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Une phalange de mégacéros gravée par Néandertal ?
Cette petite gravure sur os datée de 51 000 ans a été découverte dans la grotte de la licorne, en Allemagne. Cet os gravé est attribué à Néandertal.
L’os gravé a été trouvée dans le gisement archéologique d’Einhornhöhle, dans les montagnes du Harz, au nord de l’Allemagne. Cette grotte est connue depuis 1541 et elle a régulièrement fait l’objet de fouilles depuis 1872. De 1984 à 1989, les fouilles permettent de mettre à jour des ossement de mammifères mais également des outils attribués à Homo neanderthalensis.
Les campagnes de fouilles suivantes ont permis de découvrir de nouvelles cavités mais également de ré-estimer la longueur de la grotte à près de 1000 mètres.
La cavité a été visitée et probablement utilisée comme refuge par des Néandertaliens. Les datations ont permis de déterminer que les Homo neanderthalensis ont été présents dans la grotte depuis au moins 100 000 ans. Les ossements de faunes montrent que la grotte était également visitée par des ours des cavernes (plusieurs milliers), des lions des cavernes et des loups…
Un petit os gravé
La découverte est constituée d’une phalange de mégacéros, longue d’environ six centimètres, pour quatre de large. La « sculpture » présente un motif linéaire composé de 10 traits gravés, dont 6 d’entre-deux forment cinq chevrons empilés (voir relevé).
« Les gravures sont parallèles et régulièrement espacées. Elles ont des dimensions comparables et ont très probablement été créées selon une approche uniforme démontrant un acte intentionnel », selon l’archéologue Dirk Leder qui a dirigé l’étude publiée dans Nature.
L’analyse microscopique de l’os fossilisé indique qu’il a été bouilli avant la gravure, probablement pour ramollir l’os avant de le « travailler ». Les traits gravés ne correspondent pas aux traces que l’on trouve lors des opérations de boucherie. Par ailleurs, l’artefact décoré n’est « d’aucune utilité pratique », comme le soulignent les chercheurs dans l’étude.
Les scientifiques impliqués dans l’étude suggèrent que ces marques avaient certainement une signification symbolique car elles étaenit gravées sur un os d’animal assez rare dans la région à cette époque. Mais la signification des gravures pourrait rester encore longtemps inconnue…
Datée de 51 000 ans et attribuée à Néandertal
La datation radiocarbone place la phalange de mégacéros au Paléolithique moyen, il y a 51 000 ans. A cette période il n’existe aucune trace de la présence d’Homo sapiens dans la région et seuls les Néandertaliens l’arpentaient.
La découverte d’activités « artistiques » de Néandertal sont de plus en plus fréquentes, comme le montrent les traits gravés de Gorham à Gibraltar, ou la parure de serres de rapace de Krapina. La majorité des scientifiques attribuent maintenant d’importantes possibilités cognitives aux Néandertaliens, que cela soit pour des rites funéraires ou le travail des outils en pierre mais également en os.
L’archéologue Silvia Bello (Natural History Museum, Londres) indique « La preuve de décorations artistiques suggérerait la production ou la modification d’objets pour des raisons symboliques au-delà de la simple fonctionnalité, ajoutant une nouvelle dimension à la capacité cognitive complexe des Néandertaliens ».
Pour Marylène Patou-Mathis, préhistorienne (Muséum national d’histoire naturelle, Paris) les Néandertaliens ne sont pas les élèves des hommes modernes : « il faut abandonner l’idée d’une influence d’Homo sapiens« .
Le paléoanthropologue Bruno Maureille, (Université de Bordeaux) confirme que « les Néandertaliens avaient les mêmes capacités cognitives que leurs contemporains » mais reste plus dubitatif sur le caractère symbolique de l’artefact : «Comme ces objets sont très rares, il est difficile de savoir pourquoi ils ont été réalisés, ce qui ne veut pas dire qu’ils n’avaient pas de valeur symbolique».
C’est plutôt en archéologie expérimentale qu’il sera possible de retrouver les gestes et les habitudes qui ont marqué la dentition des Néandertaliens. Il faudra reconstruire les chaînes opératoires utilisées par les hommes et les femmes du Paléolithique.
C.R.
Sources
Sources :
A 51,000-year-old engraved bone reveals Neanderthals’ capacity for symbolic behaviour
Nature
Silvana Condemi, Jean-François Mondot