La sauvegarde des grands singes
L’Homme avance, les singes reculent
Les grands singes font régulièrement l’objet de reportages dans les médias, dans la rubrique faits divers : massacre de gorilles, responsables de la diffusion du Sida, extinction des espèces… Il apparaissent également dans certains articles plus scientifiques qui tous montrent la grande proximité de ses primates avec l’Homme : utilisation d’outils, automédication, apprentissage d’un langage… Pourtant, malgré ces remous médiatiques, comme une échéance inéluctable, les grands singes semblent condamnés à disparaître de la planète.
A l’origine de cette disparition on retrouve presque toujours l’Homme. L’Homme qui conquiert tous les jours un peu plus la planète pour assurer son propre développement au détriment du biotope. L’Homme qui se bat en détruisant la faune qui le gène. L’Homme qui n’hésite pas à surexploiter les ressources naturelles sans se soucier de leur renouvellement. L’Homme enfin qui consomme les espèces de grands singes comme de la viande de brousse…
La sauvegarde des grands singes
Les parc nationaux contre la déforestation
Le moyen le plus logique pour sauvegarder les grands singes et leur habitat est la création de parcs nationaux : d’immenses zones où la faune et la flore sont protégées. Cela implique une exploitation de la forêt contrôlée ou simplement interdite, la formation et la création d’emplois de gardes forestiers, un développement régulé du tourisme (et de l’éco-tourisme). « Pour sauver les grands singes il faut avant tout une régulation mondiale (et réellement suivie) sur l’effrayante déforestation (problèmes des agrocarburants, de l’huile de palme, label du bois etc…) » déclare Marie-Claude Bomsel (MNHN).
En févier 2008, la République Démocratique du Congo (RDC), le Rwanda et l’Ouganda ont lancé une initiative dans ce sens. Le but est de créer une réserve de biosphère transfrontalière et protéger ainsi la très riche biodiversité qu’elles ont en commun et qui sert d’habitat aux grands singes, notamment aux gorilles de montagne.
Dans le Parc National de Virunga (RD Congo), les rangers qui protègent les gorilles risquent leurs vies : sur les 12 derniers mois, plus de 20 employés du parc ont été assassinés !
Les sanctuaires
Quand développement durable, écologie et protection de la biodiversité se télescopent.
Les sanctuaires sont des zones plus ou moins protégées (de petites tailles) qui permettent de recueillir les grands singes seuls ou abandonnés. Le plus souvent ce sont des animaux en bas âge.
Un bébé dont la famille vient d’être massacrée ne peut survivre seul dans le milieu naturel. Il est donc pris en charge par un sanctuaire qui va lui procurer une mère de substitution (généralement un habitant de la population locale) afin de lui permettre de se développer.
Malheureusement, même si le singe est sauvé il n’est pas évident qu’il puisse être réintroduit dans son milieu naturel. Habitué à l’homme et sans apprentissage maternel il sera souvent incapable de subvenir à ses propres besoins et d’intégrer un clan de congénères.
MC Bomsel : « … en attendant, les sanctuaires sont un moindre mal, et plus efficaces que les orphelinats qui ont montré leurs limites !«
L’éco-tourisme
Pour noircir le tableau, si ce n’était pas suffisant, les grands singes situés en Afrique se retrouvent très souvent au Parfois vivement critiqué l’écotourisme peut toutefois être une manière pérenne de sauvegarder les grands singes.
L’écotourisme permet de proposer une alternative économique aux populations locales. Le but est de leur proposer une autre source de revenus à la place de la déforestation ou du pétrole. De la même manière, l’écotourisme peut éviter que les grands singes soient une ressource alimentaire en proposant des emplois sur place (garde, éco-guide…).
Les locaux, du fait des revenus et des emplois créés, sont sensibilisés à la protection de leur forêt et de la faune qui s’y trouve. Il devient alors primordial pour eux de protéger leur patrimoine écologique.
Un exemple souvent cité d’écotourisme réussi est celui du Congo où la petite population de gorilles semble stabilisée grâce au développement de l’écotourisme.
MC Bomsel : « L’éducation et surtout l’intégration ainsi que l’aide économique aux populations locales permettront une réellle survie des grands singes dans leur milieu. En ce sens, l’écotourisme pourvoyeur de devises( si celles-ci ont des retombées ciblées régionalement) est une solution acceptable.«
Les zoos
Dans le passé les zoos avaient pour objectif de montrer la nature sauvage et « exotique » aux habitants des zones dites civilisées. Pour ce faire tous les moyens étaient bons pour agrandir les « collections », y compris les campagnes de chasse où plusieurs animaux étaient tués pour en ramener un seul !
Depuis la prise de conscience des sociétés occidentales les zoos ne pratiquent plus ce type d’approvisionnement. Les animaux vivant dans les zoos sont le plus souvent nés eux-mêmes en captivité ou font l’objet d’échanges entre parcs zoologiques.
Les zoos ont maintenant la volonté de participer activement à la protection des animaux en parrainant directement des associations sur le terrain, mais également en essayant de participer à la diversité génétique des espèces menacées.
MC Bomsel : » Quant aux Zoos, ils peuvent être de petits observatoires pour travailler scientifiquement et accueillir des animaux « ambassadeurs » permettant aux pays qui n’en ont pas, de prendre conscience de diverses menaces qui pèsent sur les grands singes. Leur gestion peut être correcte scientifiquement et génétiquement, mais ne permettra pas une conservation suffisante des espèces à long terme« .
Pour voir des grands singes en France vous pouvez visiter La Vallée des singes.
Comment chacun peut agir ?
Adhésion à une association, action, don
De nombreuses associations ont pour objectif la protection et la sauvegarde des grands singes. Sur le terrain, elles gèrent des sanctuaires, forment les populations locales, alertent et aident les gouvernements. C’est un travail de longue haleine qui nécessite de grands moyens financiers. En effet la plupart des grands singes se trouvent dans des régions qui ne bénéficient pas d’une économie florissante : les gouvernements ont d’autres préoccupations plus urgentes que la sauvegarde des grands singes…
L’achat responsable
Toujours pour le « plaisir » humain, il faut signaler la capture des petits singes revendus comme « animal de compagnie ». Outre le fait que les grands singes ne sont pas adaptés à ce type de vie, il faut savoir que :
Lorsque vous achetez des objets en bois et particulièrement du parquet ou des meubles de jardin, vérifiez que ceux-ci portent le label FSC garantissant que le bois est récolté légalement et qu’il provient d’une forêt gérée durablement. Ce label indique que l’exploitant est contrôlé : respect des populations locales, régénération de la forêt.
Eviter les produits qui nécessitant l’importation de matière venant des pays ou les grands singes vivent : huile de palme, thé, café, cacao, coton.
De la même façon, mais cela paraît logique, n’achetez pas d’animaux ou des objets dérivés comme des cendriers réalisés en coupant la main des gorilles. En participant à ce type de commerce vous encouragez la capture et la chasse des animaux.
Communiquer autour-de soi
Eh oui, c’est tout simple mais les habitants des pays occidentaux ne sont pas forcément au courant de ce qui se passe réellement. De plus les grands singes, c’est loin… et ce n’est pas une préoccupation première ! Vous devez donc parler autour de vous de ce drame ! A vos enfants mais aussi à vos amis à vos collègues… bref à tout le monde. Car tout le monde est concerné.
Si vous rencontrez de la « résistance », ou pire de l’indifférence, utilisez des arguments plus parlant comme la proximité génétique avec l’homme et toutes les possibilités médicales qu’elle suppose. Par exemple, certains singes sont porteurs sains d’une forme du virus du Sida. Sauver les grands singes c’est sûrement sauver l’homme.
L’éco-volontariat
Vous pouvez donner de votre temps et de vos connaissances pour participer, vous aussi à sauvegarde des grands singes.
Vous partez ainsi plusieurs mois en mission dans un sanctuaire, une réserve, une ONG afin de prêter main forte aux structures sur le terrain. Le travail est riche et varié : en plus du travail effectif avec les primates vous serez amené à faire de « l’utilitaire » comme des tâches ménagères…. Attention il ne faut pas considérer ce séjour comme des vacances ou une source de revenus car le plus souvent c’est vous qui réglez les frais occasionnés… L’éco-volontariat est à réserver aux personnes en bonne condition physique et fortement motivées : une fois sur place il serait dommageable pour tous de vouloir arrêter parce qu’il n’y a pas d’eau courante…
L’alerte
En voyage vous pouvez être témoin de situations mettant la vie de grands singes en péril : chimpanzés exposés dans une cage au milieu d’un restaurant, crânes de gorilles vendus sur un marché, particulier exhibant un bonobo comme animal de compagnie. N’intervenez surtout pas mais prenez tous les éléments possibles qui vous permettront de prévenir les autorités (adresses, noms, éventuellement photos…). Vous pouvez ensuite adresser votre témoignage aux associations qui elles seules choisiront le meilleur type d’action à entreprendre.
Toutes ces mesures ne peuvent fonctionner qu’avec une volonté forte des gouvernements locaux, une éducation des pays occidentaux pour ne plus considérer les forêts équatoriales comme un « supermarché » (bois, carburant, mines…), une prise de conscience globale des consommateurs (des citoyens) pour refuser l’exploitation industrielle des forêts et ses produits, une information claire et des solutions économiques pour les populations locales.
Attention également de ne pas reprendre des fakes news, comme fin 2021 ou des internautes ont lancé une pétition pour stopper l’euthanasie des gorilles dans les zoos.
Les sites internet de sauvegarde des grands-singes
- Le GRASP (Great Apes Survical Project) lancé par les Nations Unies en 2001 regroupe vingt-trois pays africains et asiatiques. Son but est de financer des actions de protection, d’études et de sensibilisation des populations locales pour la survie de grands singes. Il est également associé à l’UNEP et l’UNESCO.
- L‘IUCN publie une liste rouge des espèces menacées et réévalue chaque année son classement afin de montrer si les choses empirent ou s’améliorent.
- L’institut Jane Goodal et la Fondation Dian Fossey sont également présents sur le terrain et mènent des actions concrètes comme le financement de centres de recherches dédiés aux gorilles et aux chimpanzés.
- On peut également citer l’Orangutan Fondation International pour la protection des orang-outans et Kalaweit pour les gibbons.
- Ne pas oublier non plus le site de SFDP (Société Française De Primatologie) où sont présent de nombreux liens sur la protection de l’environnement et des primates en particulier
Voir aussi le dossier consacré aux grands singes ci-dessous :
Dossier grands singes
Origines et évolution des grands singes
Répartition des grands-singes actuels
Les grands singes en danger
La sauvegarde des grands singes
Entretien avec Emmanuelle Grundmann