Premiers outils de la préhistoire
Les premiers outils utilisés par l’homme préhistorique
Définition du mot outil
(Dictionnaire de la Préhistoire – Sous la direction de André Leroi-Gourhan, PUF)
« Terme général donné aux objets par lesquels l’homme intervient sur la matière en prolongeant sa main afin de la spécialiser en fonction d’objectifs techniques à réaliser. »
La fabrication d’outils, une spécificité humaine ?
Pour le différencier du règne animal, on attribue souvent à l’homme, et à ses ancêtres, des capacités et des aptitudes spécifiques : le langage, le développement cérébral et surtout la fabrication et l’utilisation d’outils.
Toutes ces « différences » ne sont pas véritablement propres à l’homme, et l’on trouve toujours une espèce animale qui montre des capacités dans les domaines réservés à l’espèce humaine…
Tour d’horizon des outils de la Préhistoire.
Certains animaux aussi utilisent des outils
– le chimpanzé utilise des pierres pour briser des noix, comme devaient le faire nos lointains ancêtres. Ils leur arrive également d’utiliser des brindilles pour extirper et manger des termites.
– ses singes macaques japonais des îles Koshima « ont développé une attitude comportementale unique : ils lavent tous désormais leurs pommes de terre avant de les manger. Un individu a dû commencer à faire cela par conditionnement. Il y a vu un avantage, peut-être le sel de l’eau ou l’absence de terre… »
– les loutres de mer posent une pierre plate sur leur ventre et utilisent cette « enclume » pour casser des coquilles d’échinodermes (oursins).
– certains oiseaux (corbeaux, pinsons..) utilisent des brindilles pour extraire de leurs galeries des insectes.
– le macaque utilise des feuilles pour nettoyer ses aliments…
Toutefois, comme le souligne le préhistorien Nicolas Teyssandier « Si l’animal met à profit des formes naturelles en les aménageant parfois simplement pour les utiliser comme outil, l’Homme va inventer « l’outil à faire des outils » qui lui permettra de transformer en profondeur des matières premières naturelles pour créer des objets performants en constante évolution.«
Les premiers outils oui, mais seulement ceux qui laissent des traces…
La page va présenter les différents outils qu’on a pu retrouver. Les seuls qui sont parvenus jusqu’à nous sont forcément réalisés dans un matériaux qui ne se dégrade pas dans le temps.
Exit donc les outils en bois (ou très récents), en peau, en végétaux… Nous ne pouvons parler que des outils réalisés dans des matériaux durs et inaltérables : la pierre, l’os, l’ivoire.
Différents types de fabrication d’outils
Les outils primaires
Par outils primaires on entend les objets qui, sans transformation, sont utilisés comme outils. Ce sont donc des objets trouvés dans la nature, comme des pierres (pour taper), ou des feuilles (pour nettoyer ou essuyer).
Difficile de retrouver ce type d’outil lors de fouilles ou même de le reconnaître : utilisé à l’état brut, il ne se différencie que très peu d’un objet naturel. Seules des traces d’usure peuvent laisser apercevoir son ancienne utilisation.
Ces outils primaires sont fréquemment utilisés par des espèces animales (comme les chimpanzés par exemple).
Les outils secondaires
Les outils secondaires sont fabriqués avec l’aide d’un autre outil. Par exemple, une pierre utilisée comme percuteur qui permet de façonner une autre pierre et d’en faire un « couteau ».
Ces outils secondaires sont uniquement fabriqués par les hominidés.
Les outils composites
Les outils composites sont formés de plusieurs éléments qui forment un seul outil. C’est par exemple la fabrication d’un arc, d’une flèche, d’une hache ou d’une sagaie. Ces montages sont composés, en dehors des matériaux lithiques, de matériaux périssables comme le bois, le cuir, les fibres, la colle… On ne retrouve donc généralement que les pierres, galets et silex… il faut dont reconstituer le montage initial à partir des traces…
Ce type d’outil ne se retrouve que dans les évolutions « récentes » du genre Homo.
Les « métaoutils »
Un métaoutil est une notion plus complexe : c’est un outil qui permet l’amélioration d’un autre outil. Dans Les premiers outils (Pascal Picq et Hélène Roche) les auteurs citent en exemple « le cas de la petite pierre que les chimpanzés de Bossou calent sous une pierre servant d’enclume afin de la stabiliser« .
Les premiers outils
Le Lomekwien (-3,3 millions d’années)
La plus ancienne industrie lithique a été découverte en 2015 à Lomekwi dans l’Hadar au Kenya. On pensait généralement que seuls les représentants du genre Homo pouvaient fabriquer des outils. Hors, il y a 3,3 millions d’années on trouvait plutôt des australopithèques et des paranthropes en Afrique….
Mai 2015 : découverte d’outils au Kenya datés de 3,3 millions d’années !
L’Oldowayen (- 2.7 à – 1.3 Ma) – Le plus vieil outil retrouvé… le Chopper
Les plus anciens outils ont été utilisés il y a 2.3 à 2.6 millions d’années, au Paléolithique archaïque, en Afrique. On les retrouve principalement sur les sites de Gona Hadar (Ethiopie), Koobi Fora, Vallée de l’Omo et Olduvaï (Tanzanie). Ils sont regroupés sous la dénomination de culture ou de civilisation Oldowayenne.
Ces premiers outils, identifiés comme tels, sont des choppers, ce sont des galets (ou des blocs anguleux) présentant un bord tranchant. Si l’ouvrier travaille l’outil et dégage 2 faces de tranchant on nomme alors l’outil chopping-tool.
Dans les 2 cas ils ont été fabriqués par percussion avec une pierre ou un galet. C’est la culture sur galet ou « pebble-culture ». Les campements de l’Oldowayen sont le plus fréquemment installés près d’un fleuve et donc près de la matière première : le galet.
> En savoir plus sur l’Oldowayen
Qui a fabriqué ces premiers outils ?
Si l’on est assuré qu’Homo habilis fabriquait des choppers, certains scientifiques envisagent que les Paranthropes pouvaient déjà produire ce type d’outils. Il les utilisait principalement pour dépecer des charognes afin de se nourrir. Il est également fort probable qu’il pouvait nettoyer et récupérer les peaux pour se protéger du froid. Pour les plus anciens outils découverts à Lomekwi il serait possible que l’ouvrier tailleur de pierre soit un hominidé, Kenyanthropus Platyop, qui a vécu justement au Kenya y a -3,5 millions d’années…
Comme seul les restes d’un seul individu ont été découvert, on connait peu de choses sur cet hominidé à la face plate et aux petites dents.
L’Acheuléen (-1.6 à – 0.3 Ma) – L’avènement du biface
Ici encore, les premières traces de cette nouvelle technique se trouvent en Afrique. Les lieux de fabrication ont évolué : c’est maintenant loin des cours d’eau principaux que les hominidés s’installent : ils établissent leurs campements à l’abri des crues.
Il y a 500 000 ans la culture acheuléenne s’étend en Europe, puis au Proche Orient et en Inde.
Les outils ne sont plus seulement taillés avec un percuteur en pierre. Les tailles sont maintenant réalisées avec un percuteur tendre (comme le bois). Cette nouvelle technique permet une taille plus fine.
Le biface est un outil dont 2 faces opposées ont été travaillées afin d’améliorer le coupant de la « lame ». C’est parfois également un chopper dont le tranchant s’étend sur la majorité de la périphérie du galet.
Les plus anciens bifaces proviennent de la région d’Olduvaï, ils avaient une fonction de hache.
Le hachereau est un grand éclat avec une partie tranchante en biseau.
Pour la culture de l’Acheuléen on peut également citer le coup de poing : sorte de masse de forme arrondie.
C’est le site de Saint Acheul qui a donné son nom à cette industrie lithique. On attribue à Homo ergaster l’invention du biface symétrique.
Le polyèdre est un outil à enlèvements multidirectionnels qui donne à la pièce un sapent sphéroïde à facettes. Il pouvait servir de percuteur mais on peut imaginer que le préhistorique l’utilisait comme arme de jet.
Musée d’Archéologie Nationale – Photo Neekoo pour Hominides.com
800 000 ans, des outils en Chine ?
Des scientifiques ont mis au jour des outils en mars 2000 à Guangxi Zhuang dans le bassin de Bose, en Chine. Ils sont datés de – 800 000 ans.
Jusqu’à présent les plus anciens outils trouvés en Chine étaient datés au plus de 500 000 ans.
Ces outils sont de type acheuléens et attribués à Homo erectus.
Technique de Levallois
Après avoir débité le nucléus en de nombreux éclats, l’ouvrier va détacher d’un seul coup la lame qu’il souhaite obtenir. Cette technique nécessite une préparation afin de « penser » l’enchainement des opérations. On trouve des pointes et d’autres outils Levallois à partir de – 300 000 ans.
Le Moustérien ( – 200 000 à – 40 000 ans) – Les premiers outils composites
Dans les mêmes zones géographiques que l’Acheuléen, les outils sont de plus en plus travaillés. Les hominidés utilisent les éclats pour fabriquer des outils plus spécialisés et plus fins : pointes, disques, lames, burins, racloirs (figure de droite), grattoirs… Pour retoucher les éclats de silex, le préhistorique utilisait des os : les retouchoirs.
L’homme pensait son outil avant de la réaliser, détachant du nucléus des lames et des éclats dont la forme était « programmée ».
Tous ces nouveaux outils apparaissent au détriment du simple biface qui se raréfie.
La technique de Levallois est progressivement améliorée.
En Europe, cette industrie lithique est attribuée plus spécialement aux Néandertaliens et aux premiers Homo sapiens. Les premiers outils identifiés de cette période proviennent du site du Moustier.
Ces pierres taillées sont les premières à être combinées avec d’autres composants pour former des outils plus complexes : lances, flèches…
> En savoir plus sur le Moustérien.
Le Paléolithique supérieur ( – 35 000 à – 5 000 ans)
Châtelperronien, Aurignacien, Gravettien, Solutréen, Magdalénien
La spécialisation s’accentue, les cultures lithiques se succèdent de plus en plus vite. Les Homo sapiens utilisent maintenant également l’os pour réaliser des outils de plus en plus petits.
Grattoirs, couteaux, perçoirs, aiguilles, burins, harpons, propulseurs, arcs, hameçons… Tous ces nouveaux outils permettent de réelles avancées dans la vie quotidienne des hommes : la chasse et la pêche mais aussi l’habillement et l’éclairage sont facilités.
Châtelperronien (- 40 000 à – 35 000 ans)
Aurignacien (-35 000 à – 28 000 ans)
Gravettien (-28 000 à – 20 000 ans)
Solutréen ( – 20 000 à – 10 000 ans)
Magdalénien ( – 10 000 à – 5 000 ans)
Les période de ces différentes cultures semblent s’enchaîner de manières abruptes et soudaine… Dans la réalité, les cultures se chevauchent et sont souvent simultanément présentes sur le même site, sur la même période…
A partir de – 5 000 ans, une nouvelle ère commence : le Néolithique… et c’est une autre histoire…
à suivre…
CR.