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Cannibalisme au Magdalénien dans le nord de l’Europe : une pratique funéraire répandue ?
Cannibalisme dans le nord de l’Europe au Magdalénien : une pratique funéraire répandue
Cannibalisme et sépulture à la fin du Paléolithique supérieur en Europe : une étude associe les découvertes archéologiques et les preuves génétiques
En se basant sur la compilation de 59 études de sites européens des chercheurs arrivent à la conclusion que l’anthropophagie était une pratique funéraire courante dans le nord de l’Europe il y a environ 15 000 ans. Une partie de la population mangeait ses morts non pas par nécessité alimentaire mais sous forme de rite funéraire.
L’étude publiée dans la revue Quaternary Science Reviews suggère que la pratique du cannibalisme n’était pas un rituel isolé. Leurs recherches se sont concentrées sur la fin du Paléolithique supérieur sur la période comprise entre – 14 000 et – 23 000 ans. Il existait alors deux cultures dominantes en Europe occidentale, connue par leur production d’outils lithique et osseux : le Magdalénien au Nord et à l’ouest de l’Europe et l’Epigravettien au centre et au sud de l’Europe.
Étude des sites
Des scientifiques du National History Museum de Londres ont repris les différentes études disponibles de 59 sites ou des restes humains ont été retrouvés. Si la majorité de ces sites est située en France, on trouve également des sites en Espagne, en Belgique, en Allemagne, en Russie, au Royaume-Uni, en Belgique, en Pologne, en République tchèque et au Portugal.
Sur 25 de ces sites les chercheurs ont retrouvé des comportements funéraires : 13 présentaient des preuves d’anthropophagie, 10 des sépultures simple et 2 montraient des preuves combinées d’enterrement et de cannibalisme.
Le cannibalisme comme pratique funéraire
Selon les chercheurs, la manipulation rituelle des restes humains était fréquente sur les gisements archéologiques du nord et de l’ouest de l’Europe. Cela suggère que, pendant la période magdalénienne, le cannibalisme était plutôt une pratique funéraire répandue qu’une véritable source de protéines.
« Au lieu d’enterrer leurs morts, ces gens les mangeaient », explique le Dr Silvia Bello, experte en évolution du comportement humain travaillant au Natural History Museum. « Nous interprétons les preuves selon lesquelles le cannibalisme a été pratiqué à plusieurs reprises dans le nord-ouest de l’Europe sur une courte période, car cette pratique faisait partie d’un comportement funéraire diffusé parmi les groupes magdaléniens. »
Le comportement anthropophage était proportionnellement assez courant parmi les Magdaléniens du nord-ouest de l’Europe, mais il n’a pas duré longtemps. Il y a eu une « évolution » des pratiques funéraires vers un enterrement des morts. Ce comportement largement répandu dans le centre et le sud de l’Europe est attribué à une autre culture préhistorique : l’epigravettien.
Parmi les sites étudiés, les grottes de Gough dans les Gorges de Cheddar en Angleterre ont livré des ossements datés de – 15 000 ans : des crânes humains ayant servi de coupes et des os rongés par d’autres humains. C’est à partir de ces découvertes que les chercheurs Silvia Bello et William A Marsh (Centre for Human Evolution Research, Natural History Museum) ont démarré cette nouvelle étude.
Une autre pratique funéraire associée à une autre population
Les chercheurs ont ensuite repris les données génétiques des restes humains retrouvés sur les différents sites. Les professeurs Bello et Marsh cherchaient à savoir s’il existait des corrélations entre les populations et les pratiques funéraires.
Les analyses génétiques suggèrent que les deux groupes pratiquant des comportements funéraires différents étaient également des populations génétiquement distinctes. Tous les sites où des preuves de cannibalisme ont été trouvées montrent que les personnes faisaient partie d’un groupe génétique connu sous le nom de GoyetQ2, tandis que toutes les sépultures les plus ordinaires concernaient des personnes appartenant au groupe génétique Villabruna.
Si les deux groupes vivaient simultanément en Europe, les individus présentant une ascendance GoyetQ2 sont associés à la région autour de la frontière hispano-française, tandis que l’ascendance Villabruna appartenait à des individus de la région italo-balkanique. Cela sous-entend que lorsque les pratiques anthropophagiques ont pris fin et que les sépultures plus « simples » sont devenues majoritaires dans le nord-ouest de l’Europe, ce n’était pas à cause d’une diffusion de rites funéraires mais plutôt du remplacement des populations magdaléniennes par les populations épi gravettiennes.
« Ces études montrent, qu’à la fin de la période du Paléolithique, on constate un changement dans l’ascendance génétique et le comportement funéraire« , explique William Marsh. « L’ascendance et le comportement funéraire associés au Magdalénien sont remplacés par une ascendance et un comportement funéraire associés à l’Epigravettien, indiquant un remplacement de population à mesure que les groupes du sud-est ont migré vers le nord-ouest de l’Europe. »
Les chercheurs font remarquer que cela reflète la façon dont les chercheurs pensent que l’agriculture est arrivée au Royaume-Uni il y a quelques 6 000 ans.
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