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Des restes de sang d’animaux sur des outils préhistoriques
Des chercheurs ont réussi à trouver des traces résiduelles de sang des animaux sur des outils de pierre utilisés au Paléolithique il y a 250 000 ans. On peut donc avoir une idée des menus des Hommes préhistoriques !
Le site
Il y a 250 000 ans, l’oasis à proximité d’Azraq, en Jordanie, était encore un lieu accueillant pour de nombreuses espèces d’animaux. Là-bas, une espèce d’hominidé vivait, chassait, buvait et se nourrissait de la flore et la faune environnante. Peu à peu les températures ont augmenté, le désert a avancé, allant jusqu’à recouvrir complètement la région.
C’est ici que l’anthropologue Avril Nowell et son équipe ont découvert des milliers d’outils de pierre. Au total, 10 000 outils lithiques qui ont été exhumés de ce site Jordanien en trois années de fouilles : bifaces, grattoirs, haches, projectiles… Comme pour toutes les découvertes de ce type d’outil, les chercheurs déterminent leur fonction en analysant la forme et surtout les traces d’usure ou d’utilisation.
A gauche : photo de l’un des outils de Lomkwi 3.
Des résidus de protéine
Sur une sélection de 44 outils les chercheurs ont pu en identifier 17 qui présentaient des traces de protéines (du sang et d’autres matières animales) . En utilisant un antisérum spécifique à différentes protéines animales, l’équipe a pu identifier les résidus laissés sur les outils. Les animaux consommés sont beaucoup plus variés qu’on ne pouvait le penser : cheval, rhinocéros, canard et bœuf sauvage semblent avoir été au menu de ces ancêtres de l’homme il y a 250 000 ans.
C’est la première fois qu’une équipe arrive à déterminer directement les animaux dépecés par des traces de protéines sur des outils préhistoriques aussi anciens. En revanche, il n’est pas possible de dire si les animaux ont été chassés ou charognés.
Un comportement très sociable
Pour les chercheurs et leur responsable il apparaît clairement que cette découverte démontre que ces hominidés appartenaient à une société plus organisée qu’on ne le pensait.
« Ce que montre cette étude est que ces premiers hominidés utilisaient une grande variété de techniques pour exploiter ce genre d’animaux » indique Nowell. « Cela pourrait sembler évident, mais la façon dont vous abattez un rhinocéros est très différente de la façon dont vous tuez un canard ! ». Il faut également beaucoup de coordination pour dépecer un rhinocéros ou un cheval tout en éloignant les autres prédateurs. Ce genre de « travail » nécessite une organisation avec plusieurs chasseurs qui ont chacun une mission et qui bien sûr utilisent une forme de communication…
» Cela nous en apprend beaucoup sur leur mode de vie et les stratégies complexes mises en application pour la survie : techniques spécifiques pour l’exploitation des proies, pour l’évitement des prédateurs et pour la protection des carcasses de nourriture. Cela diverge significativement de ce que nous pouvions attendre de cette espèce d’ hominidé qui vivait il y a 250 000 ans et aujourd’hui éteinte » précise Avril Nowell.
D’autres sites à étudier ?
Par rapport à la technique utilisée par cette étude, il faut peut-être réétudier d’autres outils lithiques sur d’autres sites, ce qui donnerait de nouvelles informations sur le régime alimentaire des hominidés. Pour Avril Nowell « D’autres chercheurs avec des outils aussi vieux ou plus âgés et même d’autres paramètres environnementaux pourraient également avoir des résultats probants lors de l’application de cette technique, en particulier en l’absence de restes d’animaux sur ces sites ».
C.R.
Sources
Middle Pleistocene subsistence in the Azraq Oasis, Jordan: Protein residue and other proxies
A. Nowella, C. Walker, C.E. Cordova, C.J.H. Ames, J.T. Pokines, D. Stueber, R. DeWitt, A.S.A. al-Soulima
ScienceDirect
ScienceDaily
DailyMail
Eric Buffetaut