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Bison des steppes
Bison à la préhistoire
Bison priscus
Pour la majorité des personnes, le bison n’est pas assimilé à un animal préhistorique. Soit il est vu comme un simple animal de boucherie, soit il est assimilé à l’animal symbole de l’époque du far-west en Amérique du Nord ! Et pourtant, le bison actuel est le descendant d’une longue lignée d’espèces venant des âges anciens du Pliocène supérieur. Il est donc logique de le classer parmi les animaux du Paléolithique qui ont cotoyé l’Homme préhistorique.
Animal au physique impressionnant, il ne devait pas être facile à chasser, mais il a su interésser les hommes du Paléolithique qui l’ont représenté à de nombreuses reprises sur les parois des grottes, en France et en Espagne, mais également sur des restes osseux ou de l’ivoire.
Origines et extinction du bison des steppes
Le genre Bison apparaît en Chine et en Inde il y a plus de 2 millions d’années. A partir de l’Asie, Bison Priscus s’est déployé sur l’Europe depuis 500 000 ans, de l’Espagne à la Russie. Dans l’ombre de Bison Priscus une autre espèce était aussi présente en Europe, mais avec moins de succès, le Bison schoetensacki. Ce dernier s’est éteint sans descendance connue il y a 10 000 ans.
De récentes études génétiques (2016) sur des restes de bisons de -15 000 ans montrent que le génome des animaux provient à 90% de l’espèce Bison Priscus et à 10% de Bos primigenius ! Autrement dit, les bisons européens Bison bonasus du Paléolithique étaient issus d’une hybridation avec des aurochs ! Non seulement cette hybridation (estimée à – 120 000 ans) donnait des animaux viables mais ils étaient eux-mêmes fertiles, ce qui est rarissime… Sur les fresques paléolithiques, les préhistoriques ne s’étaient donc pas forcément trompés quand ils représentaient des bisons très différents, car les deux espèces ont probablement arpenté les plaines européennes au même moment.
Actuellement, il reste des bisons en Amérique du Nord à l’état sauvage (Bison bison) mais en Europe c’est une autre espèce, Bison bonasus, qui a été réintroduite en Pologne (forêt de Bialowieza) et en Russie (forêts de Orel-Briansk-Kaluga et de Vladimir). En semie liberté, les bisons se développent mais rencontrent des problèmes de consanguinité qui appauvrissent la diversité génétique.
Le Bison des steppes disparaît des stratigraphies il y a 10 000 ans environ, à la fin de la dernière glaciation. Bison schoetensacki s’éteint également à la même période.
Caractéristiques des bisons des steppes
Le Bison des steppes est un ruminant appartenant à l’orde des artiodactyles. Ce bovidé est donc proche d’une autre espèce, l’aurochs. Bison Priscus peut mesurer jusqu’à 2 mètres de hauteur au garrot, 3,5 mètres de longueur totale et peser une tonne. C’est un animal puissant et massif. Sa tête est large et surmontée d’une paire de longues cornes coubées vers le haut. Les dents de l’animal sont à croissance continue.
La partie antérieure de l’animal, plus développée que les parties postérieures, est renforcée par une encolure massive et une protubérance marquée (bosse dorsale).
Le corps est recouvert d’une sorte de toison épaisse qui se détache par plaques à partir du printemps. Cette particularité est confirmée par certaines figurations dans l’art pariétal, comme à Lascaux.
De manière globale, le dimorphisme sexuel était très accentué chez Bison priscus : les mâles sont plus grands et plus lourds que les femelles. La tête est également plus large et pourvue de cornes plus importantes.
Une étude publiée en 2023 permet une étude approfondie de la graisse sous-cutanée des bisons au paléolithique.
Zoom sur les fragments de graisse sous-cutanée du bison de Yukagir. Il existe des zones claires et sombres, qui correspondent à différentes étapes de la conservation des graisses. La zone claire dite white (blanche), correspond à un état intermédiaire de formation d’une structure appelée « adipocire », qui correspond au résultat d’une saturation en acides gras insaturés. La zone brown (brune) foncée est la graisse primitive, qui contient des poils (hair), et les acides gras inchangés. Etude The PUFA-Enriched Fatty Acid Profiles of some Frozen Bison from the Early Holocene found in the Siberian Permafrost 2023
Mode de vie
Vivant en troupeau, cet herbivore ruminant se nourrissait en majorité de graminés, de plantes herbacées ou de lichens dans les plaines steppiques de l’Eurasie. Dans les périodes froides il devait également récupérer les écorces des arbustes pour compléter son alimentation.
Ethologiquement, si l’on se base sur les bisons actuels, on devait retrouver une organisation sociale identique : les troupeaux principaux sont constitués de vaches et de veaux… les taureaux sont soit solitaires ou en petits groupes satellites.
Dans les plaines, le bison des steppes croisait de gros mammifères, comme le mammouth ou le rhinoceros laineux, mais également des chevaux et des cervidés.
Le bison et l’homme
Bison priscus était une proie de choix pour les hyènes, les lions, les loups et probablement les hommes. La découverte d’ossements dans de très nombreux sites paléolithiques prouve que le bison était au minimum charogné, voire piégé, ou même chassé par l’homme. Mais le bison était rarement l’animal le plus consommé.Pourtant, comme le renne, l’animal entier était utilisé par l’Homme préhistorique : la viande comme nourriture, les tendons et les os comme matière première pour réaliser des outils, la peau comme protection contre le froid (vêtements, « couvertures »…). Il a cotoyé l’homme de Néandertal au Paléolithique moyen et Homo sapiens au Paléolithique supérieur. Les ossements présentant des traces de découpes sont le plus souvent ceux des rennes, des bisons, des cervidés.
Pour le préhistorien Jacques Jaubert, une chasse paléolithique au bison se préparait … »près d’un lieu qui deviendra Mauran, les hommes se sont mis d’accord : on a désigné le meneur, les quatre guetteurs, la poignée de rabatteurs et ceux qui auront la lourde charge d’abattre les jeunes bisons ou les femelles après qu’ils ou elles auront été détournés du troupeau au moment du franchissement du gué« …
Le bison dans l’art préhistorique
En art pariétal, le bison est en second rang dans l’ordre des espèces figurées, juste après le cheval : ce dernier représente 30% du corpus général alors que le bison moins de 20%. C’est par ailleurs ces deux animaux qui sont le plus souvent représentés en association.
Au total, plus de 800 représentations de bisons figurent en peintures ou en sculptures dans les grottes ornées. Il faut noter que le bison n’est pas présent de manière homogène dans les grottes. Il est parfois l’animal majoritaire et parfois il n’existe pas. Par ailleurs, certaines représentations n’ont pas pu être identifiées formellement car les différences avec l’aurochs ne sont pas reconnues. La grotte de Font-de-Gaume, à elle seule, contient plus de 50 représentation de bisons ! A Niaux, c’est 54 bisons qui sont répertoriés… La grotte d’Altamira, en Espagne, est réputée pour ses 25 représentations de bisons qui recouvrent le plafond de la cavité. Sur la frise de l’abri de Cap Blanc 3 bisons ont été identifiés. Le Tuc d’Audoubert est lui seul détenteur d’un moulage préhistorique d’argile figurant plusieurs bisons.
Sur les parois des grottes
Gravures et moulages
Le bison représenté dans l’art mobilier
En art mobilier, le bison est moins fréquent. Il apparaît toutefois sur un certains nombre de bâtons percés et propulseurs. Le plus connu des bisons en art mobilier est celui de la Madeleine où l’artiste a utilisé la forme du bois de renne pour graver un animal qui de retourne pour se lécher le flanc, attitude très fréquente de l’animal. L’objet faisait peut-être partie d’un propulseur.
Sur plusieurs objets ornés d’un bison, l’étude montre que l’artéfact était recouvert partiellement ou totalement d’ocre, comme le propulseur du Mas d’Azil, ou le bison sculpté de Zaraysk par exemple..
Où voir des restes ou reconstitutions de bisons ?
Le bison s’étant déployé sur la presque totalité de l’Eurasie. Il est fréquent de trouver des restes fossilisés dans les gisements. Ils sont généralement exposés dans les musées avec le reste de la faune préhistorique. Preuve que le bison était une proie pour certains carnivores, des ossements présentent encore les traces de morsures. Les reconstitutions de bisons sont plus rares car l’animal est beaucoup moins attractif et représentatif de la période… Un mammouth ou un rhinocéros laineux vont plus facilement attirer les plus jeunes…
A droite Sur le schéma les flèches indiquent la localisation des traces laissées par les carnivores sur les os de bison. Schéma du Musée de Solutré
C.R.
Sources
L’art des cavernes en action – M. Azema
Disparus ? Les mammifères au temps de Cro-Magnon en Europe – A. Smoldere, M. Gillard, P Cattelain
De chauvet à Lascaux S. Petrognani
Découpe expérimentale d’un bison – retrouver les gestes de la préhistoire 2011
The PUFA-Enriched Fatty Acid Profiles of some Frozen Bison from the Early Holocene found in the Siberian Permafrost 2023
A lire pour en savoir plus sur le bison et les animaux contemporains de l’Homme préhistorique
Eric Buffetaut