Les squelettes de l’abri Cro-Magnon
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Les squelettes de l’abri Cro-Magnon
Datation et pathologie. Evolution des idées
par Brigitte Delluc et Dr Gilles Delluc
Deux questions sont souvent posées à propos des squelettes exhumés dans l’abri de Cro-Magnon : 1 – De quand date cette sépulture ? 2 – De quelles maladies avaient souffert les humains découverts en ces lieux ?
Le but des pages que voici est d’abord épistémologique : essayer de reconstituer les principales étapes ayant permis, non sans mal, de résoudre peu à peu ces problèmes en un siècle et demi.
Le lecteur trouvera, en outre, deux petites actualisations concernant la datation et la pathologie.
La ligne de chemin de fer Périgueux-Agen, via les Eyzies, a été inaugurée le 3 août 1863. C’est le 24 de ce mois que le paléontologue Édouard Lartet et son ami Henry Christy (1) débarquent aux Eyzies. Ils sont attirés en ce lieu par l’observation dans une boutique parisienne d’un bloc de brèche, contenant des silex et des os de renne : ce fragment de sol calcifié provient d’une grotte des Eyzies. Ils souhaitent en outre rendre visite au vicomte Alexis de Gourgues, qui, sur les coteaux du Bergeracois, recueille de nombreux objets préhistoriques. C’est ainsi que débute une fructueuse campagne : ils vont découvrir et fouiller les plus grands gisements de la vallée de la Vézère. Les résultats de ces investigations seront publiés dans les Reliquiae aquitanicae, being contribution to the Archaeology and Paleontology of Perigord and the adjoining provinces of Southern France. Ce gros livre d’É. Lartet et H. Christy paraîtra en anglais de 1865 à 1875, en 10 livraisons sous des signatures diverses (2).
Une découverte en deux temps
Cinq ans après l’expédition d’Édouard Lartet aux Eyzies, la découverte de la sépulture de Cro-Magnon survient à l’occasion de travaux de voirie : la création d’une nouvelle route (3) et non un aménagement ferroviaire comme on le dit souvent (4). L’entrepreneur François Berthoumeyrou est chargé de ce travail avec son demi-frère L. Delmarès. Vers la fin du mois de mars 1868, il fait attaquer par ses ouvriers un terrain taluté lui appartenant, au pied du rocher, à 130 mètres de la gare. Cela pour deux raisons : il veut extraire des sédiments (on dit ici de la castine) pour charger la nouvelle route ; peut-être veut-il aussi ouvrir dans ce talus (5) « le chemin destiné à remplacer celui que la voie ferrée avait fait disparaître ».
En fait, l’histoire a télescopé deux opérations effectuées sur ce talus. Il y avait eu, précédemment, pendant les travaux ferroviaires antérieurs à août 1863, une première extraction de sédiments par la Compagnie des chemins de fer d’Orléans (6) pour « l’établissement de la chaussée [sic] du chemin de fer qui amena l’enlèvement d’une partie importante du talus et celle d’un bloc gigantesque détaché du rocher », c’est-à-dire de l’auvent éboulé de l’abri supérieur (7). Le mot chaussée désignait la plateforme du chemin de fer et non la route. En mars 1868, c’est la deuxième opération, effectuée pour la route cette fois, qui conduira à la découverte.
Une précieuse aquarelle, figurant la coupe de Cros-Magnon [sic] par l’archéologue et agent voyer Maurice Féaux, reconstitue l’état initial des lieux et les deux opérations (8) (fig.1). Le rocher n’était pas vertical mais se creusait de deux abris sous roche superposés. Le toponyme « Cro-Magnon » désignait l’abri supérieur, largement ouvert, vide et visible de loin (9). En revanche, c’est dans l’abri inférieur, profond alors d’une douzaine de mètres, invisible car quasi totalement comblé et scellé depuis des millénaires sous quelque quatre mètres de sédiments, que se trouvait la sépulture, associée à une faune depuis longtemps disparue du Périgord (10).
Dans cet abri, les squelettes se trouvaient au sommet des sédiments, eux-mêmes séparés de la voûte par un mince espace vide. D’après la coupe de L. Lartet, le crâne de l’un d’eux (le « vieillard »), non totalement enfoui, affleurait à la surface. L’auvent de cet abri s’est effondré depuis : l’abri supérieur n’est presque plus visible ; l’abri inférieur est moins profond que jadis (11). C’est ce dernier qui porte désormais le nom de Cro-Magnon(12).
La découverte de ces squelettes, dans un milieu clos, accompagnés seulement d’objets de silex, d’ossements divers et de coquillages marins, prouvaient, pour la première fois, qu’on avait affaire à des squelettes préhistoriques : les restes de quatre adultes et d’un enfant, semblables à nous.
François Berthoumeyrou fait arrêter les travaux et prévenir Édouard Lartet (13). Ce dernier, se jugeant trop âgé (67 ans) (14), délègue son fils, Louis, géologue, pour effectuer l’exploration du site (15).
La découverte est présentée dès le 16 avril 1868 au Comité impérial des travaux historiques, et le 21 mai 1868, Louis Lartet donne une communication à la Société d’Anthropologie de Paris et il rédigera une publication détaillée dès 1868 et 1869, reprise presque intégralement et très bien illustrée dans les Reliquiae aquitanicae(16).
La datation des vestiges osseux de Cro-Magnon
Elle a été précisée en une douzaine d’étapes.
1 – De la même époque qu’Aurignac.
En 1868, Louis Lartet fouille l’abri et décrit 12 niveaux (A à K), dont 5 contenant des vestiges charbonneux qu’il nomme « foyers » (B, D, F, H et J), d’âge glaciaire, superposés sur 2,50 m de haut. Certains niveaux contenaient « des ossements brisés, brûlés et travaillés et des silex taillés suivant différents types ». La couche I, « de terre jaunâtre un peu argileuse, [contenait] encore des ossements, des silex et des instruments en os, ainsi que des amulettes […] et serait limitée à sa partie supérieure par une couche charbonneuse et très-peu étendue (J) (17), que M. Laganne a pu observer avant mon arrivée, mais dont ne n’ai pu retrouver que de simples traces »
Au niveau de la couche H, la hauteur disponible sous abri était de 1,50 à 2 m environ. La sépulture, « d’un âge immédiatement antérieur à l’époque artistique », se trouvait au fond de l’abri, au niveau de la très mince couche J, à la surface de la couche I, d’après la coupe de L. Lartet. À ce niveau, l’abri était haut seulement de 0,50 cm (fig. 2). Dans les Reliquiae aquitanicae, deux planches hors texte montrent des lames et grattoirs épais à retouche écailleuse comme ceux d’Aurignac (18). Rien n’évoque une époque plus récente.
L’année suivante, le texte de Louis Lartet, publié dans les Matériaux pour l’histoire naturelle et primitive de l’Homme (19), est orné d’une belle planche hors texte, représentant des objets provenant de la « grotte sépulcrale de Cro-Magnon » (20) : silex aurignaciens, pendeloques, coquillages, mais aussi deux harpons magdaléniens à double rang de barbelures. Heureusement, un erratum précise que ces harpons « sont d’une époque moins ancienne que la sépulture de Cro-Magnon ». Ils proviennent probablement de la Madeleine et ont été placés là par le graveur sans doute dans un but décoratif… (fig. 3)
La grotte d’Aurignac (Haute-Garonne) avait été fouillée en 1860 par E. Lartet, mais le mot d’Aurignacien ne sera choisi qu’en 1906, par H. Breuil et É. Cartailhac, pour désigner la première des grandes cultures du Paléolithique supérieur (21).
2 – Des pointes d’Aurignac au-dessus du Solutréen ?
Le nom d’Aurignac et le Solutréen apparaissent au terme des fouilles faites entre 1869 et 1873 à Cro-Magnon par le collectionneur Élie Massénat, industriel corrézien, venu « quelques jours après L. Lartet » (22). Pour lui, la stratigraphie de l’abri, au centre et à l’est (à droite) (23), est la suivante, de haut en bas : 1 – Éboulis superficiel ; 2 – Mince foyer avec pointes d’Aurignac ; 3 – Castine à petits éléments, stérile ; 4 – Couche solutréenne ; 5 – Éboulis de base (24). H. Breuil critiquera en 1912 cette « coupe apocryphe et fausse […], dont le caractère frauduleux est établi depuis six ans » (25)
En outre, dans une notule des Matériaux(26), É. Massénat signalait aussi avoir recueilli à Cro-Magnon une belle feuille de laurier (27). Pas du tout, ripostera l’abbé Breuil. Cette « pointe de lance » avait été offerte à Élie Massénat Louis Lartet, préhistorienpar Berthoumeyrou (probablement en 1869) : il l’avait trouvé dans la partie orientale du site, « contre l’angle du rocher sur lequel s’adosse l’hôtel, dont il est hôtelier […], à plus de trente mètres du gisement et tout à fait à la surface » (28). Massénat publia d’autres feuilles de laurier et des pointes à face plane (29).
Que représentait Aurignac à cette époque ? Cette petite grotte de Haute-Garonne avait été découverte en 1852 par le sieur Bonnemaison et étudiée en 1860 par Édouard Lartet. Celui-ci avait entrepris des fouilles : l’industrie originale, découverte dans une épaisse couche en avant de l’étroit porche, servait de base à sa classification naturaliste pour le Paléolithique supérieur. C’était « l’âge du Grand Ours des Cavernes », la période la plus ancienne de l’Âge du Renne (30).
Peu après, Gabriel de Mortillet introduisit fugacement l’époque d’Aurignac dans sa classification comme un « Solutréen dégénéré », entre celle de Solutré et celle de la Madeleine. La belle retouche aurignacienne des outils en silex et le façonnage des pointes de matière dure animale ne lui paraissent pas concevables avant le Solutréen (31). Mais il la supprima dès 1872. Cette classification de G. de Mortillet, reprise par son fils Adrien, fut alors adoptée par tous ou presque.
3 – Cro-Magnon en pleine bataille de l’Aurignacien
Mais Henri Breuil va s’opposer à cette conception dès 1905. Il décrit plusieurs sites comportant un niveau archéologique « présolutréen », avec de l’industrie osseuse et des outils en silex bien particuliers. L’année suivante, il déclenche la célèbre « bataille de l’Aurignacien », en présentant de nombreux gisements, dont Cro-Magnon, et en contestant très durement les conclusions d’Adrien de Mortillet, P. Girod et É. Massénat (32). Il propose le terme d’ « Aurignacien » pour nommer les industries trouvées entre les niveaux du Moustérien et ceux du Solutréen et sort victorieux de cette bataille « délétère ». Elle trouvera sa conclusion définitive dans Les subdivisions du Paléolithique supérieur et leur signification (33).
À Cro-Magnon, en 1897, l’abbé, lui-même, avait pu « gratter quelque peu » dans l’abri de Cro-Magnon avec Gaston Berthoumeyrou (34), lors de son premier voyage en Dordogne. Il y avait vu « les couches actuellement connues comme aurignaciennes ». Au début de la « bataille de l’Aurignacien », il y avait fouillé à nouveau en 1905 (35) sans trouver de Solutréen (36).
L’abbé Breuil brossera un portrait sévère de ses adversaires : 1 – Élie Massénat était « un homme estimable, enjoué, amateur de beaux objets, mais il manquait de toute espèce de préoccupation et de formation scientifiques, et n’avait aucun soupçon de ce qu’est une observation précise » (37); 2 – Paul Girod avait présidé le congrès de l’AFAS de Clermont-Ferrand de 1908, au cours duquel furent largement distribués les tirés à part du sévère article de Breuil de 1907. Cela fera écrire au charitable abbé : « Il devint rouge, violet, et eut une attaque dont il mourut peu après […]. Je n’ai aucun remords d’avoir, involontairement, hâté quelque peu la disparition de ce très vilain monsieur et faussaire. Il est juste que les gendarmes tirent sur les bandits : tant pis s’il en arrive malheur à ceux-ci » (38). Plus tard, à propos de Glozel, il conclura que P. Girod était, selon lui, « bluffeur, fichard et faussaire » (39)(fig. 4).
4 – Des squelettes néolithiques sur un dépôt magdalénien ?
Dès 1871, É. Cartailhac et le Dr E. Trutat, naturaliste, avaient réfuté, à propos d’Aurignac (40) et aussi de Cro-Magnon le synchronisme de la sépulture et du remplissage pléistocène sous-jacent : elle serait postérieure au niveau d’Aurignac. É. Piette évoquera même l’Azilien en 1902 et 1903 (41).
Gabriel de Mortillet, pour des raisons philosophiques, refuse toute hypothèse de sépulture préhistorique. On ne s’étonne pas qu’il conclut, dès 1883 dans Le Préhistorique, à propos des sépultures de Cro-Magnon : « Louis Lartet les a si bien décrites qu’avec sa description, il est facile de montrer qu’elles sont récentes. Les corps de Cro-Magnon ont été déposés dans une petite grotte contenant un épais dépôt magdalénien [sic] et l’entrée a été fermée par une partie de ce dépôt remanié. C’est ce qui a trompé les observateurs. Mais les corps n’étaient pas ensevelis dans ce dépôt. Ils étaient simplement posés dessus, dans un [mince] espace vide. La simple vue de l’un des crânes, celui du vieillard, suffit à le prouver. Il est en partie recouvert d’une incrustation stalagmitique. Il recevait donc de l’eau tombant de la voûte (42). En outre, le front porte une excoriation, qui est le produit d’une altération de l’os par l’action de l’air et de l’humidité. » (43)
En 1903, dans le Musée préhistorique, il va même jusqu’à préciser que cet homme de Cro-Magnon « appartient au commencement des temps actuels, à l’époque robenhausienne, mais il représente assez exactement le crâne magdalénien de Laugerie-Basse » (44).
Qui veut trop prouver ne prouve rien, car : 1 – Si, effectivement, une partie du crâne du sujet n°1 n’était pas couverte de sédiments, comme le montre la coupe de L. Lartet, le reste des ossements étaient enfouis ; 2 – Il n’y a pas de Magdalénien au centre de l’abri de Cro-Magnon ; 3 – l’ « excoriation » frontale du sujet n° 1 est une lésion pathologique. On verra que Paul Broca et Léon Pales, pourtant tous deux médecins, ne décèleront pas non plus l’origine pathologique de cette lésion (45).
5 – Du Magdalénien dans la couche inférieure ?
Laissons la bataille de l’Aurignacien et Gabriel de Mortillet et revenons un peu en arrière.
En 1893, le Dr Émile Rivière reprend une fouille, « immédiatement au-dessous du point où l’on a trouvé, en 1868, les célèbres ossements humains » (46). Il fouille, sur un mètre de profondeur, ce qu’il juge être « un gisement magdalénien non remanié ». Il exhume « grattoirs, burins, pointes, lames […], faune dans laquelle le Renne prédomine, un beau poinçon en os long de 8 centimètres, une lame en bois de Renne, dont l’une des faces est ornée de traits gravés irrégulièrement et, pièce surtout remarquable, une lame [de matière dure animale], dont les deux bords sont entaillés de 43 coches sur l’un des bords et de 38 sur le bord opposé », sans compter une incisive de cheval portant un trou de suspension et des traits encochés (47).
En 1897, il reprend cette fouille, continuant à trouver, selon lui, « d’intéressants produits de l’industrie de l’époque magdalénienne » et, en septembre, il participe à une fouille de Gaston Berthoumeyrou, « à peu près à la même distance de l’hôtel de la Gare, mais un peu en arrière et proche du rocher » (48). Il trouve notamment des grattoirs, dont un caréné, des burins, des lames de silex, « deux pointes de flèches, plates, fendues à la base pour recevoir le bois sur lequel elles étaient montées », une « très belle pointe de sagaie, longue de 0,103 m, dont l’extrémité est taillée en biseau ».
Du Magdalénien ? En fait, la présence d’un grattoir caréné et de deux sagaies à base fendue témoignaient sans conteste de la présence d’Aurignacien. On verra plus loin que le Dr Rivière avait également trouvé du Gravettien, mais ne le publia pas. En outre, c’est au cours de cette excavation que furent découverts, à 35 cm de profondeur et par un tiers, un fragment de côte, gravé d’un personnage (asexué, un peu météorisé mais sans sein ni fesse marqués) et un autre, gravé d’un bison (49). H. Breuil dessinera ces deux gravures mobilières découvertes par G. Berthoumeyrou dans l’extrémité gauche de l’abri, « dans un milieu qui pourrait être gravettien » (50)
C’est sans doute à la suite du Dr Rivière qu’Otto Hauser fera de Cros-Magnon [sic] un site magdalénien dans son guide intitulé Le Périgord préhistorique. Il observait : « Pour la stratigraphie, il est difficile de contrôler maintenant les couches emportées et détruites par un grand nombre de fouilleurs »(51).
6 – La couche inférieure est franchement aurignacienne.
De nombreuses fouilles ont suivi la découverte de 1868. Lorsque Denis Peyrony publie en 1908 ses « Nouvelles recherches à Cro-Magnon » (52), de nombreux chercheurs sont passés avant lui : L. Lartet en 1868 et 1869 ; É. Massénat en 1869 et 1873 ; É. Rivière en 1893 et 1897 ; H. Breuil en 1897, 1905 et 1907 ; Pestourie et G. Berthoumeyrou en 1906 ; P. Girod, 1906 ; L. Giraux avant 1907 (53).
Le minutieux D. Peyrony, débutant ses propres travaux en 1905 (54), précise deux faits importants : 1 – « C’est [seulement] la couche inférieure de ce gisement qui a été conservée par endroits » ; 2 – « La couche inférieure de Cro-Magnon est franchement aurignacienne et par conséquent plus ancienne qu’on ne l’avait cru tout d’abord […], absolument la même que celle de Gorge d’Enfer (abri Pasquet) ».
Tout cela cadre bien avec les observations de Pestourie, Berthoumeyrou et Breuil. En 1906, Pestourie avait ouvert une tranchée à quelques mètres à droite de celle de D. Peyrony (sans résultat) et une seconde un peu plus loin, à droite vers l’hôtel (55), retrouvant la même industrie que D. Peyrony (56). D. Peyrony signale que « M. Berthoumeyrou fit des recherches à quelques mètres plus loin […], à côté et peut-être même en partie où M. Massénat avait pratiqué autrefois les siennes. À 0, 50 m de profondeur, il trouva le même niveau […]. Cette industrie était la même que celle que M. Breuil et moi avions remarqué l’année précédente […]. M. Breuil […] eut la bonne fortune d’y trouver la base d’une pointe losangique en os » (57).
Bientôt, à la Ferrassie qu’il explore depuis 1896 et publiera en 1934, D. Peyrony va s’apercevoir que si les pointes de sagaie à base fendue sont caractéristiques de ce qu’il nomme l’Aurignacien I, les grandes sagaies à base losangique sont typiques de son Aurignacien II.
En bref, Cro-Magnon – ou du moins ce qu’il en reste – est désormais daté de l’Aurignacien et, pour son niveau le plus bas, de l’Aurignacien I, comme le pensait H. Breuil et D. Peyrony lui-même en 1907. Avec une grande prudence, D. Peyrony laisse ainsi sous-entendre qu’il existait une couche supérieure plus récente, celle des ossements, déjà disparue lorsqu’il eut accès au site.
Il n’a pas retrouvé de Solutréen. Charitablement, il conclut à « une erreur involontaire » d’É. Massénat : celui-ci aurait peut-être pris « les belles lames retouchées sur tout le pourtour pour des feuilles de laurier taillées sur une seule face […]. Il serait bien extraordinaire que, de tous ceux qui ont cherché à Cro-Magnon, M. Massénat fût le seul à avoir trouvé des feuilles de laurier » (58).
Au soir de sa vie, en 1949, Denis Peyrony, recensant les gisements du Périgord préhistorique, date Cro-Magnon de l’Aurignacien I. Il cite de nombreux objets de silex : grattoirs épais, grattoirs simples ou doubles sur lames aurignaciennes, des lames à étranglement, des lames aurignaciennes, des lames retouchées et de rares burins dans la couche inférieure, rouge brunâtre (mais parfois partiellement brunâtre), s’étendant sur tout le fond de l’abri. Curieusement, il ne cite pas les pointes de sagaie aurignacienne à base fendue, mais ne manque pas de rappeler la base d’une pointe losangique repérée par H. Breuil dans les séries Berthoumeyrou (59).
7 – La couche supérieure : plutôt un Aurignacien évolué, sinon tardif.
En 1960, Denise de Sonneville-Bordes pense que le niveau supérieur J, qui serait celui de la sépulture, semble remonter à un « Aurignacien évolué, sinon supérieur », avec ses burins busqués et ses grattoirs à museau (60). Mais, commentant les fouilles de D. Peyrony, elle pense aussi qu’au moment de ces travaux, cette très mince couche supérieure avait déjà disparu.
Elle attribue les couches inférieures B à F à l’Aurignacien I (lames étranglées), le grand foyer H à l’Aurignacien II, « mais il n’est pas exclu que la séquence aurignacienne ait été plus complexe ». Enfin, « le niveau J, auquel correspondent les restes humains, ne peut être attribué à l’Aurignacien ancien, mais tout au plus à un Aurignacien évolué sinon tardif, vu la position qu’il occupe au-dessus de cinq couches aurignaciennes ».
L’auteur précise que les squelettes se trouvaient « à la hauteur du foyer J » (61). Relisons Louis Lartet : 1 – Ce « foyer » n’était qu’une « trace à peine visible d’un foyer » dans un « lit mince de graviers lavés et incrustés de stalagmite », « une couche charbonneuse très mince et très peu étendue », à la partie supérieure de la couche I (62). Sur la coupe de L. Lartet, J est matérialisé par un mince double trait, à 50 cm sous la voûte ; 2 – J n’atteignait pas le fond de l’abri. C’est en fait la couche I, épaisse de 50 cm, qui contenait « des ossements, des silex et des instruments en os, ainsi que des amulettes ». L. Lartet précise clairement : « c’est à la partie supérieure de cette couche jaune I (63) et dans le fond de l’abri qu’ont été trouvés les squelettes humains avec les accessoires de cette sépulture […], le tout recouvert, à l’exception d’un espace fort limité dans l’enfoncement le plus reculé de cette cavité, d’une couche d’éboulis calcaire K » (64).
En 1960, l’Aurignacien et le Gravettien sont parfaitement individualisés. Si D. de Sonneville-Bordes ne parle pas de Gravettien, c’est que, manifestement, elle n’a pas observé de matériel de cette époque.
C’est également à l’Aurignacien évolué que seront attribués plus tard les squelettes de Cro-Magnon par Bernard Vandermeersch (65).
8 – Du Gravettien de Cro-Magnon exilé en Suisse : E. Pittard et J. Bouchud
Ici se situe une importante anecdote insérée dans un petit article consacré à « Une gravure de Cro-Magnon exilée à Neuchâtel (Suisse) », paru dans deux revues locales (66). Le Pr Eugène Pittard, anthropologue genevois, familier des fouilles en Dordogne, signale avoir vu dans la collection du Dr Émile Rivière provenant de Cro-Magnon (alors conservée à Lausanne), des « lames longues et étroites, dans les types de la Gravette » (67).
Il a fait une enquête : l’abbé H. Breuil se souvenait les avoir vues, lors de son premier voyage aux Eyzies en 1897 ; elles étaient fixées sur des cartons rouges dans la maison de François Berthoumeyrou. Mais il n’avait trouvé, dans l’abri, que « les couches actuellement connues comme aurignaciennes » (68).
Des collections de Cro-Magnon à Lausanne ? Oui, car les collections Berthoumeyrou passèrent au Dr Rivière. Peu après la mort de celui-ci, survenue en 1922, elles furent mises en vente à l’Hôtel Drouot et acquises à bas prix par un étudiant de l’École dentaire de Paris, le Suisse Henry Gass. Ce jeune homme mourut prématurément en 1927. Au décès de sa mère, à la fin des années 1950, les collections furent acquises par le Dr Moll, amateur helvétique de Préhistoire (69).
En 1966, Jean Bouchud, apparenté à F. Berthoumeyrou (70) et archéozoologue au Muséum national d’Histoire naturelle, publie un article très documenté sur la découverte du site et sur les travaux de L. Lartet. Il a repéré l’anecdote d’E. Pittard et conclut au caractère gravettien du niveau supérieur, surmontant les niveaux aurignaciens du gisement (71).
Pour définir les niveaux principaux de Cro-Magnon, il tient compte des ressemblances signalées par D. Peyrony entre Cro-Magnon, d’une part, et, d’autre part, les proches stations de Gorge d’Enfer (abris Pasquet, Lartet et du Poisson). En effet, D. Peyrony a récolté en stratigraphie, lors de la vidange complète de l’abri de Cro-Magnon, vers 1960 (pour l’élargissement du chemin), des objets aurignaciens : « pointes en os à base fendue et à base losangique, grattoirs carénés », analogues à ceux des abris aurignaciens de Gorge d’Enfer.
En outre, pour Jean Bouchud, la couche K (72), surmontant par endroits le niveau J des squelettes, évoque celle, analogue, qu’il a observée à l’abri Pataud, où il travaille sous la direction de Hallam L. Movius. Il signale « la similitude stratigraphique de l’abri Cro-Magnon et de l’abri Pataud » et la présence, dans les deux sites, d’ « à peu près les mêmes espèces de coquilles marines » dans la couche K de Cro-Magnon et dans le Gravettien de Pataud (73).
Convaincu que les ossements ont été déposés à la surface du sol de la couche J, puis englobés dans les petits éboulis calcaires de la couche K, il n’hésite à modifier la coupe de Louis Lartet. Il prolonge d’un discret trait de plume la mince couche J jusqu’au rocher de la paroi de l’abri et il densifie la couche I : il fait ainsi apparaître deux couches superposées. Dès lors, sur son dessin modifié, les crânes reposent sur le nouveau trait et semblent appartenir à la couche K de « petits éboulis calcaires postérieurs au Gravettien » (74) (fig.5)
9 – La sépulture continue à être aurignacienne.
En 1969, Hallam L. Movius, négligeant l’anecdote suisse et les publications précédentes et se fiant à ses observations dans l’Aurignacien de l’abri Pataud, entérine l’attribution aurignacienne traditionnelle et assigne à la sépulture de Cro-Magnon une datation d’environ 30 000 ans BP.
En l’absence de toute datation C14 à Cro-Magnon, il applique à ce gisement les datations C 14 de la séquence aurignacienne de l’abri Pataud (75).
Par la suite, les squelettes continuent donc à être « classiquement attribués à l’Aurignacien » (76) et Cro-Magnon, dit-on, « la seule sépulture indiscutable d’Europe attribuée à l’Aurignacien » (77).
10 – Des objets gravettiens dans la Ville rose.
En juillet 1987, préparant le colloque sur l’art des objets au Paléolithique (Foix, 1987), nous identifions, au Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse, une pointe de la Gravette, une fléchette de Bayac et des coquilles marines (littorines), réunis sur un vieux plateau portant l’étiquette jaunie Cro-Magnon. Mlle C. Sudre, conservatrice, informée de cette trouvaille, nous autorise à prendre deux photographies (78).
Lors des travaux d’aménagement du musée de site de l’abri Pataud, l’un de nous (GD) signale cette observation à Henry de Lumley, qui est fort surpris : les sujets de Cro-Magnon sont toujours réputés aurignaciens.
Suite à la trouvaille de la coupe inédite du site par Maurice Féaux, nous publions une modeste révision de la découverte de Cro-Magnon, avec une note concernant les objets gravettiens de Lausanne et de Toulouse (79).
Ces objets confirmaient donc les souvenirs de H. Breuil et d’E. Pittard. Ils montraient qu’il existait donc certainement un niveau gravettien, au-dessus des niveaux aurignaciens. Les squelettes, exhumés du niveau supérieur du gisement, étaient donc rapportables au Gravettien.
11 – Un Gravettien ancien ou moyen plutôt qu’un Aurignacien récent.
En 1970 déjà, compte tenu des observations d’E. Pittard et de J. Bouchud, H.V. Vallois acceptait une datation gravettienne de la sépulture Cro-Magnon : « Cette conclusion paraît justifiée. Il semble cependant risqué d’aller plus loin et de vouloir préciser à quelle subdivision exacte de ce Gravettien doivent être attribués ces ossements » (Vallois, 1970, p.16-17).
Les ossements de Cro-Magnon n’ont pas pu faire l’objet d’une datation C14, faute de collagène dans les pièces osseuses choisies au musée de l’Homme. Mais une datation par accélérateur de particules d’un des quelque 300 coquillages (80), a fourni la date de Littorines de Cro-Magnon27 680 ± 270 BP (81).
D. Henry-Gambier, à l’initiative de cette mesure, note qu’est peu plausible « l’hypothèse d’une collecte de coquillages, datés de 27 000 à 28 000 BP, par des groupes humains beaucoup plus récents (en particulier des groupes de l’Holocène) » (82). La date, obtenue sur cette coquille non fossile, conservée au Musée de l’Archéologie nationale, « exclut définitivement une appartenance à l’Aurignacien ancien, qui correspond à un intervalle de temps plus ancien en Europe ». (83) Quelques autres indices culturels (pendeloques) et la comparaison avec la sépulture de Pavilland (Pays de Galles), parée de coquilles de littorines et datée de 26 360 ± 550 BP (OxA-1815) et la datation obtenue plaident en faveur d’une attribution au Gravettien ancien ou moyen (84) (fig. 6).
En 2004, après cette datation du coquillage,, Denis Vialou concluait de même : « Cet âge fait davantage rapporter la sépulture à un Gravettien ancien ou moyen plutôt qu’à un Aurignacien récent. La carence des fouilles empêche de traduire en certitude cette possibilité » (85).
12 – Certainement du Gravettien ancien et peut-être moyen
L’attribution chronologique peut encore être précisée grâce à quatre constatations.
a – Un recoin inhabitable
Pour J. Bouchud, les squelettes ont été déposés à la surface de la couche I, dans le prolongement de la couche J et noyés ultérieurement dans les éboulis de la couche K (86). C’est pour expliciter cette hypothèse, qu’il a modifié la coupe de L. Lartet. Ainsi les crânes apparaissent à la surface de la couche J prolongée par son trait de plume (87).
En fait, les squelettes n’étaient pas dans la couche J, mais plutôt au sommet de la couche I, à la jonction de la couche I et de la couche K, « à la hauteur » de la couche J, comme l’indique la coupe de L. Lartet (88) et comme le souligne D. de Sonneville-Bordes (89). Rappelons que cette couche J n’est qu’un mince lit de graviers lavés et incrustés de stalagmite, « couche charbonneuse très mince et très peu étendue » (90) à la partie supérieure de la couche I et n’atteignant pas le fond de l’abri. Il n’est pas possible de préciser si les cadavres ont été déposés à la surface du sol de l’époque ou enfouis sous quelques centimètres de sédiment.
Au moment de la mise en place de cette couche J, il ne restait plus sous l’abri de Cro-Magnon qu’un espace très surbaissé d’environ 50 cm de hauteur, au fond duquel les Hommes sont venus déposer leurs morts. La couche J, à la surface de l’épaisse couche I, serait la trace « à peine visible » de leur passage pour déposer les cadavres au fond de ce qui restait de l’abri.
Le dépôt des cadavres dans ce recoin, retrouvés sans indication de connexion anatomique ni plan détaillé de la sépulture (91), correspondrait à la dernière pénétration : l’abri était devenu inhabitable, mais demeurait encore accessible, en rampant sous une voûte surbaissée. La même démarche funéraire se retrouve à l’abri Pataud (couche 2), à la fin du Gravettien : l’abri est alors presque comblé par l’auvent effondré et devenu inhabitable (92).
La couche K, qui achève de combler l’abri, est une couche de petits éboulis calcaires contenant seulement quelques silex taillés et des os de petits rongeurs et de renard (93). Pour J. Bouchud, cette couche K, postérieure au Gravettien, marque une recrudescence du froid sec comme il a pu l’observer lors des fouilles de l’abri Pataud (94).
b – Les pointes de la Gravette
Compte tenu des pointes de la Gravette signalées dans la collection du Dr Rivière et observées par H. Breuil, J. Bouchud conclut que les sépultures de Cro-Magnon étaient gravettiennes. Il les rapporte au « Périgordien IV » (95), c’est-à-dire au Gravettien ancien. La comparaison avec l’abri Pataud est licite. En effet, ce dernier site, occupé aux mêmes époques, est situé à 200 m de Cro-Magnon dans la même ligne de rochers coniaciens. Mais les deux abris n’ont pas évolué de la même façon.
Pendant l’Aurignacien, l’abri de Cro-Magnon est un habitat durable, alors que l’abri Pataud est un abri peu profond, occupé à plusieurs reprises pendant de courtes périodes (campements de chasse des couches 14 à 6).
Au Gravettien ancien, l’abri de Cro-Magnon est presque comblé et le fond n’est plus habitable. L’abri Pataud est alors devenu une large terrasse profonde d’une dizaine de mètres occupée comme camp de base prolongé. La couche 5 en témoigne : épaisse d’environ 80 cm, elle est très riche en vestiges lithiques et osseux (5 640 outils lithiques, dont 1 404 pointes de la Gravette de tous types et 123 fléchettes de Bayac) (96). Les dates C14 obtenues s’échelonnent entre 26 600 ± 200 et 28 400 ± 1100 BP.
Pendant le Gravettien moyen et le Gravettien supérieur, l’abri Pataud sert à nouveau de camp de base à plusieurs reprises (couches 4 et 3). Les pointes de la Gravette sont présentes dans tous les niveaux gravettiens, mais les fléchettes de Bayac ont disparu.
c – Les coquillages
Jean Bouchud insiste sur la présence des mêmes coquillages à Cro-Magnon et dans le Gravettien de Pataud (97). À Cro-Magnon, les sépultures sont accompagnées de très nombreux coquillages, surtout des littorines : 300 environ (98).
Toutefois, dans la couche 5 de Pataud (Gravettien ancien), Carole Vercoutère n’a identifié que 2 littorines (99). Dans la couche 4 (Gravettien moyen), elle en a compté 37. Elle n’en signale pas dans le Gravettien supérieur de ce gisement 5100�.
La date du coquillage de Cro-Magnon, daté de 27680 ± 270 BP (101), comparée à celles de l’abri Pataud, exclut le Gravettien supérieur (entre 23000 et 24000 BP), mais ne permet pas de choisir entre le Gravettien ancien et le Gravettien moyen (102).
d – Les objets de Cro-Magnon conservés à Toulouse
En 1987, nous avions observé, dans une vitrine du Muséum d’Histoire naturelle de Toulouse consacrée à Cro-Magnon, une pointe de la Gravette et une fléchette de Bayac, à côté d’un collier de littorines. Ces deux objets nous faisaient évoquer une datation gravettienne, et même gravettienne ancienne, pour les squelettes de Cro-Magnon (103) (fig. 7).
Une nouvelle observation des objets issus de Cro-Magnon, conservés dans ce muséum, nous a permis de confirmer la présence de la pointe de la Gravette et de la fléchette (104).
La pointe de la Gravette, marquée CMA 9925.29, est une pointe allongée et robuste (8,5 x 1,3 x 0,7 cm). Elle s’ajoute aux pointes de la Gravette de la collection Rivière, identifiée par H. Breuil et mentionnées par J. Bouchud.
La fléchette (CMA 9925.36), pièce foliacée à courtes retouches sur tous les bords (6,1 x 2,4 x 0,8 cm), est caractéristique du Gravettien ancien du gisement de la Gravette. À Pataud, elles abondent dans la couche 5 de Gravettien ancien (123 exemplaires) et font défaut dans les niveaux plus récents, alors que les pointes de la Gravette sont présentes dans tous les niveaux gravettiens.
Ces découvertes vont bien dans le sens d’une datation archéologique gravettienne des squelettes de Cro-Magnon, en accord avec la datation C 14 de la littorine. L’abondance relative du matériel gravettien (en particulier plusieurs pointes de la Gravette) permet d’envisager que la couche I (y compris sa limite supérieure J) appartiendrait au Gravettien. La présence d’une fléchette de Bayac, dans la collection Cartailhac, va dans le sens du Gravettien ancien (105).
La pathologie des sujets de Cro-Magnon
Six ans à peine après la découverte, A. de Quatrefages et E. Hamy introduisaient la notion de « race » de Cro-Magnon, à côté de celle de Cannstadt, cette dernière désignant pour eux la plus ancienne « race » fossile (106).
Les humains de l’abri de Cro-Magnon sont aujourd’hui appelés Homo sapiens ou Hommes anatomiquement modernes. Cinq sujets ont été conservés : un squelette masculin à peu près complet, un crâne féminin, une calotte crânienne, des fragments attribués à un autre crâne et quelques restes d’un nouveau-né (107). La pathologie concerne essentiellement les sujets nos 1 et 2.
A – Le sujet n°2.
Le crâne de cette jeune femme, au moins quinquagénaire (108), porte une large brèche osseuse frontale, produite par un instrument tranchant (fig.8). Cette lésion a évoqué, durant des décennies, un traumatisme paléolithique, « an injury from violence » (109). Louis Lartet décrivait non seulement la plaie, mais aussi l’objet vulnérant et même l’état probablement gravide de la malheureuse victime.
Traduisons : « Dans la région de l’éminence frontale droite est une blessure pénétrante, qui, infligé pendant la vie, s’est cicatrisé sur ses bords, comme on le voit simplement. Cette blessure, traversant obliquement l’éminence frontale droite, a une forme de pastille étroite et une des têtes de lance en silex taillé trouvée dans la Caverne s’y adapte parfaitement. De plus, sur le côté gauche du crâne, les deux tiers antérieurs de la région temporale font défaut et les bords restants du pariétal et du frontal ont une telle apparence qu’ils nous font hésiter : la condition présente de cette partie du crâne est-elle due à la blessure pendant la vie ou aux dégâts ultérieurs. Cette femme a été tuée, peut-être, alors qu’elle était enceinte, puisque, comme nous l’avons remarqué, ont été trouvés là le fragment d’un crâne et certains des os longs d’un fœtus, associés avec d’autres os humains. » (110)
Comme les Drs P. Broca et L. Pales, le Dr H.V.Vallois, anthropologue et médecin, ajoutait également : « Elle a dû survivre plusieurs semaines, d’après l’avis de médecins fort compétents » (111).
C’est seulement un siècle environ après la découverte que fut reconnue l’étiologie véritable de cette brèche osseuse, dépourvue de traces de cicatrisation : un malencontreux coup de pioche ou de pelle lors de son exhumation en 1868 par un ouvrier de François Berthoumeyrou (112). Durant cent ans, cette blessure avait fait évoquer un meurtre voire une querelle de ménage…
Rappelons que le crâne du Néandertalien de la Chapelle-aux-Saints et celui de la jeune femme de l’abri Pataud, entre autres, ont connu des accidents de ce genre lors de leur exhumation.
B – Le sujet n°1 ou « vieillard de Cro-Magnon ».
Devant ses lésions frontale et maxillaire, la démarche diagnostique est ici passée par une dizaine d’étapes, échelonnées sur plus d’un siècle, au fur et à mesure que progressait la classification anatomo-clinique des maladies (fig. 9 et 10).
1 – Agents physiques et accident de chasse.
Dès le 21 mai 1868, le célèbre Paul Broca, chirurgien, anatomiste et anthropologue français (113), affirme, devant la Société d’Anthropologie de Paris, que l’érosion bien visible sur le front du squelette n°1, un homme baptisé « le vieillard », n’est pas d’origine pathologique, mais « paraît avoir été produite après la mort, dans le sol de la caverne, par les agents physiques » (114).
Il note seulement, près de l’extrémité inférieure du fémur gauche, une dépression peu profonde, « évidemment traumatique, due au choc d’un corps très dur, qui a produit l’enfoncement de la lame compacte dans le tissu osseux subjacent, sans interrompre la continuité de l’os […], résultat de l’action d’un projectile mousse, lancé peut-être par une fronde […]. Un coup de corne, un coup de défense d’éléphant [sic] auraient très bien pu produire le même effet » (115).
En revanche, au niveau du crâne, Louis Lartet signale « some alterations from desease » : « Le diploé est mis à nu (116). Le bord extérieur de cette dépression est plus épais que le bord interne, et tout ici nous amène à supposer que l’os frontal a été atteint par la carie durant la vie. » (117)
2 – Carie osseuse et traces de rachitisme.
La même année, comme L. Lartet, le Dr Pruner-Bey affirme le caractère pathologique des lésions les plus évidentes, c’est-à-dire « la carie qui a entamé le côté droit du front et les alvéoles de la mandibule » (118). Considérant les autres lésions frappant notamment les côtes, les os longs des membres, les métatarsiens et les phalanges, et, essayant de relier ses diverses observations, il y voit une atteinte diffuse, en l’espèce « des traces de rachitisme » (119). Ce que son confrère Broca s’empresse de contester (120).
3 – Coup de hache, d’épieu ou de massue, ostéite post-traumatique, syphilis ou encore érosion posthume.
En 1881, Jules Le Baron, étudiant en médecine, reprend l’examen de cet homme de Cro-Magnon. Il attribue la lésion frontale successivement à un coup de hache ou d’une autre arme, une ostéite post-traumatique, une gomme syphilitique (121) ou, plus simplement, une érosion post-mortem. Sa thèse est le premier ouvrage français de paléopathologie.
La conclusion est prudente : « Chacune de ces hypothèses peut être vraie. La certitude, nous ne la possèderons probablement jamais ». Chemin faisant, il a noté, au niveau du bassin, au-dessus du cotyle gauche (122), « une cavité sphérique à fond criblé de trous », évoquant, pour lui, la trace d’un coup d’épieu, tandis que la lésion du fémur gauche, attribuée par Broca à un projectile émoussé ou à un coup de corne, serait plutôt celle d’un coup de massue (123).
Presque tous ces diagnostics font intervenir des traumatismes. Ils cadrent bien avec l’idée que l’on faisait alors de la dangereuse vie de nos ancêtres, sans cesse aux prises avec leurs semblables ou avec des animaux.
4 – Abcès ou kyste de la mandibule.
En 1922, le Dr Pierre Bouvet, dans sa thèse de Médecine soutenue à Paris sur les lésions dentaires préhistoriques, revient sur la lésion de l’hémi-mandibule gauche (124).
Il évoque une abcédation alvéolo-dentaire et conclut : « Le célèbre crâne de Cro-Magnon a été si altéré par son séjour dans le sol qu’il est très difficile de faire la part de ces altérations posthumes avec celles de lésions pathologiques […]. Au maxillaire inférieur, une cavité paraît être due à un kyste ou à un abcès ; la région des prémolaires et molaires est très altérée et il est difficile de préciser l’origine de la perte de substance et des modifications du tissu que l’on constate ». En outre, ce jeune médecin signale que « quelques fragments de dents et de racines persistent » et que la deuxième molaire supérieure gauche est réduite à l’état de chicot, alors que la denture robuste de la femme de Cro-Magnon ne présente pas de trace d’altération pathologique (125).
5 – Pseudo-lésion frontale due à des gouttes d’eau.
Une surprise : dans sa thèse magistrale intitulée Paléopathologie et pathologie comparative, le minutieux Dr Léon Pales, chirurgien des hôpitaux militaires, n’accorde guère d’importance au squelette n° 1 de Cro-Magnon.
Il ne mentionne que la lésion frontale qu’il attribue, comme son confrère Broca, à une banale lésion posthume : « Des différences dans la coloration et la conservation de la pièce montrent que ce crâne était incomplètement enfoui dans le sol, ce que confirme bien la coupe de l’abri publiée par Louis Lartet. La partie haute de la face était à découvert et la perte osseuse cavitaire du frontal, tapissée de concrétions calcaires, a été produite par la chute de gouttes d’eau » (126).
A vrai dire, dans cette hypothèse, l’eau, alcaline et chargée de calcaire, aurait dû créer un relief stalagmitique et non une dépression de l’os, à peine tapissée d’un dépôt calcaire d’un millimètre d’épaisseur.
6 – Arthrite et ostéite.
En 1965, le Dr Henri V. Vallois et Mme G. Billy inventorient les vestiges osseux découverts dans l’abri de Cro-Magnon et attribuent 36 os, complets ou non, au squelette n°1. L’âge de celui-ci, d’après l’état des sutures crâniennes et des arcades dentaires, est estimé à 50 ans, au grand maximum. Le surnom de « vieillard » est donc indu.
Les lésions alvéolo-dentaires sont attribuées à « une polyarthrite particulièrement développée » (127), étonnant les auteurs : « On a l’impression qu’un énorme abcès a détruit, non seulement la paroi antérieure des alvéoles, mais la majeure partie de ces cavités ». Les autres lésions osseuses sont au nombre d’une douzaine et sont étudiées séparément sans essayer de les regrouper en une seule maladie.
Pour la lésion frontale, « l’idée d’une origine pathologique ne doit pas être exclue ». Les 5 vertèbres lombaires semblent frappées d’une « ostéo-arthrite chronique » (128). La petite cavité sphérique de la hanche gauche, découverte par J. Le Baron, paraît « résultant d’un processus inflammatoire localisé », ce qui ne signifie pas grand-chose. Enfin, ces auteurs signalent, au niveau de la hanche droite, en arrière du cotyle, « une profonde dépression ovalaire à fond irrégulier [qui] résulte certainement d’une ostéite suppurée » (129).
7 – Actinomycose.
En 1967, le chirurgien orthopédiste Jean Dastugue publie les résultats de son étude. Elle est consacrée à la seule pathologie des sujets de Cro-Magnon et a été effectuée à la demande des auteurs précédents. Le grand mérite de ce médecin a été de regrouper les lésions du frontal, de la mandibule, des deux os iliaques, du fémur gauche et du tibia droit.
Ces lésions ont, selon lui, trois cratères communs : 1 – elles attaquent l’os de dehors en dedans, respectant la corticale interne ; 2 – elles n’entraînent pas de réaction périostée de voisinage ; 3 – la réaction vasculaire consécutive est « discrète et inégale ». Il procède à un diagnostic différentiel et élimine donc les grands maladies osseuses : ostéomyélite, syphilis, tuberculose, cancer, échinococcose. Il conclut au diagnostic d’actinomycose osseuse, car « il paraît difficile de trouver meilleure concordance avec les constations faites sur le sujet n° 1 » (130). Il attribue ces lésions à un « champignon », Actinomyces bovis, originaire de la cavité buccale du sujet ou de la manducation de végétaux infestés.
Aujourd’hui, ce diagnostic n’est pas évident pour deux raisons : 1 – l’actinomycose humaine est mieux connue et son nom est trompeur. Cette maladie rare, décrite en 1879, est en fait due à une bactérie filamenteuse anaérobie Gram + (Actinomyces israelii), assez proche mais distincte d’Actinomyces bovis, agent de l’actinomycose bovine. 2 – Cette pseudo-mycose, habituellement présente dans la bouche, provoque la formation d’abcès chroniques, à localisation surtout cervico-faciales (pouvant envahir le périoste), thoracique, abdominale, pelvienne, hépatique, cérébrale et vertébrale, traduisant un grave envahissement par voie sanguine et s’ouvrant par de multiples fistules. Ce sont ces atteintes (cervico-faciale, vertébrale et autres) qui ont dû faire évoquer ce diagnostic rare et plutôt inattendu au Dr Dastugue.
En outre, l’auteur signalait, sur ce sujet n°1, une « spondylose » d’une vertèbre cervicale (131) et surtout de deux vertèbres lombaires, dont on reparlera. Il mentionnait aussi une lésion de l’extrémité inférieure d’un tibia, faisant évoquer une ossification du ligament fibulo-tibial postérieur consécutive à une entorse grave (132), et une phalangette d’orteil montrant une surface articulaire pathologique (sans étiologie évidente).
8 – Histiocytose X et maladie de Scheuermann.
Le Dr Pierre-Léon Thillaud (133) était soucieux, lui aussi, de trouver une interprétation globale des atteintes osseuses du sujet n° 1. Il diagnostique, après radiographies de toutes les lésions ostéolytiques, une maladie systémique rare : une histiocytose X disséminée et, plus précisément, dans ce cadre, un granulome éosinophile multiple de l’os (décrite pour la première fois en 1940).
Cette prolifération non cancéreuse des histiocytes (134) détruit l’os par érosion, du centre à la périphérie (comme ici au niveau du frontal, de la mandibule et de l’os iliaque gauche), avec parfois, au voisinage, une réaction densifiante de construction osseuse (comme ici sur le fémur) et un envahissement des parties molles. vertebre lombaire du vieillard de Cro-MagnonHabituellement, elle atteint surtout les os plats : voûte crânienne, mandibule (ici de la canine à la 2e molaire gauches) et aussi, par ordre décroissant, bassin, omoplates et côtes, ces dernières prenant un aspect soufflé, respectant la corticale (ce qui est le cas ici). Les os longs (fémur et humérus) sont moins souvent atteints. Une atteinte vertébrale est possible. La maladie frappe surtout des grands enfants et des jeunes adultes de sexe masculin. Elle est d’évolution lente et peut guérir spontanément (135). Le sujet n° 1 de Cro-Magnon avait dû contracter cette maladie dans sa jeunesse et en garder les traces jusqu’à sa mort, sans qu’elle en soit la cause.
Ce n’est pas tout. P.-L. Thillaud note que les 2e et 3e vertèbres lombaires sont aplaties en forme de coin. Leurs plateaux sont irréguliers et feuilletés. Il note, sur L3, une effraction du plateau vertébral liée à une hernie du disque intervertébral, pénétrant le corps spongieux de la vertèbre (dite nodule ou hernie de Schmörl) (fig.11). Cet aspect est tout à fait typique de la maladie de Scheuermann, dite aussi épiphysite douloureuse de l’adolescence (136). Cette maladie inflammatoire douloureuse, assez fréquente, parfois familiale mais d’origine inconnue, frappe les adultes jeunes et évolue spontanément vers la guérison au prix d’une légère cyphose séquellaire, à grand rayon.
Enfin, le Dr Thillaud attribue à des chocs post mortem les lésions du tibia droit, du fémur gauche et l’effondrement de la cavité cotyloïdienne droite, où se loge la tête fémorale (137).
9 – Histiocytose langerhansienne.
Le diagnostic d’histiocytose proposé par P.-L. Thillaud est très convaincant. Mais il faut actualiser légèrement la terminologie. En effet, peu d’années après les publications initiales de cet auteur, le Writing Group of the Histiocyte Society, en 1987 et en 1997, suivant l’avis de deux auteurs français (138), puis, plus récemment, l’OMS (139), ont renoncé à l’appellation d’histiocytose X, datant de 1953 et jugée périmée, au profit d’une nouvelle classification de ces maladies orphelines (140).
Sous le nom d’histiocytose langerhansienne est décrite désormais une série Histiocytose langerhansienned’entités cliniques peu fréquentes (141), d’aspects et de pronostics très variés, ayant en commun une infiltration importante (granulome) des tissus concernés par des cellules de Langerhans (ou histiocytes) (142) (fig.12). Elle peut donner : 1 – des formes localisées, osseuse ou pulmonaire (143) ; 2 – des formes multifocales, telles le granulome éosinophile multifocal (comme ici) (144) et le syndrome de Hand-Schuller-Christian, associant lacunes osseuses crâniennes, exophtalmie et diabète insipide par atteinte hypophysaire ; 3 – des formes diffuses (145).
Cette classification a, ici, trois conséquences : 1 – On doit renoncer à parler d’histiocytose X, mais d’histiocytose langheransienne ; 2 – Dans ce cadre, les lésions du sujet n°1 de Cro-Magnon évoquent donc avant tout un granulome éosinophile multifocal (146) ; 3 -Dans les localisations osseuses, enfin, il est noté que cette maladie peut induire « un tassement des corps vertébraux (vertebra plana), avec, en principe, respect du mur postérieur (147) et des disque intervertébraux » (148), ce qui conduit à renoncer au diagnostic de maladie de Scheuermann associée.
En conclusion, cet homme de Cro-Magnon est aujourd’hui bien daté du Gravettien, plus probablement ancien que moyen. L’abri de Cro-Magnon entretient d’étroites relations avec l’abri Pataud, son voisin. On pourrait même imaginer qu’il a servi de lieu de sépulture aux habitants de Pataud. A la fin du Gravettien ancien (couche I), il était devenu inhabitable alors que Pataud était un important camp de base.
Nous avons tendance à considérer l’homme de Cro-Magnon comme un athlète de haute taille, familier des longues courses et des chasses prolongées. En fait, notre quadragénaire de Cro-Magnon boitait du fait d’une sévère séquelle d’entorse de la cheville.
De surcroît, depuis son adolescence, il était un peu handicapé par quelques douleurs liées à une lacune qui tuméfiait son front. Il était un peu voûté par des tassements vertébraux et il était contraint de mastiquer du côté droit de sa mâchoire du fait du mauvais état de son hémi-mandibule gauche…
Ces derniers troubles étaient dûs à une histiocytose langerhansienne, ainsi nommée parce qu’un biologiste berlinois, Paul Langerhans, avait découvert ces curieuses cellules en 1868, l’année même où deux Périgordins avaient exhumé les squelettes enfouis à Cro-Magnon…
B. D.(149) et G. D.(150)
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Texte et photos publiés avec l’autorisation de Brigitte et Gilles Delluc.
Pierre Charon
jean Zammit
Philippe Charlier