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De très anciennes perles… à Hohle Fels au Paléolithique
De très anciennes perles… au Paléolithique C’est encore la grotte de Hohle Fels qui délivre une superbe preuve du savoir-faire des hommes du Paléolithique. Le professeur Nicholas Conard a exhumé des perles façonnées dans de l’ivoire de mammouth. |
Dans le Jura Souabe plusieurs grottes karstiques ont déjà permis de recenser un grand nombre d’objets du Paléolithique. Parmi ces cavités, la grotte de Hohle Fels a déjà fait l’objet d’un grand nombre de publications. Les découvertes s’enchaînent au fur et à mesure de l’avancée des fouilles menées par le professeur Nicholas Conard de l’Université de Tubingen. Depuis 2001 avec la découverte d’un oiseau sculpté et d’une tête animale dans l’ivoire de mammouth, de très belle pièces et outils ont été mises au jour : un phallus (2005) une vénus sculptée et des flûtes (2008), un outil pour probablement tresser des cordes (2016). Ces artefacts, tous datés de l’Aurignacien (35 000 ans et plus) montrent que la grotte de Hohle Fels présente un grand intérêt archéologique et la positionnent comme un gisement majeur de cette période. Par ailleurs, les nouvelles perles découvertes ressemblent à celles déjà trouvées dans la même région, dans les vallées de Lone et Ach.
Des perles en ivoire de mammouth
Au total, les fouilles à Hohlen Fels ont permis de comptabiliser 40 éléments de parure, ce qui est extraordinaire pour un seul site, et qui fait dire à Nicholas Conard que c’est un chiffre presque « anormalement élevé » ! Ces artefacts ont été retrouvés dans les couches aurignaciennes de la stratigraphie et sont datées entre – 42 000 et – 34 000 ans. Elles peuvent donc figurer parmi les plus anciennes perles artisanales du Paléolithique.
Deuxième particularité : les « perles » sont doublement ou triplement percées, ce qui pourrait indiquer qu’elles pouvaient être utilisées autrement que comme parure préhistorique… Pour Nicholas Conard, cela pourrait être un système d’attache (comme des boutons). De forme allongée, les perles sont plus épaisses au centre et des entailles ont été réalisées pour isoler les perforations sur les bords.
Fabriquées dans de l’ivoire de mammouth, elles ont nécessité un long processus manuel de fabrication : extraction de l’ivoire, sculpture, perçage, ponçage… Toutes ces manipulations ont été compliquées par la petitesse des perles, entre 1 et presque 3 cm de long. Toute cette série d’opérations minutieuses démontre un grand savoir-faire mais également une planification des tâches. On peut même envisager une transmission des traditions, car les perles ont été retrouvées dans la stratigraphie sur une période de plus de 6 000 ans.
Pourquoi ces nouvelles formes ?
En plus de l’utilisation sous forme de bouton, le préhistorien Nicholas Conard pense que les habitants de la région ont peut-être cherché à se différencier d’autres clans « comme l’expression d’une concurrence avec l’homme de Néandertal ou en réponse aux changements environnementaux de l’époque ». D’autres scientifiques émettent l’hypothèse que les gens dans les vallées Ach et Lone ont produit ces nouvelles formes décoratives pour exprimer l’identité du groupe. Ce qui expliquerait pourquoi on ne trouve ce type de perles que dans la région…
« Cette forme n’a pas été partagée avec des humains d’autres régions, bien que les contacts existaient en Europe », explique Sibylle Wolf, coordinateur scientifique au Centre Senckenberg de l’Evolution Humaine.
L’archéologue Nicholas Conard sur un site archéologique dans le Jura souabe. Photo: Stefan Puchner / dpa« Grâce à ces découvertes, on peut même imaginer les rapports sociaux et les échanges entre les premiers Homo sapiens dans cette partie de l’Europe » a déclaré N. Conard.
C.R.
Sources
A Hohle Fels également
2009 La vénus de Hohle Fels
2016 Un outil pour torsader des cordes il y a 40 000 ans à Hohle Fels
2017 Des perles de 42 000 ans à Hohles Fels
2021 Des pointes à Hohle Fels… attribuées à Néandertal