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Cheval du Paléolithique
Le cheval à la préhistoire
Equus
Si les origines du cheval remontent à plus de 50 millions d’années (sur le continent américain), le cheval tel que nous le connaissons (en taille et en proportion) n’existe que depuis 4 millions d’années. Cette évolution est donc largement plus ancienne que celle des hominidés sur 7 millions d’années seulement. Ce sont des générations de chevaux qui ont ainsi vécu près des premiers hommes préhistoriques vivant en Eurasie. Si les rapports ont rapidement été ceux d’une proie et de son prédateur, ils ont évolué ces derniers milliers d’années vers une relation plus coopérative.
Le cheval de Przewalski, souvent présent sur les parois des grottes, a été chassé, domestiqué, et finalement sauvé in extremis de l’extinction par la conservation de l’espèce et sa réintroduction en milieu naturel. Les scientifiques pensent que l’espèce, constituée de plus de 2000 individus dans le monde, présente maintenant assez de diversité génétique pour que la population actuelle puisse survivre et se développer.
Origine et répartition géographique
Le tout premier représentant de la lignée qui allait mener aux chevaux est un animal qui vivait il y a 60 à 40 millions d’années en Amérique du Nord. Ce premier ongulé Eohippus (cheval de l’aube) mesurait 35 cm au garrot pour un poids de 5,5 kilos et était doté de quatre doigts aux pattes antérieures et trois aux postérieurs. Cet herbivore, qui devait vivre au milieu des sous-bois, est également appelé Hyracoterium. A noter que cet ancêtre des équidés n’est pas forcément reconnu comme tel par la communauté scientifique. L’évolution de la lignée correspond à un accroissement de la taille.
Un peu plus grand, Mesohippus (Oligocène) a perdu 2 doigts aux antérieurs et gagné 10 cm, ainsi qu’une capacité crânienne supérieure. Il vivait il y a 40 à 30 millions d’années en Amérique du Nord dans une environnement toujours boisé.
Merychippus (90 cm au garrot), vivait au Nord du continent américain il y a 16 à 5 millions d’années. Sa capacité crânienne augmente encore et surtout la forme de son crâne devient tout à fait ressemblante à celui des chevaux modernes.
C’est Pliohippus, (12 à 5 millions d’années) qui est à l’origine du genre Equus pliohippus, est encore plus grand (1,20 mètre au garrot) et adapté à un environnement de steppes.
Entre 23 et 2,5 millions d’années, les équidés vont « passer à l’ouest » du continent américain, vers l’Eurasie, en empruntant le pont continental du détroit de Béring qui s’est formé à plusieurs reprises lors des épisodes de glaciation. En plus du continent américain (Canada et Amérique du Nord) on trouve des restes fossiles de Pliohippus également en Eurasie (Chine).
Il y a 4 à 5 millions d’années, le genre Equus commence sa progression, aussi bien sur le continent américain qu’en Eurasie. On peut alors distinguer 4 sous-genres d’Equus : les chevaux, les ânes, le hémiones et les zèbres.
Au Paléolithique, dès les premières incursions en dehors de l’Afrique, les premiers hommes vont rencontrer Equus caballus silvaticus et Equus przewalski.
Ethologie
En se basant sur le mode de vie des équidés en liberté, il est vraisemblable que les chevaux du Paléolithique vivaient en groupe familiaux d’un côté et en bande d’étalons célibataires de l’autre. Le groupe « familial » sous forme de harem, avec un étalon, ses 8 juments et des poulains. Le groupe de mâles célibataires étant constitué quant à lui de 6 individus au maximum. Les mâles ayant atteint la maturité sexuelle quittaient le groupe pour constituer un nouveau harem.
Les chevaux ne migraient pas ; ils semblaient pouvoir s’adapter facilement à différents environnements (steppes, grandes plaines…). Herbivore, le cheval consommait principalement des herbacées, des graminées, des joncs et des roseaux. Leur important besoin en eau les obligeait à s’abreuver régulièrement dans les cours d’eau.
Rapports entre le cheval et l’homme
Présent en Eurasie depuis un million d’années, le cheval a été contemporain de plusieurs espèces d’hominidés : Homo erectus, Homo georgicus, Homo antecessor, Homo heidelbergensis, Homo neanderthalensis et Homo sapiens. Si les premiers devaient uniquement charogner les équidés, les Néandertaliens et les Sapiens pratiquaient différentes techniques de chasse et prélevaient ainsi leur nourriture dans les troupeaux.
On a ainsi découvert un grand nombre de restes d’équidés dans les gisements préhistoriques, avec parfois des os longs fracturés pour en extraire la moelle. Le cheval était une source de viande et de protéines, moins difficile et dangereuse à récolter que d’autres animaux (mammouth, rhinocéros laineux, bison…).
Le cheval devait donc être chassé par surprise sans lui laisser le temps de détaler et s’éloigner au galop. Comme pour d’autres animaux chassés, ce sont probablement les animaux malades, âgés ou très jeunes qui devaient être les proies les plus convoitées. Concernant les modes de chasse, il est maintenant confirmé par la communauté scientifique que la technique de « chasse à l’abîme » n’a jamais été mise en œuvre ; l’étude des restes du site de Solutré, référence pour cette hypothèse, a démontré que les chevaux ne s’étaient pas élancés dans le vide !
Les hommes du Paléolithique ne faisaient pas que consommer la viande du cheval, ils pouvaient également utiliser la peau pour confectionner des « vêtements », les os et les dents pour réaliser des armes ou des outils, ou même comme support artistique sculpté… La crinière ou la queue ont certainement dû être utilisés pour tresser des cordes ou des lanières…
Comme le renne, le cheval était probablement au centre de l’économie de subsistance et du mode de vie des hommes du Paléolithique : il apportait la nourriture mais également des matières premières indispensables (graisse, cuir, os, tendons, viscères, crin…).
La domestication du cheval
Jusqu’à récemment, les plus anciennes traces de domestication du cheval se trouvaient au Kazakhstan. Le cheval de Botaï avait ce statut car les chercheurs avaient trouvé les premières traces de liquide extrait de lait de jument (preuve de domestication). Une étude publiée en 2018 par le paléogénéticen Ludocovic Orlando et ses collègues du CNRS démontre que, contrairement à toute attente, le cheval de Botaï n’est pas l’ancêtre des chevaux modernes. Par ailleurs, il s’avère être un ancêtre du cheval de Prewalsky, qui avait donc été domestiqué avant de retourner à l’état sauvage… Génétiquement parlant, les chercheurs n’ont toujours pas retrouvé l’espèce d’équidé qui a été domestiquée la première.
Des restes de chevaux
On trouve des restes fossilisés de chevaux dans un grand nombre de sites. Les gisements de la Micoque et de Solutré ont délivré un très grand nombre de restes fossiles d’équidés, preuve de sa consommation par les hommes du Paléolithique. Ce sont le plus souvent des dents qui permettent de renseigner le mode d’alimentation de l’espèce et des os des membres qui sont, eux, indispensables pour retrouver le mode de locomotion. Ces restes permettent de reconstituer l’évolution de l’espèce et les grandes étapes, comme l’accroissement progressif de la taille, l’adaptation à la course rapide et la modification du régime alimentaire.
Le cheval dans l’art pariétal préhistorique
Le cheval est l’animal le plus représenté dans l’art pariétal. Le préhistorien Stéphane Petrognani indique : « les recensements de Georges Sauvet et André Wlodarczyk mettent en évidence le rôle numérique clé du cheval tout au long du Paléolithique supérieur. Il précise que le cheval arrive nettement en tête des motifs figuratifs ; il concerne en effet 31,6% des espèces déterminées… ».
Un exemple frappant est celui de Lascaux, qui, selon Norbert Aujoulat, cumule 364 représentations de cheval sur un total de plus de 900 figures dans la célèbre cavité. A l’inverse, dans la grotte Chauvet, qui est plus ancienne, le cheval ne compte que pour 14% des représentations, derrière les lions, les mammouths, et le rhinocéros. Une preuve supplémentaire que les hommes ne peignaient pas forcément ce qu’ils chassaient le plus !
On trouve le cheval dans l’art pariétal de toutes les époques, représenté en utilisant toutes les techniques possibles : peinture, gravure, sculpture (haut relief). Le côté souvent naturaliste des représentations de chevaux pourrait laisser penser qu’il est facile d’identifier l’espèce peinte ou gravée. Si cela est vrai pour certaines caractéristiques, comme la forte mâchoire et la crinière hérissée du cheval de Przewalski, il n’est pas facile de savoir si « les détails réalistes sont le fruit d’une observation anatomique, une tradition stylistique ou une convention graphique » (Pierre Cattelain, Disparus, Les mammifères au temps de Cro-Magnon).
Cheval et art mobilier
Le cheval est un thème plus ou moins fréquent de l’art mobilier. On le retrouve en sculptures, gravures, parures, contours découpés sur de nombreux matériaux comme les dents, l’ivoire, l’os. Rarissimes à l’Aurignacien, les représentations de cheval dans l’art mobilier sont un peu plus présentes au Gravettien puis au Solutréen, et deviennent fréquentes au Magdalénien. Pour Pierre Cattelain, le cheval dans l’art mobilier du Magdalénien « devient le thème principal, dépassant souvent 25% des sujets traités ».
Les restes fossilisés des équidés sont également utilisés comme support de l’art mobilier. Les incisives de chevaux (Grotte de la Marche) mais également le stylohyoideum (Grotte du Mas d’Azil) sont striés ou découpés pour fabriquer des éléments de parure.
Os (hémicôte)
Vers – 17 000/ – 14000 ans
Abri de Laugerie-Basse (Les Marseilles)
Les Eyzies, Dordogne
Musée de l’Homme – MNHN
C.R.
A lire sur le cheval et les animaux ayant côtoyé l’Homme préhistorique
Eric Buffetaut