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Des gravures préhistoriques datées de 14 000 ans en Bretagne à Plougastel-Daoulas (Finistère)
C’est une petite révolution pour la Bretagne où n’avaient pas encore été trouvées de gravures de ce type et de cette époque… L’étude du Rocher de l’Impératrice a été publiée dans la revue scientifique PlosOne.
Le site préhistorique du Rocher de l’impératrice, à Plougastel-Daoulas, est connu depuis 1987. Lors de la tempête exceptionnelle entre le 15 et le 16 octobre, un pin maritime a été déraciné, découvrant sous la souche les prémices d’un site archéologique. Quelques pointes de petits silex ont été ainsi identifiées et apportées au conservateur du patrimoine. Faute de moyens, le site est resté ainsi « sous surveillance » pendant une trentaine d’années en essayant d’éviter les pillages et les dégradations.
Enfin, en 2013, des chercheurs ont obtenu l’autorisation de fouiller le sol avec une contrainte supplémentaire : seuls des moyens manuels peuvent être utilisés. En effet, la topologie des lieux et surtout son classement en « zone naturelle », ne permettent pas le travail de pelleteuses.
Photo N.Naudinot
Un gisement préhistorique
Pour l’été 2013, toute une équipe d’archéologues dirigée par Nicolas Naudinot (Université Côte-d’Azur CNRS-CEPAM) commence sa première campagne de fouilles de la cavité, au pied de la falaise.
En déblayant l’abri sous roche, les chercheurs ont pu dégager les premières plaquettes gravées, des pointes de flèches, des couteaux et divers autres outils préhistoriques.
Grâce aux morceaux de charbon prélevés dans la stratigraphie, la date de dépôt des plaquettes dans le site a été estimée (pour les plus anciens) entre 14 935 à 14 270 ans BP.
Il y a 14 000 ans, ce site était à 50 kilomètres de la mer. Pour les archéologues, l’abri devait servir, à cette époque, de campement de chasse pour quelques individus seulement.
Les archéologues n’ont pas voulu communiquer immédiatement sur ces découvertes pour éviter que le site ne soit à nouveau pillé par des vandales… Ce type de site, en pleine nature, est particulièrement difficile à sécuriser entre deux campagnes de fouilles.
Images : Burins trouvés au Rocher de l’Impératrice (relevés F. Blanchet).
Les gravures
Au total, les chercheurs ont exhumé 4 659 artefacts lithiques, dont 45 plaquettes de schiste, de 15 à 30 cm de long. Ces plaquettes sont gravées de représentations d’animaux et de motifs géométriques. Dans les gravures apparaissait une matière noire (charbon noir) qui devait à l’origine permettre de souligner le motif. Toutes les plaquettes n’ont pas été nettoyées afin de permettre des études ultérieures.
Si un certain nombre est brisé et moins « lisibles », deux des plaquettes sont très particulières, par la qualité de la gravure et également par le motif représenté.
L’aurochs rayonnant
Les représentations d’aurochs dans l’art préhistorique sont nombreuses mais celle de Plougastel-Daoulas est la seule dont la tête de l’animal est comme hérissée de rayons solaires. Pour Nicolas Naudinot « La figure de l’aurochs rayonnant est unique. C’est la première fois dans la Préhistoire européenne qu’on découvre un animal accompagné de ce type de figure schématique (l’auréole). Cela induit une symbolique très forte». Comme le notent les chercheurs, les rayons ont été gravés après la figure de l’aurochs, ce qui a obligé l’artiste à repasser dans les traits des cornes.
Sur l’autre face de la plaquette figure une autre tête d’aurochs, mais là, sans auréole. L’animal regarde vers la droite (à l’inverse de l’autre face). La position des cornes est également différente et sur cette face les cornes semblent s’élever au-dessus de la tête de l’animal, donnant un autre angle de vue.
Sur les deux faces de cette plaquette les gravures sont profondes et donnent un effet de champlevé.
Les chevaux
Une autre plaquette est également gravée sur ses deux faces, mais avec des chevaux.
D’un côté un cheval complet est gravé regardant vers la droite. Deux traits verticaux sont positionnés à l’arrière de l’animal mais ne correspondent probablement pas à sa queue. Un autre trait vertical est placé devant la tête.
Sur l’autre face figure un cheval à l’arrière-train estompé dont la tête semble se refléter dans une flaque d’eau. En effet, la tête d’un autre cheval est en symétrie axiale sous la première. Entre les pattes du train arrière du cheval, on découvre, dans une gravure moins prononcée, la tête et l’encolure d’un troisième cheval…
Les archéologues indiquent «On a été bluffés par la beauté de ces gravures, par la maîtrise du geste pour l’époque. Ce sont des animaux très stylisés : on discerne les sabots, la crinière, un jeune poulain… C’est très parlant». Pour l’ensemble des plaquettes gravées apparaît une certaine homogénéité démontrant que le corpus entier peut-être attribué au Paléolithique supérieur et plus précisément à l’Azilien.
En France, moins d’une douzaine de sites préhistoriques ont produit ce type d’artefacts gravés dont la plupart proviennent de contextes incertains. Parmi eux, il existe seulement trois collections d’art mobilier qui peuvent être attribuées à l’Azilien : les 82 artefacts lithiques gravés de l’abris sous roche Murat (Lot), les cinq galets gravés du gisement Le Closeau (Hauts-de-Seine) et un caillou gravé de Bois-Ragot (Vienne). Cette découverte à Plougastel-Daoulas est donc d’une très grande rareté et sa situation dans le Finistère est une première.
C.R.
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