand il est poursuivi et répété malgré la connaissance de l’augmentation de problèmes sociaux, psychologiques et physiques induits par cette pratique. En savoir plus sur Le soleil dans la peau | |