Les traditions mégalithiques de Sénégambie
Augustin F. C. Holle et Hamadi Bocoum
Les fameux cercles de pierre... plus de 1000 monuments le long du fleuve Gambie
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Présentation de l'éditeur Les monuments mégalithiques de la Sénégambie répartis entre le Sénégal et la Gambie se retrouvent dans l'extrémité occidentale de l'Afrique de l'Ouest.
Les fleuves Gambie et Saloum marquent les limites méridionale et septentrionale de cette aire mégalithique qui s'étend sur 120-150 km nord-sud et 250 km est-ouest, de Tambacoundra à Kaolack.
Les sites mégalithiques s'étalent sur environ 33 000 kilomètres carrés, répartis en grappes le long des cours d'eau.
Les traditions mégalithiques de Sénégambie apparaissent comme suspendues dans un espace socioculturel mystérieux. Aucune des communautés actuelles - Manding, diola, Wolof, Sérèr etc. - réparties sur l'ensemble de l'air mégalithique ne revendique l'héritage culturel représenté par ces monuments, comme si les collectivités des bâtisseurs de mégalithes s'étaient éclipsées de l'histoire sans descendance. Les similitudes morphométriques entre un petit échantillon de squelettes issus des fouilles et les populations wolof et sérèr suggèrent néanmoins une certaine continuité génétique. Quelles sont les raisons de cette coupure historique radicale?Ces monuments ont surpris puis fasciné des générations d'archéologues et de chercheurs amateurs pendant la période coloniale. Le capitaine Duchemin et le docteur Jouenne ont été de ces pionners sur les traces des bâtisseurs de mégalithes.
Cet ouvrage propose une excursion à travers l'oeuvre multiforme de tous ceux qui ont contribué à la réappropriation de cette merveilleuse culture qui, pour ne nous avoir pas dit ce qu'elle était devenue, nous invite encore et toujours au rêve, à l'exégèse et à la créativité. |
Les auteurs
Augustin Holl est professeur à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense.
Hamadi Bocoum est directeur du patrimoine culturel au ministère sénégalais de la culture, directeur de l'Institut fondamental de l'Afrique noire, et professeur à l'université Cheikh-Anta-Diop de Dakar. Il a dirigé plusieurs projets de recherches archéologiques dans la moyenne vallée du Sénégal. Il a publié L'Âge du Fer au Sénégal (IFAN, 2000).
Sommaire de Les traditions mégalithiques de Sénégambie
Introduction
Les traditions mégalithiques de Sénégambie
Le temps des pionners : de 1896 à 1956
Les premiers professionnels
Cahier I SCENES DE TERRAIN
Eléments d'histoire intellectuelle
Les mégalithiques dans les folklores
locaux
Origines : le débat
Les mégalithes pour quoi faire ?
Etablir les données
Réflexions
Archéologie des monuments mégalithiques
Construction et usage des mégalithes
Variabilité des monuments mégalithiques
Cahier II SINE-NGAYENE
Les cercles à monolithes
Ker Batch et Wassu
Tiékène Boussoura
Kodiam
Sine Ngayène
Mbolop Tobé
Les cercles pierrers
Tiékène Boussoura
Les Tumulus
Tiékène Boussoura
Mbolop Tobé
Saré Diouldé
Cahier III NGAYENE II
Nouvelles perspectives
Le monument 27 - Double Cercle
Monument 52 - Cercle
Le tumulus SN-03-T-01
Le tumulus SN-03-T-02
L'espace cérémoniel SN-03
Réflexions
Cahier IV SANTHIOU-NGAYENE
Les mégalithes comme patrimoine
A la recherche des batisseurs supendus
Qui étaient les batisseurs des mégalithes ?
D'où venaient-ils ?
Que sont-ils devenus ?
De quelles cultures techniques étaient-ils porteurs ?
La production et l'agencement des monolithes
La production et le travail du fer
La production céramique
Une grande variété d'objets de parure
Le legs paysager des batiseurs de mégalithes de Sénégambie : une valeur universelle exceptionnelle selon l'Unesco
Sine Ngayène
Wanar
Wassu et Ker Batch
Wassu
Ker Batch
Cahier V WANAR
Cahier VI
Les sites de la Gambie
Cahier VII Culture matérielle
En guise de conclusion
Références
Un extrait de Les traditions mégalithiques de Sénégambie
Les mégalithes comme patrimoine
Maintenant qu'ils sont inscrits au patrimoine mondial de l'Humanité, les mégalithes de Sénégambie, restés longtemps, peut-être même trop longtemps livrés à la seule contemplation des spécialistes qui, dans une quasi-confidentialité se sont, adonnés à de véritables duels d'exégèses, qui durent depuis plus d'un siècle, sortent progressivement de l'anonymat. Cet heureux développement, rendu possible par le label « patrimoine mondial de l'Humanité», ne clôture pas, fort heureusement, le besoin de recherche pour la compréhension de la saga des bâtisseurs de mégalithes: bien au contraire.
En effet, si les controverses entre spécialistes pouvaient être gérées sans impatience aucune, l'acquisition du statut de « patrimoine mondial de l'Humanité» induit, du point de vue de l'approche patrimoniale, une série de questions récurrentes auxquelles les spécialistes, tout comme les gestionnaires de sites, doivent apporter des réponses les plus précises possible. Celles-ci seront d'autant plus complexes qu'il est impératif de tenir compte des populations vivant dans la zone d'emprise des sites qui couvrent un territoire de plus de 30000 km. Ce patrimoine, reçu d'ancêtres jusque là méconnus qui nous laissent dans l'ignorance de leur devenir, pose en conséquence des défis majeurs avec lesquels les gestionnaires doivent certes apprendre à conjuguer, mais que la recherche doit impérativement relever.
- Qui étaient les bâtisseurs des mégalithes ? D'où venaient-ils ? Que sont-ils devenus ?
- De quelles cultures techniques étaient-ils porteurs?
- Quelles étaient leurs motivations?
Ces séries de questions qui interpellent la recherche ne provoqueront pas, à notre grande frustration, de réponses aussi précises que souhaitées et pour cause: les mégalithes n'ont pas fini de parler. Certaines réponses seront longues, voire difficiles à obtenir, mais elles auront, à chaque fois, le souci de dire vrai, de faire la part entre ce qui relève des acquis scientifiques et ce qui relève de l'exégèse afin que le visiteur d'un jour comprenne l'ampleur de la tâche qui attend la communauté scientifique. Faire parler plus de 1087 stations mégalithiques, environ 30000 monolithes, autant sinon plus, d'expériences de taille, de transport et d'aménagement, ne saurait, à l'évidence, être l'œuvre d'une vie, ni d'une génération. Des générations et des générations de chercheurs croiseront encore le verbe pour nous apporter, pas à pas, les réponses à nos questions. Pour le moment, nous devrons donc nous contenter de ce qui est disponible qui, comme nous avons tenté de le montrer dans les chapîtresprécédents s'est complexifié au fur et à mesure que la recherche apportait des éclairages sur les bâtisseurs de megalithes. Mais ces réponses, quelles que soient leurs limites, s'inscrivent, à présent, dans un environnement cognitif plus maîtrisé. Elles permettent au gestionnaire du patrimoine de disposer d'une série de réponses qui, sans être définitives, donnent plus de cohérence à l'interprétation de cet exceptionnel paysage culturel.
À la recherche des bâtisseurs suspendus
Sans être réducteurs, c'est bien ainsi que nous pourrions résumer la perplexité qui saisit tous ceux qui tentent de donner un sens à l'origine et au devenir des bâtisseurs de mégalithes. Ceux-ci nous intriguent par l'épaisseur des zones d'ombre qui entourent leurs œuvres. La soudaineté de leur apparition, la qualité des ouvrages légués à la postérité et ce « départ» en toute discrétion, presque sur la pointe des pieds, font de leur saga une épreuve d'énigmes dont il faut dénouer chaque segment presque à l'aveugle, tant il est difficile de leur trouver une filiation précise.
Qui étaient les bâtisseurs des mégalithes?
Malgré le nombre impressionnant d'ossements humains récoltés dans de nombreuses stations, les études anthropométriques sont encore très réduites en raison du mauvais état de conservation et de la pratique de l'inhumation secondaire associée à un choix sélectif de certaines catégories d'ossements: crânes, os longs, mandibules, etc., suivant les choix anatomiques dont nous ignorons les motivations.
La recherche sur l'identité des bâtisseurs de mégalithes n'a cependant pas, comme de nombreux autres domaines, échappé aux clichés réducteurs. Trop sophistiqués pour certains pour être l'œuvre des Noirs, on a vite fait de leur trouver des auteurs d'ascendance européenne. Ils furent qualifiés successivement de Romains, de Phéniciens ou d'ascendance juive. Ils pouvaient donc tout être sauf des Africains. Ces hypothèses, qui avaient le mérite de ne reposer sur aucune évidence archéologique, étaient cependant assez représentatives de l'état d'esprit qui a accompagné, des décennies durant, les recherches en sciences sociales sur l'Afrique. Les traits de civilisations majeurs étaient nécessairement exogènes et tout l'exercice consistait à leur trouver des filiations acceptables à l'ère du diffusionnisme triomphant. Les bâtisseurs de mégalithes n'ont donc pas échappé à cette règle et il fallait des évidences archéologiques pour renverser la perspective.
Les premières mesures et études anthropologiques indiquent à présent qu'il s'agit bien d'Africains, plutôt de type sahélien avec des tailles adultes autour de 1,70 m, mettant parfois en œuvre des pratiques culturelles, les mutilations dentaires par exemple, que l'on retrouve au sein de certains groupes ethniques de Sénégambie (Thilmans et al. 1980). Celle première identification ne nous permet pas cependant de les rattacher à un groupe précis. Mais avec les nouvelles techniques d'analyses basée sur l'ADN on peut espèrer, en toute logique, affiner l'attribution...
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Cercle à monolithes 27 situé au centre du site Ngayene II
Augustin F. C . Holl / Hamadi Bocoum |
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